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«La Guerre d’Algérie dans le roman français» : Un essai de Rachid Mokhtari

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Un essai appuyé sur une lecture critique d’une centaine de romans d’auteurs français sur «la Guerre d’Algérie», a été publié récemment par Rachid Mokhtari sous le titre «La Guerre d’Algérie dans le roman français».

L’ouvrage est édité en deux tomes, «Esthétique du bourreau» et «Elégie pour une terre perdue», par Chihab. Dans le premier tome, «Esthétique du bourreau» (461 pages), l’auteur -pour qui le terme «Guerre d’Algérie» renvoi à toute la période coloniale (1830-1962)- s’intéresse d’abord aux écrits ayant accompagné la colonisation de l’Algérie, particulièrement à l’œuvre d’Eugène Fromentin, artiste peintre et auteur de «Un été dans le Sahara» (1857), et celle d’André Gide auteur de «Les nourritures terrestres» (1897). Rachid Mokhtari compare ces deux ouvrages et croit déceler une volonté de «poétiser la conquête», c’est-à-dire la colonisation de l’Algérie. Il souligne également le contraste entre deux grandes sagas de la littérature française: «Les chevaux du soleil» publiée en six volumes par Jules Roy à partir de 1967 et la trilogie «C’était notre terre» (2008), «Les vieux fous» (2011), et «Un faux pas dans la vie d’Emma Picard» (2015) publiée par Mathieu Belezi, pour confronter des conceptions différentes d’une de ce qu’il appelle la «fresque de l’Algérie pré 1954». Un autre chapitre est également dédié à «la victime en uniforme», l’image littéraire du militaire français (engagé volontaire, parachutiste, appelé du contingent…) qui «se donne à lire dans sa misère de victime de guerre».
Dans le même ordre d’idées, l’universitaire s’intéresse à l’image littéraire du parachutiste français, antithèse du soldat du contingent. Une image passant du «spécialiste de la gégène» au «symbole de l’honneur de la nation» donnant naissance au «mythe du para», «une nébuleuse qui entrave le témoignage des victimes au profit des propos fantasques du bourreau». Le second tome de cette essai, «Elégie pour une terre perdue» (288 pages), se penche sur les écrits de «pieds-noirs» qui ont entamé des retours, réels ou imaginaires au «paradis perdu». Dans ces écrits, «la guerre s’efface pour ne devenir qu’un écho», analyse l’auteur. Rachid Mokhtari évoque la «nostalgérie du pied-noir» et le traumatisme de «l’exode de 1962» à travers «Au pays de mes racines» (1980) de Marie Cardinal, un roman qu’il qualifie d’ «autoanalyse thérapeutique» où la romancière revient «à la rencontre d’une nouvelle Algérie». Ce concept se décline de manière plus «nostalgique et inconsolable», comme dans le «roman-complainte», Maman la blanche (1982) de Alain Vircondelet, écrit l’auteur. Dans cette production d’écrivains pieds-noirs, l’universitaire signale les rares écrits évoquant la guerre et les horreurs dont les auteurs étaient témoins directs et parfois impliqués eux-mêmes, à l’image de Jean-Noël Pancrazi et de Marie-Christine Saragosse. Rachid Mokhtari a également sélectionné deux autres groupes de romans, les carnets de retour en Algérie et les récits de «retour généalogique» sur les parcours intimes de familles pieds-noirs. Universitaire, romancier et journaliste, Rachid Mokhtari a publié plusieurs ouvrages consacrés à la littérature algérienne, dont «Tahar Djaout, un écrivain pérenne», «Le nouveau souffle du roman algérien» ou encore «La graphie de l’horreur».

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