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Le lait entre commerçants et spéculateurs de toutes sortes

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Par Ali El Hadj Tahar

Le lait se fait rare à chaque fois que les contrôleurs des prix font des descentes. Il disparait carrément ces temps-ci car les opérations deviennent musclées. Lorsque pénalisé, le marchand accuse le coup ou arrête carrément de distribuer ce produit car rien ne l’oblige à le vendre. Il ne le fait que lorsqu’il juge la marge bénéficiaire suffisante par rapport à son travail. Alors pourquoi ce produit est-il plus vendu chez des marchands ne disposant parfois pas de registre de commerce ou des marchands ambulants que dans les épiceries ? Depuis que le problème existe, les marchands informels sont devenus des experts, certains ayant même acquis leur propre camion frigorifique pour ramener la marchandise et engranger plus de bénéfices, passant ainsi de vendeurs informels à des grossistes attitrés.
Le 25 janvier passé, le ministre du Commerce, Kamel Rezig, est lui aussi monté au créneau. «Il n’est pas logique que les 117 laiteries en activité à travers le territoire nationale produisent quelque 4,7 millions de sachets de lait/jour et que le citoyen ne trouve pas un seul sachet chez le commerçant de détail», a-t-il déploré. Le ministre a ajouté que d’importantes quantités de la poudre de lait, distribuées par l’Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (ONIL), ne sont pas destinées à la production du lait en sachet subventionné. Chaque année ou presque nous entendons des responsables parler de «l’arnaque de la mafia du lait», de «détournement vers la fabrication des autres produits laitiers et vers d’autres industriels», de «dysfonctionnements dans la distribution»… Les descentes des agents de contrôle des pratiques commerciales et de la répression des fraudes sont quasi automatiques quand les autorités tirent la sonnette d’alarme. Si avéré, le problème du détournement de la poudre de lait vers les fabricants de produits laitiers, est pourtant facile à résoudre. Mais s’agissant des dysfonctionnements, rien n’a été fait pour réguler la distribution de ce produit afin que la marge bénéficiaire soit réellement, pas théoriquement, suffisante au revendeur pour qu’il continue à mettre ce produit dans son magasin. En voulant sanctionner avant de dialoguer, l’État vient d’engendrer une grève non déclarée des distributeurs, puisque depuis la déclaration de Kamel Rezig le fameux sachet n’est pas disponible dans certaines wilayas.
Ce sont les dispositions du décret exécutif n° 01-50 du 12 février 2001 qui fixent les prix à la production et aux différents stades de la distribution du lait pasteurisé conditionné en sachet, soit 25 DA pour le prix au consommateur, avec une marge bénéficiaire de 0,90 DA pour le grossiste et pour le détaillant. Le lait est un produit périssable qui nécessite le transport quotidien. Or, ce n’est souvent pas le fabricant qui assure son transport mais le grossiste, qui n’a pas la même marge bénéficiaire si la distance est de 2, 30 ou 80 kilomètres ; puisque la navette est quotidienne tout comme les charges y afférentes. Selon le président de l’Association nationale des commerçants et artisans (ANCA), Boulanouar El Hadj Tahar, seule l’augmentation du nombre de laiteries, donc le rapprochement des quais de distribution, peut résoudre cette crise de manière définitive. La réduction des frais de transport rendrait plus rentable la vente de ce produit dans les épiceries, d’autant que l’interdiction d’étaler les caisses en dehors des locaux a contraint beaucoup de commerçants, si ce n’est la majorité, à ne plus le vendre ou de s’en débarrasser dès la livraison en le cédant aux vendeurs informels qui, à leur tour, le revendent à 35 DA ou plus, selon l’éloignement et l’isolement de la région. Certains épiciers le détournent pour en faire du petit lait, afin d’augmenter leur marge bénéficiaire, avec la bénédiction de certains clients. Donc, le contrôle et la disponibilité ne peuvent rien résoudre sans responsabilité citoyenne.
A. E. T.

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