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Syrie : qui se bat, contre qui et pourquoi ?

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Dans le pays ravagé par une guerre civile depuis mars 2011, plusieurs conflits se jouent entre des belligérants aux motivations diverses. Décryptage. Qui se bat en Syrie, et contre qui ? La guerre est totale dans ce pays et les fronts se multiplient. S’y affrontent des acteurs intérieurs mais aussi extérieurs, et chacun poursuit des objectifs différents. Le tout sur fond d’escalade entre deux protagonistes majeurs, Moscou et Ankara. Décryptage d’une guerre qui peut en cacher plusieurs…

Les alliés de Damas
La Russie et l’Iran soutiennent depuis le début du conflit en 2011 le régime du président syrien Bachar el-Assad et interviennent sur le terrain de façon décisive. Si leurs objectifs finaux ne sont pas les mêmes, ils apparaissent soudés dans leurs objectifs d’annihiler l’opposition et de maintenir le régime en place.

La Russie : une logique de grande puissance
Moscou, pour qui la Syrie est le dernier point d’influence dans la région, et qui voit avec ce conflit un moyen de s’affirmer face aux États-Unis, est à la manœuvre depuis fin septembre 2015. Son aviation est entrée en action, officiellement pour frapper des cibles «terroristes», un terme qui, pour Damas et Moscou, recouvre toute l’opposition armée au régime. Sur le terrain, très peu de ses frappes ont en fait visé les djihadistes de l’État islamique (EI). De l’aveu même de son chef de la diplomatie, Sergueï Lavrov, la Russie a aujourd’hui «renversé la situation» et permis au régime de Damas, en difficulté en 2015, de reconquérir des points dans l’Ouest, le Sud, et surtout le nord du pays, où les forces pro-régime, appuyées par les bombes russes, sont à l’offensive. Lancée le 1er février, cette poussée dans la région d’Alep, quasiment encerclé par les forces pro-régime, a fait au moins 500 morts civils selon une ONG syrienne, et poussé plus de 50 000 personnes aux portes de la Turquie, dont la frontière reste fermée.

L’Iran : contrer l’Arabie saoudite
L’Iran, qui a envoyé des milliers de «conseillers militaires» en Syrie et qui soutient le régime de Damas par le biais de la milice chiite libanaise du Hezbollah et surtout des milices chiites irakiennes, se bat par procuration contre son ennemi et rival régional numéro 1, l’Arabie saoudite. Téhéran a mis en garde ce week-end Riyad contre l’envoi de troupes en Syrie.

Les soutiens de la rébellion
Face aux alliés de Damas, qui n’ont pas varié d’un pouce, le camp «anti-Assad» est désuni. La stratégie du rouleau compresseur russe a pris de court les Occidentaux (qui prônent une solution politique) et surtout entraîné une réaction virulente de la Turquie et, dans une moindre mesure, de l’Arabie saoudite.

La Turquie : lutter contre l’indépendentisme kurde
Depuis quelques jours, l’escalade verbale se développe entre Ankara et Moscou, déjà à couteaux tirés depuis la destruction par la Turquie fin novembre d’un avion militaire russe accusé d’avoir violé son espace aérien. Ankara est hostile au régime d’Assad et soutient des groupes rebelles, notamment islamistes, en Syrie. Mais la Turquie est avant tout obnubilée par les forces kurdes en Syrie, soupçonnées de visées indépendantistes et qu’elle considère comme une émanation du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan), avec qui elle est en guerre sur son territoire. Or, l’offensive russo-syrienne dans le nord et l’affaiblissement de la rébellion ont permis aux Kurdes d’avancer et de reprendre le contrôle de plusieurs localités. Inacceptable pour Ankara, qui craint de voir les Kurdes syriens étendre leur influence à la quasi-totalité de la zone frontalière. La Turquie bombarde depuis trois jours des positions kurdes dans le nord de la Syrie, malgré les appels de Washington et Paris, à la fois alliés d’Ankara au sein de l’Otan, mais qui soutiennent également les Kurdes syriens, considérés comme les plus efficaces dans la lutte contre les djihadistes de l’EI.

L’Arabie saoudite : contrer l’Iran
Riyad, qui mène par groupes rebelles interposés une guerre contre l’Iran en Syrie, a annoncé une implication grandissante sur le terrain. Se disant disposée à envoyer des forces spéciales en Syrie, l’Arabie saoudite, qui fait partie de la coalition pilotée par les États-Unis contre le groupe EI, a déployé ce week-end des avions de combat sur la base turque d’Incirlik, pour «intensifier les opérations aériennes contre l’EI».

Les États-Unis : contenir (mollement) l’EI
Ils bombardent l’EI depuis septembre 2014 en Irak et en Syrie (et mènent l’essentiel des frappes de la coalition), mais le président américain Barack Obama, artisan du désengagement d’Irak, ne veut pas renvoyer de troupes au sol dans la région, fixant d’autres priorités à sa politique étrangère. En outre, les États-Unis sont en pleine campagne des primaires pour la présidentielle de fin d’année. Ils sont accusés par leurs alliés occidentaux, notamment la France, de ne pas s’engager assez et de faire preuve d’»ambiguïtés» en faisant trop de concessions à la Russie.

La France : éliminer le régime et l’EI
Longtemps l’un des pays les plus hostiles au président Assad, elle a, sous la pression des attentats de 2015, fait de la lutte contre le groupe État islamique sa priorité, et est membre de la coalition anti-EI en Irak et en Syrie. Elle continue néanmoins à réclamer un départ d’Assad à plus ou moins court terme et appuie l’opposition syrienne qui s’est constituée en décembre à Riyad, rassemblant des politiques et des représentants de groupes armés.

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