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CLAIRE BILLET, RÉALISATRICE DU DOCUMENTAIRE « ALGÉRIE-SECTION ARMES SPÉCIALES » : « Ce n’est qu’un début sur la guerre chimique en Algérie »

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Claire Billet, la réalisatrice du documentaire « Algérie : section armes spéciales » qui est une œuvre inédite sur l’utilisation des gaz chimiques par l’armée coloniale lors de la guerre d’Algérie a bien voulu répondre à nos questions :


Réalisé par Zouhir Mebarki et Farid Guellil

Le Courrier d’Algérie : Votre documentaire « Algérie-Section armes spéciales » a suscité des réactions diverses, parfois bienveillantes, comme en Algérie, d’autres fois, comme en France, carrément hostiles. En témoigne la censure dont il est l’objet. Qu’en pensez-vous ?
Claire Billet : Je pense qu’il est primordial de ne pas parler de censure. La chaîne a des contraintes d’actualité avec la peur de la guerre et les bruits de bottes partout dans le monde qui me dépasse. Le film existe grâce aux financements publics de France TV, des fonds de soutiens publics et de la chaîne suisse, la RTS. Je pense que, malgré la polémique et la sensibilité du sujet, la guerre chimique, nous sommes nombreux, voire les plus nombreux, le peuple des deux côtés de la Méditerranée, à vouloir simplement que les faits historiques soient dits et écrits pour soulager, tenter de soulager un tout petit peu la mémoire traumatique des personnes qui ont subi, traversé la guerre d’indépendance.
Il n’a été diffusé que par la seule chaîne suisse RTS2 qui n’est pas la chaîne la plus captée en Algérie et pourtant le succès est déjà là. Quel effet cela vous fait ? 

Je suis un peu débordée d’émotion mais je suis plutôt du genre à garder la tête froide. Le plus important pour moi était que les témoins qui ont eu la force de témoigner dans le film, le courage de parler de moments profondément douloureux, soient satisfaits. Ils m’ont tous remercié et c’est la seule chose qui compte.
Vous n’avez choisi que deux régions, les Aurès et le Djurdjura. De plus aucun chiffre des victimes n’a été avancé. Il laisse comme un goût d’inachevé. Quel est votre avis ?
Je suis complètement d’accord, il n’y a pas un goût d’inachevé mais plutôt de début. La recherche historique est au début sur la guerre chimique. L’usage du napalm est très connu en Algérie, méconnu en France (ça me semblait indispensable d’ailleurs de ne pas en faire mention dans le film). Christophe Lafaye a ouvert une porte, il s’agit maintenant de continuer à effectuer des recherches pour comprendre l’ampleur et les faits qui se sont joués. J’ai choisi ces deux régions car, pour moi, elles sont des régions symboliques du combat algérien pour l’indépendance. Et la guerre chimique est symbolique des violences coloniales. C’est tout l’enjeu décolonial : dire les faits.
Beaucoup d’Algériens qui l’ont raté le 9 mars dernier, voudraient malgré tout voir le film. Existe-t-il une solution, selon vous, après la « déprogrammation » par France 5 ?

France télévision a mis en ligne le film sur la plateforme internet de France TV. Il est donc visible à ce lien, avec un compte gratuit : https://www.france.tv/france-5/la-case-du-siecle/7025014-algerie-sections-armes-speciales.html
Nous savons que vous avez une maitrise d’histoire et un master en journalisme que vous avez obtenu à la Sorbonne respectivement en 2002 et 2005. Pour permettre aux Algériens de mieux vous connaitre, pouvez-vous en dire un peu plus sur votre situation personnelle ? 
Je suis partie très jeune journaliste indépendante en Afghanistan car je voulais couvrir un conflit armé. J’ai vécu un an au Pakistan pour couvrir les deux pays puis 5 ans en Afghanistan. Je travaille là-bas depuis 2004.
Il y a un peu plus d’une décennie, lassée de l’urgence et du formatage de l’actualité, j’ai commencé à me former aux films documentaires, écriture et réalisation. Je concentre mon regard sur les conséquences des guerres (la migration, notamment), la mémoire de cette brutalité portée dans les familles, la place des injustices. J’écris et réalise des films documentaires depuis une quinzaine d’années maintenant, principalement avec Olivier Jobard.
Z. M./F. G.

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