Accueil RÉGIONS Chlef – Diabète, maladies chroniques et Ramadhan : jeûner, est-ce possible ?

Chlef – Diabète, maladies chroniques et Ramadhan : jeûner, est-ce possible ?

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En fonction de son état de santé et de l’évolution de son diabète, pratiquer un jeûne répété sur plusieurs jours présente incontestablement, disent les spécialises des risques de complication. Quels sont les effets du jeûne sur la personne diabétique ? Comment le faire dans de bonnes conditions ? Quelles sont les indications médicales et les contre-indications ? Que dit le Coran ? etc… Telles étaient les questions abordées par des médecins, des nutritionnistes et des imams, lors d’une rencontre organisée dimanche dernier au centre culturel islamique de la ville de Chlef, sous la houlette de l’association des diabétiques « El-Amel ». De nombreux patients étaient présents à ce rendez-vous. Tout d’abord à la question : «que se passe-t-il dans l’organisme lorsque l’on jeûne, d’un point de vue physiologique, un praticien a apporté des éclaircissements sur le sujet et dira : «Le glucose est indispensable à la vie puisque, sous l’action de l’insuline, il pénètre dans les cellules où il va servir à fabriquer de l’énergie pour vivre (ATP). Lorsque l’on mange, tout le glucose n’est pas utilisé immédiatement : une partie est stockée, essentiellement dans le foie, sous forme de glycogène. Lorsque l’on jeûne, la quantité de glucose circulant diminue, la production d’insuline aussi et, sous cette action, le foie va commencer à libérer ses réserves. Mais les réserves hépatiques ne sont pas infinies et ne permettent de couvrir qu’environ 24h de jeûne. Après ces 24h, d’autres mécanismes se mettent en marche : du glucose peut ainsi être fabriqué à partir des protéines (muscles) ou des acides gras (tissu graisseux). Ainsi, la production de glucose va se poursuivre jusqu’à ce qu’il n’y ait plus de substrat… Si le jeûne se poursuit trop longtemps, ces phénomènes adaptatifs vont être dépassés, la production d’ATP deviendra insuffisante et les conséquences vont se faire sentir… La production hépatique de glucose est altérée chez le patient diabétique, la sécrétion d’insuline n’est pas non plus normale, et le patient peut parfois prendre des médicaments qui la stimulent. Tout ceci peut entraîner des conséquences beaucoup plus rapidement délétères en cas de jeûne». Un autre intervenant aborda les risques liés au jeûne lorsqu’on est diabétique et dira : «Il faut savoir de quoi on parle. S’il s’agit d’un jeûne en tant que tel, le risque est principalement hypoglycémique. S’il s’agit du Ramadhan, on parle à la fois du jeûne, mais également du rythme et du mode alimentaire complètement perturbés lorsque l’on peut manger aux horaires autorisés.
Ce sont deux choses différentes. Durant une période prolongée de jeûne, le patient ne pourra rien ingérer, ni de liquide, ni de solide. Le risque encouru est essentiellement un risque d’hypoglycémie, si le patient n’a pas pris soin de faire adapter son traitement en concertation avec son médecin. De plus, lors du jeûne, au coucher du soleil, l’alimentation et l’hydratation sont de nouveau autorisées. Le risque est la surcharge d’apports alimentaires, dont les conséquences peuvent être l’hyperglycémie et la décompensation métabolique aigüe chez les personnes qui prennent leur traitement à des doses parfois inadaptées (au regard de leurs apports caloriques majorés).
Elles risquent dans ce cas d’être carencées en traitement de par ces apports caloriques importants». Et de citer en exemple le cas d’un patient diabétique de type 2 dont la glycémie a augmenté à 3, voire 4 g/l : l’hyperglycémie se manifestera par une soif intense et une envie fréquente d’uriner.
Une quantité élevée de glucose circulera dans son sang et l’organisme, en manque d’insuline, ne pourra plus utiliser ce glucose pour nourrir ses cellules. L’organisme va alors dégrader les graisses pour survivre et produire de l’acétone. L’acétone va acidifier le sang et, si rien n’est entrepris, le patient va donc arriver en état d’acidocétose avec nécessité d’apport urgent d’insuline (la plupart du temps en milieu hospitalier). Il s’agit d’une grave complication du diabète. Il existe également un risque non négligeable de déshydratation, surtout en période de chaleur, ce phénomène peut être accentué par l’hyperglycémie (urines fréquentes et abondantes)». Par ailleurs, sur un point de vue strictement religieux, l’imam de la grande mosquée de Chlef a expliqué dans quels cas le Ramadhan est contre-indiqué dira : «Les règles concernant la dispense du Ramadhan sont très clairement indiquées dans le Coran et de citer la Sourate II verset 183 qui précise : «Si le jeûne peut altérer de manière significative la santé du jeûneur ou lorsque la personne est malade, l’Islam l’exempte du jeûne». Une autre sourate II du verset 185 du Saint Coran dit : «Allah cherche à vous faciliter l’accomplissement de la règle, il ne cherche pas à vous la rendre difficile». Selon un diabétologue «le Ramadhan est contre-indiqué chez les enfants (estimés trop fragiles avant la puberté),les sujets trop âgés, ces derniers ayant un risque important de déshydratation (notamment durant l’été, en période de canicule), toutes les femmes enceintes (parmi elles, les femmes diabétiques enceintes ou les femmes enceintes atteintes de diabète gestationnel), et en cas de diabète déséquilibré traité par insuline».
L’imam fera néanmoins savoir à l’assistance qu’il est possible pour les personnes malades ou fragiles de reporter des périodes de jeûne, et de citer la sourate II verset 184 : «celui d’entre vous qui est malade ou qui voyage jeûnera ensuite un nombre égal de jours», poursuivant «si une personne est dispensée du jeûne par l’Imam, par le Coran ou par son médecin, en raison d’une maladie chronique ou aigüe, elle peut également compenser cette période de jeûne».
Enfin, lors de cette rencontre il a été souligné le rôle du diététicien quant à la gestion de l’alimentation du jeûneur. à noter qu’un débat de questions-réponses a clos cette rencontre au cours de laquelle l’assistance a été «éclairée» sur les risques potentiels liés au jeûne, sachant que le diabète est une maladie évolutive nécessitant des adaptations thérapeutiques régulières. Par conséquent, selon l’évolution de la maladie et les traitements utilisés, le Ramadhan pourra probablement être contre-indiqué.
Bencherki Otsmane

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