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Alger : Les citoyens en quête du lait en sachet

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Depuis plus d’un mois, le lait en sachet se fait de plus en plus rare sur les étals des épiceries et superettes.

Une sorte de crise s’est installée et touche désormais tout le territoire, y compris la capitale. Dés les premières heures de l’aube, des files d’attente se forment devant les commerces du coin. Peine perdue pour certains, car beaucoup n’arrivent pas à acheter ce produit très consommé par les citoyens. Les quantités reçues par les commerçants sont insuffisantes. Chaque matin dans le Grand Alger, c’est la panique totale. Tout le monde guette la moindre information sur une éventuelle épicerie qui pourrait être approvisionnée en lait en sachet. Et dès qu’un camion-livreur arrive, une longue queue se constitue devant ces espaces commerciaux, chacun espérant être le premier servi. Mais avec des quantités insuffisantes, les commerçants écoulent leur marchandise en si peu de temps et une partie des clients n’est pas satisfaite.
Les jours de week-end deviennent cauchemardesques car tout le monde part à la recherche de ce produit vital et des files d’attente sont perçues partout dans la capitale. La cité Maya, une cité de la banlieue d’Alger réputée calme en ce début de semaine, pourtant des attroupements sont perçus ça et là. Des gens qui viennent même des cités environnantes dans l’espoir de trouver un point de vente de sachets de lait. Vers 8 heures, un camion-livreur de la laiterie Safa arrive, aussitôt les gens sont à l’affut. Le commerçant n’aura même pas le temps de faire entrer sa marchandise, elle est écoulée en un temps record. Une vieille dame parmi la foule semble insatisfaite. Elle nous dit : « c’est le troisième jour que je viens et je n’arrive pas à en acheter, Allah yastar, mais, c’est la capitale, non ! ». Mustapha .K. un autre citoyen qu’on a rencontré sur place, même s’il a pu en acheter, cela n’est pas suffisant pour lui.
« Pour arriver là et en acheter, il fallait que je m’absente de mon travail, j’attends depuis le matin pour uniquement acheter deux sachets -selon lui- c’est insuffisant, avec deux enfants en comptant les parents, cela ne pourrait pas suffire, et je ne suis pas en mesure d’acheter de lait instantané, la vie est trop chère».
Le lait en sachet est un produit subventionné par l’État. Trois laiteries alimentent la capitale pour ce produit ; la laiterie Safa de Annaba, la laiterie Batouche de Rouiba et la laiterie Draa ben Khedda (Onalait) de Tizi Ouzou. Le prix du lait en sachet est réglementé par l’État pour seulement 25 DA le sachet. Mais ces derniers temps, les opérateurs et les commerçants considèrent ce prix en dehors de toutes réalités. «Nous payons le produit 24,10 DA l’unité -nous-dit un commerçant rencontré sur place- c’est très dérisoire comme marge bénéficiaire, nous le vendons uniquement pour les Zaouali (pauvres gens) ceux-là ne peuvent pas se permettre d’acheter Loya (lait liquide non-pasteurisé) à 80 DA».
La crise du lait s’est faite beaucoup ressentir après les multiples débrayages qui ont touché la laiterie de Draa ben Khadda, la seule entreprise publique activant dans le domaine, et qui alimente Tizi Ouzou, Boumerdès et Alger. Les travailleurs ne cessent de demander une amélioration des conditions de travail et une meilleure prise en charge par l’administration. Il se trouve aussi que les produits de cette laiterie sont très demandés et appréciés par les citoyens. « C’est la seule entreprise qui travaille dans les normes, le lait est riche et cela est visible de par le goût qu’il donne contrairement aux autres marques, les gens font même avec ce lait à la maison des yogourts» nous dit A’mi Tahar, un commerçant à la cité Méditerranée de Belouizdad. À 11heures, à la cité Lévier de la même banlieue toujours, un autre camion-livreur de la laiterie Battouche s’arrête devant un magasin et commence à vendre sa marchandise par lui-même.
Des files d’attente sont aussitôt formées dans un grand brouhaha. Ce phénomène est très visible sur nos rues, des livreurs en gros écoulant eux-mêmes leur marchandise. Et des citoyens qui guettaient leur arrivée d’un moment à un autre. « Les commerçants font du favoritisme, il réservent des caisses entières pour leur proches ou clients habitués de leurs magasins. Et pour quelqu’un qui arrive d’une autre cité, on ne lui donne rien. On est tous des Algériens, enfin ! » Se plaigne un citoyen rencontré sur place. Dans les longues heures d’attentes et d’incertitudes, les citoyens rejettent leur désarroi sur les autorités. Une grande partie d’entre eux désigne du doigt l’incompétence des responsables sur la gestion des laiteries. L’adoption par les députés d’un projet de loi instituant de nouveaux impôts et augmentations des taxes ne fait pas dans l’apaisement. Les citoyens redoutent que le gouvernement renonce sur le choix des subventions des produits de première nécessité. « Nchallah bark manwaluch la tes’inat (je prie Dieu pour que notre pays ne retourne pas aux années sanglantes de 1990), qu’attend le gouvernement pour bouger et réguler les choses. Il doit sanctionner les coupables et nous épargner un nouveau drame » nous dit un citoyen rencontré sur place et n’arrivant pas à contenir sa colère. Pour lui « barakat » le peuple n’en peut plus. Le même ton de colère, on le trouve chez les livreurs qui rencontrent des difficultés pour s’approvisionner de leurs commandes ordinaires en caisses de lait en sachet. « Ils nous livrent de moins en moins de caisses, l’offre est très réduite, et parfois on est contraint de rebrousser chemin sans avoir nos commandes, on est très affectés par cela » nous déclare Khaled, livreur au quartier de Belouizdad.
Ce qui est désolant, c’est que beaucoup de commerçants ont renoncé à acquérir ce produit, qui est devenu- selon eux- sources d’ennuis et de problèmes.
G.l., est l’un de ces commerçants. Il nous déclare : « c’est devenu insupportable, dés que le livreur me livre mon quota de lait en sachets, je suis envahi par les clients de toutes parts, je n’en peux plus, y’en a qui viennent acheter chaque jour, ils font des réserves ou ils achètent pour leur amis et proches » Cette situation, qui perdure depuis plus d’un mois, pousse les gens à vouloir en acquérir par tous les moyens. Des gens habitant des cités très touchées par cette pénurie, surtout à Hussein Dey, Brossette et Bachjarrah, font des navettes chaque jour dans les cités environnantes pour en acheter. Certains y vont même à Boufarik et Blida ou Boudouaou pour s’approvisionner.
Hamid Mecheri

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