L’Union européenne (UE), par la voix de son haut représentant pour la politique étrangère et la politique de sécurité, Josep Borrell, « vient d’assÉner un coup mortel à la fiction de la marocanité du Sahara occidental », a indiqué, hier, l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles, Amar Belani.
«Pour la troisième fois, en l’espace de dix jours (respectivement les 3, 7 et 13 juillet 2020), l’Union européenne, par la voix de son haut représentant pour la politique étrangère et la politique de sécurité, Josep Borrell, vient d’asséner un coup mortel à la fiction de la marocanité du Sahara occidental », a expliqué M. Belani dans une déclaration à l’APS. En effet, en réaction à la pression qui monte au sein de l’hémicycle européen sur la question du Sahara occidental (statut, ressources, droits de l’Homme etc..), comme en témoigne la multiplication des questions écrites qui sont adressées par les eurodéputés, de tous bords politiques, à la commission européenne qui est sommée d’y répondre dans un délai maximal de six semaines, cette dernière « vient donc de réaffirmer que pour elle, ainsi que pour tous ses Etats membres, le Sahara occidental reste un territoire non autonome, dont le statut final n’est pas encore fixé, puisqu’il reste à déterminer par les résultats du processus en cours mené par les Nations unies », a ajouté M. Belani. À cette réaffirmation d’une position tranchée et ferme sur la non-reconnaissance de la prétendue marocanité du Sahara occidental, le Haut représentant a pris soin d’ajouter que « l’UE soutient les efforts du Secrétaire général des Nations unies pour parvenir à une solution politique juste, durable et mutuellement acceptable, garantissant l’autodétermination du peuple du Sahara occidental ». M. Belani a soutenu que ce rappel officiel par l’UE des principes du droit international, tel que le statut non autonome du territoire du Sahara occidental (« séparé et distinct » selon l’arrêt du 21 décembre 2016 de la Cour de justice de l’UE) et l’éligibilité de son peuple à exercer son droit à l’autodétermination marque bien l’effritement des soutiens espérés par la puissance occupante dont les prétentions illégitimes recevront le coup de grâce à la fin de cette année, ou au début de l’année 2021, lorsque les instances judiciaires européennes statueront définitivement sur l’annulation des accords scélérats conclus entre le Maroc et l’UE en matière agricole et de pêche. « Il faut souligner que la jurisprudence européenne ne manquera pas, à cette occasion, de conforter la cohérence et la logique judiciaire en partant de l’arrêt du 21 décembre 2016 de la CJUE qui avait conclu que les accords d’association et de libéralisation conclus entre l’UE et le Maroc ne sont pas applicables au Sahara occidental », a-t-il rappelé. À cet égard, ajoute M. Belani, la Cour avait relevé que compte tenu du statut séparé et distinct garanti au territoire du Sahara occidental en vertu de la Charte des Nations unies et du principe d’autodétermination des peuples, il est exclu de considérer que le champ territorial de ces accords englobe le Sahara occidental. Par ailleurs, rappelant le principe de l’effet relatif des traités « en vertu duquel un traité ne doit ni nuire ni profiter à des tiers sans leur consentement », la Cour s’est également référée à l’avis consultatif rendu par la Cour internationale de justice en 1975 au sujet du Sahara occidental, qui considère que « le peuple de ce territoire doit être regardé comme un tiers » susceptible d’être affecté par la mise en œuvre de l’accord de libéralisation, d’autant plus, relève M. Belani, que le peuple sahraoui, seul maitre de son territoire, n’a pas donné son consentement à ce que cet accord soit appliqué au Sahara occidental. « D’ailleurs, sous la contrainte de l’UE, ces principes et conditions ont été pris en charge dans les textes d’application relatifs à l’extension illégale des préférences tarifaires aux produits originaires du Sahara occidental », a-t-il rappelé. Acculé, le Maroc a été obligé d’accepter que les décisions du Conseil mentionnent explicitement dans ces textes que « rien dans les termes de ces accords ne permet de considérer que l’UE reconnait la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental » et que cette dernière « ne préjuge pas de l’issue du processus politique sur le statut final du Sahara occidental qui a lieu sous l’égide des Nations unies ». Cette prudence de la part de la commission, qui redoute de se retrouver dans l’impasse et qui veut se prémunir contre les effets ravageurs que pourrait avoir un nouvel arrêt d’annulation de la CJUE sur sa crédibilité (déjà entamée par ce recours à l’artifice de l’accord modificatif négocié dans la précipitation et sous la pression de certains États membres), « a également obligé le Maroc d’accepter la mise en place d’un mécanisme d’évaluation de l’impact de ces nouveaux accords sur le Sahara occidental », a-t-il expliqué.
« Ceci prouve, bien entendu, que le Maroc occupe un territoire qui échappe totalement à sa souveraineté, car aucun État souverain n’acceptera de tels dispositifs contraignants sur une seule partie de son territoire, déterminée par un État tiers », a-t-il indiqué, affirmant qu' »en acceptant d’étendre explicitement un accord existant au Sahara occidental, le Royaume du Maroc reconnaît qu’il n’est pas souverain à l’égard de ce territoire. L’Espagne, par exemple, n’aurait jamais accepté de conclure un accord international explicitement applicable à la Catalogne ». Enfin, réagissant à l’interpellation de l’eurodéputé danois, Nikolaj Villumsen (gauche unitaire européenne) sur la nécessité d’étiqueter les produits issus des « colonies dans le Sahara occidental occupé par le Maroc » au même titre que les produits en provenance des colonies israéliennes (Arrêt de la CJUE du 12 novembre 2019), le Haut représentant de l’UE a affirmé que tous les produits alimentaires mis sur le marché de l’UE doivent porter l’étiquetage et fournir des informations loyales et précises sur l’origine et le lieu de provenance de la denrée alimentaire pour ne pas induire en erreur les consommateurs. Cela étant, même étiquetées correctement les marchandises « marocaines » originaires du Sahara occidental occupé restent fondamentalement illégales car elles sont produites et exportées en violation de la souveraineté permanente du peuple sahraoui sur ses ressourc es naturelles, a conclu l’ambassadeur.
Mokhtar B.