Lors de la présentation de l’avant-projet fixant les règles générales de l’aviation civile, soumis, hier, à l’Assemblée nationale, le ministre des Transports, Amar Ghoul, est revenu au sujet de l’ouverture de l’espace aérien national au privé. D’emblée, il a affirmé que le gouvernement a gelé les licences d’exploitation imposées aux opérateurs désireux d’investir dans ce secteur depuis 2009. Cette déclaration aurait été mise au rebut-sachant qu’il n’a fait que ruminer des propos qu’il avait déjà tenus récemment- s’il n’a pas encore précisé que «la loi 06-98 régissant l’aviation civile, en vigueur, ouvre le marché du transport aérien aux investisseurs privés». Une brèche ouverte par le ministre qui renseigne, qu’une telle décision qui relève du gouvernement comme l’a-t-il d’ailleurs réitéré, n’est pas à même de croire à un retour sur le texte de loi en question, quant à retirer le volet de cette loi permettant aux opérateurs privés d’investir dans le marché de l’aviation civile. Ainsi, hormis la décision du gouvernement de geler l’octroi des licences d’exploitation, les articles traitant de la question restent tels quels. C’est ce qui laisse entrevoir à travers cette polémique ayant fait couler beaucoup d’encre depuis le début de l’année, que le gouvernement n’exclut pas la possibilité de faire appel aux opérateurs privés, du moins à l’avenir, pour tenter de gagner la bataille aérienne devant les compagnies étrangères qui détiennent 50% des parts de marché. D’ailleurs, Ghoul lui-même a plaidé pour la complémentarité public-privé, avant de se résigner peu à peu à cette idée, en tenant à rappeler à chaque occasion que la décision de réhabiliter les licences d’exploitation relève des prérogatives du gouvernement, seul à même de décider sur cette question compte tenu de son caractère stratégique, s’en défend Ghoul, devant les députés.
Open Sky, ce n’est pas demain la veille
Censé présenter l’avant-projet de loi 06-98 du 27 juin 1989, portant notamment sur la définition des règles générales régissant l’aviation civile, Amar Ghoul, a évoqué de son bon gré la question de l’ouverture de l’espace aérien aux compagnies étrangères sous la formule Open Sky. «Suite à la polémique suscitée autour de la question, je tiens à préciser que l’Open Sky est à distinguer de l’ouverture du marché au privé. Beaucoup ont tendance à confondre les deux sujets, or les deux sont différents», a-t-il indiqué. Pour lui, l’ouverture du ciel national aux compagnies étrangères va à l’encontre des intérêts du pays, a-t-il indiqué avant de trancher que l’Algérie n’est pas prête à adhérer à l’Open Sky qui libère totalement le ciel aux compagnies aériennes internationales, en ajoutant que les conditions actuelles ne le permettent pas. «Si nous précipitons l’adhésion, cela va porter préjudice aux compagnies nationales Air Algérie et Tassili Airlines», a avoué le ministre. En effet, à défaut d’aller conquérir le marché mondial, l’Algérie a opté pour une stratégie plus rentable, orientée vers le marché africain. Cette option se justifie selon Ghoul par plusieurs paramètres qui laissent supposer une telle vision, en appuyant son argument par des chiffres, tel que le nombre de passagers enregistrés annuellement en Algérie, qui s’élève à 11 millions, la classant ainsi en deuxième position en Afrique.
Indemnisation des passagers
C’est dans cette vision que s’inscrit justement la nouvelle politique du secteur. La révision et l’amendement de la loi en vigueur, soumise à l’APN, est axée sur trois volets. Elle vise l’adaptation du système aérien aux mutations que connaît le secteur ces dernières années, telles qu’elles sont dictées par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI), la Consolidation de la sûreté et la sécurité aériennes et la consécration des droits aux personnes handicapées et à mobilité réduite. Des dispositions nouvelles et correctives qui visent, en somme, l’amélioration des services offerts par les compagnies nationales aux profits des passagers au niveau des aéroports et lors des vols, la révision des tarifs de vol qui devront être fixés selon les lois de la concurrence en conformité avec les accords internationaux signés par l’Algérie. Ainsi, ce projet de loi vient après les vives critiques essuyées par la compagnie nationale qui traverse une crise depuis ces derniers mois. Entre mouvements de grèves, retards de vols, médiocrité des services… les maux continuent d’altérer l’image d’Air Algérie. D’ailleurs, lors des débats ayant suivi la présentation de l’avant-projet, nombre de députés ont rappelé l’importance d’apporter aux amendements de cette loi, de correctifs à même de palier aux carences constatées dans le secteur. Certains estiment même qu’elles constituent une «honte» qui entache l’image de la compagnie nationale et les aéroports qui ne sont que la vitrine du pays. À la faveur de cette révision, Amar Ghoul, tient à préciser que sa loi devra garantir des indemnisations aux passagers pour tout retard de vol ou son annulation, et tout désagrément technique portant atteinte à la quiétude des clients des compagnies nationales aériennes. Ce projet de loi prévoit également d’apporter une assistance sur le plans technique et sur celui de l’information aux passagers. Le nouveau texte apportera également des améliorations techniques telles que la limitation des nuisances sonores et les désagréments liés à l’émission de gaz des avions, en procédant à un contrôle régulier des appareils de vol des compagnies nationales.
Farid Guellil