Installée solennellement dans une cérémonie présidée lundi passé par Abdelmadjid Tebboune, la Cour constitutionnelle -qui supplante le Conseil constitutionnel- et dont les membres ont prêté serment quelques jours plutôt, entame sa mission sur le terrain. Et le destin aura voulu que la nouvelle instance juridictionnelle suprême en Algérie, dans sa toute première réunion de travail, tenue hier, planche sur un dossier épineux relatif à l’immunité de l’avocat dans l’exercice de ses fonctions en audience. La Cour, dirigée par Omar Belhadj, a ainsi examiné la problématique de l’inconstitutionnalité de l’article 24 de la loi n°13-07 du 29 octobre 2013 portant organisation de la profession de l’avocat comme recours introduit auparavant auprès du Conseil constitutionnel. Résultat, elle a déclaré que cette disposition est conforme à la Constitution.
Ceci, contrairement à la décision, prise en avril dernier, par la Cour suprême, qui avait alors émis un avis favorable sur le recours relatif à l’inconstitutionnalité de cette clause de la loi garantissant l’immunité judiciaire à l’avocat. Mais, depuis lors, l’instance de Kamel Fenniche a renvoyé l’examen du dossier pour les quatre mois à venir. En effet, l’article en question stipule que « l’avocat dans l’exercice de sa profession ne peut être poursuivi pour ses faits, déclarations et écrits dans le cadre des débats ou de la plaidoirie à l’audience. Il bénéficie de la protection absolue et du caractère confidentiel des relations entre lui et ses clients, de la garantie du secret de ses dossiers et de ses correspondances, du droit d’accepter ou de refuser un client ». Pour revenir à la genèse de cette affaire qui a fini par sortir les avocats dans la rue, fin mars 2021, les robes noires avaient exprimé, publiquement et à travers des actions de protestations, des appréhensions quant aux intentions des autorités judiciaires de remettre en cause leur immunité judiciaire en audience. Autrement dit, si l’inconstitutionnalité de la disposition venait à être déclarée, toute déclaration ou écrit de l’avocat en pleine plaidoirie, jugé « inconcevable » par le tribunal, pourrait l’exposer à des poursuites judiciaires. Le contentieux court d’ailleurs jusqu’à nos jours. Pour preuve, le dernier mouvement des avocats, issus des Ordres d’Alger, Tizi-Ouzou, Blida, Béjaïa, Boumerdès… etc. organisé jeudi passé à l’intérieur du Tribunal de Sidi M’hamed. Avec la décision de la Cour constitutionnelle, les avocats sont donc rétablis dans ce qui s’apparente à un droit de jouir de l’immunité dans le cadre de l’exercice de leur fonction dans les instances judiciaires.
Farid Guellil