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« Laisser la place aux autres » : Pourquoi Scorsese ne brigue pas la Palme d’or

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« Il est temps de laisser la place aux autres »: le réalisateur Martin Scorsese, 80 ans, a expliqué dimanche à l’AFP pourquoi il ne briguait pas une seconde Palme d’or à Cannes, où « Killers of the Flower Moon » a été présenté hors compétition. Jusqu’au bout, le Festival a espéré intégrer ce film-événement à la course à la Palme d’or, que Scorcese, légende du cinéma, a déjà remportée en 1976 pour « Taxi Driver ». Mais le long-métrage produit par Apple TV, qui sortira en octobre en salles et dans lequel Martin Scorsese réunit pour la première fois ses deux acteurs fétiche, Leonardo DiCaprio et Robert De Niro, a finalement été présenté hors compétition samedi. « Il est temps de laisser la place aux autres », sourit le réalisateur, interrogé par l’AFP au lendemain d’une montée triomphale des marches avec ses acteurs, et d’un accueil chaleureux du film par la critique internationale. « Je dois partir, il y a des jeunes qui attendent », poursuit-il. « J’aime les trophées en or. Je les adore », a ajouté le réalisateur, Oscar du meilleur film en 2007 avec « Les Infiltrés » et Lion d’or d’honneur à Venise en 1995, mais resté relativement peu récompensé au regard de l’ampleur de sa carrière cinématographique. « Maintenant, je me concentre sur le temps, l’énergie et l’inspiration, c’est le plus important ». « Killers of the Flower Moon » reprend les thèmes classiques de Scorsese, une histoire de violence, de criminels et d’amour mais est peut-être aussi l’un des plus politiques du cinéaste. Il décrit la façon dont des Blancs ont spolié les membres d’un peuple amérindien, les Osage, sur les terres duquel du pétrole a été trouvé pendant les années 1920. Des problématiques qui continuent un siècle plus tard de hanter les Etats-Unis, souligne-t-il, bien qu’il ne s’agisse « pas d’un film à message » qui ne parlerait qu’aux convaincus.

Soigner les plaies
La manière dont ont été traités les Amérindiens « reste une plaie à soigner », relève Martin Scorsese, et « peut-être qu’en présentant les choses, ça permettra de les comprendre ». Le principal rôle féminin est joué par un actrice d’origine amérindienne Blackfeet, Lily Gladstone, et de nombreux rôles secondaires sont tenus par des Osage, sur les terres desquels le film a été tourné. On peut aussi entendre De Niro et DiCaprio délaisser l’Anglais par moments pour parler la langue de ce peuple. « Peut-être qu’en connaissant notre histoire et en comprenant où nous sommes, nous pouvons faire la différence et être à la hauteur de ce que notre pays est censé être », espère Scorsese. « Le pays est toujours jeune, il souffre toujours de ses blessures de jeunesse. Ce film est une façon de reconnaître cela », déroule-t-il. « Montrons juste l’histoire et voyons ce qu’il se passe » Lui-même confie l’importance qu’a eu le cinéma pour son ouverture au monde: « Je viens d’une époque, en Amérique dans les années 1950, où l’on ne pouvait pas dire certaines choses », jusqu’à ce qu’une (nouvelle) génération de cinéastes arrive « et s’empare de ces sujets », explique-t-il. « Je suis né dans une famille d’immigrants (d’origine italienne, NDLR) où il n’y avait pas de livres. Donc, mes premières informations, je les ai trouvées dans la rue, puis dans les cinémas, et les films m’ont amené à la musique, et aux livres… » Scorsese confie avoir longtemps rêvé de réaliser un western, un genre avec lequel son dernier film s’amuse, renversant les camps du bien et du mal avec son cow-boy arrivant en ville pour y jouer un rôle extrêmement trouble. « (J’aime) les codes du western, le style. J’étais très excité quand je voyais des chevaux. Mais j’avais peur de m’en approcher ! », a-t-il plaisanté. Un seul regret ? Le film se déroule pendant la prohibition, dans un Etat où la consommation d’alcool était interdite par la loi: « J’ai toujours imaginé me rendre dans un saloon ou un bar, j’aurais pu faire de grandes scènes (dans ces lieux). Mais ça n’existait pas » à l’époque.

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