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Chlef : les nuits mouvementées agacent les résidents du quartier « La Zone Différée »

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Passé 16 heures, la ville de Chlef se vide de ses badauds et de ses fonctionnaires. La quasi-totalité des commerces baisse rideau. On ferme les magasins dès la sortie des bureaux, comme si un couvre-feu est imposé à la population du chef-lieu de wilaya qui assure pourtant la transition entre les deux plus grandes villes du pays.
« Ce n’était pas comme ça », entend-on dire ici et là pour justifier une situation des plus anachroniques dans cette Algérie de 2016 que l’on dit entreprenante et laborieuse. Mais la réalité est là : la vie s’arrête à Chlef au moment où commencent à s’animer les sites d’habitation construits aux alentours de la ville après le séisme de 1980. Ce qui irrite davantage, c’est que le calme apparent de l’après-midi est rompu en pleine nuit. Avec fracas et bruits.
Bruits de motocycles, tapage nocturne, fumées suffocantes. L’été dans les beaux immeubles de la zone différée au quartier dit « la zone différée », là où se trouve le siège de l’APC, la faculté de droit, la bibliothèque principale et deux importantes cliniques privées, c’est le calme absolu qui s’instaure dès 17 heures. Pourtant, la zone fait tampon entre le centre-ville et Hay Bensouna, la cité populeuse et animée qui, paradoxalement, ne dort que tard dans la nuit. La zone différée abrite plusieurs commerces de détail, des cafés, des pizzerias, des restaurants, des cabinets médicaux… et plus de 300 logements occupés depuis quelques années déjà. Mais cela ne fait pas d’elle un lieu animé, car malgré ses atouts, cette zone d’habitation nouvelle sombre elle aussi dans la déprime. Ce calme cache cependant une réalité amère que les habitants de ces nouvelles cités LSP ont découvert dès leur installation dans leurs logements : le bruit excessif qu’ils doivent subir à des heures impossibles de la nuit. En effet, alors que toute la ville est endormie, des bandes de jeunes enfourchant des motocyclettes particulièrement bruyantes, surgissant de la cité Bensouna, passent et repassent par la rue principale, en longeant les bâtiments et la gare d’autobus. Les pétarades réveillent en sursaut les enfants en bas-âge, brisent le sommeil des adultes et donnent des insomnies aux personnes âgées. Et quand ce ne sont pas les mobylettes ou les scooters, ce sont des passants qui semblent se bagarrer alors qu’ils ne font que discuter… à voix haute ! Sid-Ahmed, qui réside à la cité Sadadou, se plaint souvent d’être dérangé dans son sommeil par des énergumènes qui n’ont aucun sens de la vie en société. « Ils se comportent comme s’ils étaient en rase campagne, loin de toute habitation », relève-t-il en ajoutant qu’il regrette le jour où il a acquis son logement. Au début, avoue-t-il, l’affaire était séduisante d’autant que le quartier présente plusieurs avantages : proximité du centre-ville, des institutions publiques, de l’école et, surtout, de la piscine où, deux à trois fois par semaine, il entraine les très jeunes nageurs. «Nous restons sur le qui-vive» Des médecins résident également dans cette cité qui fait rêver beaucoup de monde. « Certes, le site est magnifique, il est proche de la ville et de la cité Bensouna, mais les gens ne savent pas ce que nous endurons », nous dit un médecin spécialiste qui habite ici depuis deux ans maintenant. « C’est l’enfer chaque nuit, des camions poids-lourds passent en forçant sur l’accélérateur car il n’y a aucun obstacle », souligne-t-il, expliquant que le vrombissement des moteurs est insupportable à l’ouïe. « Le problème est qu’on est sur le qui-vive car on ne sait à quel moment va passer un camion, une mobylette sans échappement silencieux ou une bande de soulards qui crient à tue-tête leur mésentente », raconte un autre résidant occupant un appartement au 4ème étage. « Plus c’est haut, dit-il, plus le bruit est intolérable. » Face à ces impondérables, beaucoup ont trouvé la parade : le double vitrage et la pose de baies vitrées au balcon. L’enfermement total en quelque sorte pour ne pas être dérangé. Du coup, personne ne profite de sa terrasse ni de son balcon. La vie se concentre au salon et dans l’exiguïté des chambres. Heureusement, fait constater un habitant, « il nous reste le petit jardin que nous avons aménagé nous-mêmes pour nos enfants et qui nous permet de respirer un peu. » Des brûlis en pleine ville. Pas si sûr ! La proximité du grand marché de Hay Bensouna cause d’autres désagréments. Situé à moins de 50 mètres de la cité, ce grand espace commercial attire des centaines de fournisseurs qui, très tôt le matin, livrent les marchands installés à l’intérieur de l’enceinte commerciale. Le va-et-vient incessant des camionnettes et autres camions de livraison ne laisse aucun répit aux habitants qui, malgré eux, se voient obligés de se réveiller aux aurores. Et ce n’est pas fini : alors que le bruit des camions commence à peine à s’estomper, ce sont les bus desservant les agglomérations à l’ouest et au nord de la ville qui prennent la relève. En effet, la station de bus se trouve… en dessous des bâtiments. Et s’il est des gens que le ronronnement des moteurs arrive à bercer, ils seront très vite réveillés en sursaut par les vociférations et les grossièretés débitées gratuitement par les chauffeurs et les receveurs. Last but not the least, il est un autre phénomène qui tend à se généraliser aux quatre coins de la ville : la pratique des brûlis, même en pleine ville. En effet, chaque soir que dieu fait, des feux sont allumés tout autour du marché. On brûle et les ordures et tout ce qui traîne comme papier, bout de bois, sachets et boites en plastique… Plus qu’irritante, l’odeur pestilentielle qui s’en dégage imprègne les demeures, les habits et toute l’atmosphère. Face à ces désagréments, il n’y a malheureusement aucune parade. Ainsi va la vie, l’été, dans les beaux immeubles de la zone différée.
Bencherki Otsmane

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