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Indiana Jones a 35 ans : L’histoire secrète des Aventuriers de l’arche perdue

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Indiana Jones a 35 ans : retour sur le film d’action fondateur des 35 dernières années.
« Avec ce film j’ai appris à simplement aimer les choses que je faisais au lieu de les adorer », raconte Steven Spielberg à propos de son expérience sur Les Aventuriers de L’Arche Perdue.

Construit contre la logistique maboule et la politique inflationniste de 1941 (son film précédent, comédie foutraque qui avait coûté une fortune mais rapporté pas grand chose), le premier volet de la saga Indiana Jones reste l’un des films dans lequel le réalisateur aura mis le plus de son énergie – le tournage, mené à un train d’enfer, a été conclu avec douze jours d’avance sur le planning – et probablement le moins de son investissement personnel – c’est un pur exercice de style qui lui appartient à peu près autant qu’à son producteur, George Lucas. Pour la première fois de sa carrière, Spielberg envisageait l’un de ses films non pas comme une question de vie ou de mort mais en se plaçant dans la peau d’un artisan capable de maîtriser son plateau et son budget – ce qui ne lui était jamais vraiment arrivé jusque là, malgré son statut déjà acquis de wonderboy. Une posture profil-bas, qui aura permis de déboucher sur l’une des oeuvres les plus divertissantes de toute l’histoire du cinéma. Si Les Dents de la mer avait en quelque sorte « inventé » le blockbuster en opérant une véritable cassure dans le processus industriel hollywoodien, Les Aventuriers…, lui, va établir le grand mode-d’emploi du genre, sur lequel se cale depuis 35 ans absolument tous les films d’action US. A raison d’environ un climax par bobine, le film explosait autant les compteurs du grand spectacle qu’il établissait un véritable standard rythmique, rendant hystérique la planète toute entière. C’était à la fois un prototype, un modèle de série et un paradigme.
Revoir aujourd’hui ce film là, c’est constater, sans béatitude, ni nostalgie, à quel point Hollywood – Spielberg compris – à échoué depuis a établir de nouveau format. Homme d’affaire évidemment redoutable, George Lucas avait fait des Aventuriers… un enjeu économique majeur pour sa société Lucasfilm. Lui et Spielberg s’étaient élaboré eux mêmes de contrats absolument faramineux (1,5 millions de salaire pour le premier, 4 pour le second, ainsi qu’un très gros pourcentage sur les recettes pour chacune des deux parties) et jugés proprement indécents par toutes les grandes majors hollywoodiennes, qui refusent une à une de s’affilier au projet. Seul Michael Eisner, alors patron de la Paramount, accepte de s’aligner sur ses conditions là, tout en y incluant un lourd système de pénalités pour Lucasfilm en cas de dépassement de budget, ce qui peut bien évidemment expliquer l’efficacité affolante de Spielberg sur le tournage).
On a souvent dit que Lucas et Spielberg avaient « tué » Le Nouvel Hollywood en redonnant le pouvoir aux majors plutôt qu’aux créateurs, on voit qu’en réalité les choses sont beaucoup plus complexes que cela. En prenant de manière aussi spectaculaire le pouvoir sur les grands studios hollywoodiens, les deux s’offraient beaucoup plus que plein de zéros sur leur compte en banque respectifs: la garantie qu’ils pouvaient eux même fixer les règles du jeu. Comme l’écrivait à l’époque Liz Smith, éditorialiste de Cosmopolitan : « Si Hollywood accepte le deal mis en place par Lucas et Spielberg, cette ville va littéralement imploser et après les hurlements que cela va occasionner, il va y avoir de sérieux travaux de mise en question à faire dans les bureaux des patrons de studio ». Évidemment Hollywood n’a pas implosé, évidemment les majors ont fini par gagner par K.O, mais cet instant est peut être le dernier dans l’histoire du cinéma hollywoodien où un binôme producteur/ réalisateur a pu à ce point reverser l’équilibre des forces.
L’histoire retiendra que la matrice du blockbuster contemporain aura été un film conçu dans une indépendance totale, développé à l’extérieur du régime des studios et pensé comme une lettre d’amour à la pop culture des années 40, 50, 60. Un film d’auteurs, au pluriel, mis en orbite par sa virtuosité artisanale et son savoir faire hors-norme. Un film nourri de paradoxes presque poétiques, où le rétro trace tranquillement les contours du futur.

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