Accueil ACTUALITÉ Belkacem Mellah au « Courrier d’Algérie : «après 20 ans, le RND a...

Belkacem Mellah au « Courrier d’Algérie : «après 20 ans, le RND a besoin d’alternance»

0

Dans l’entretien qui suit, Belkacem Mellah, candidat au poste de secrétaire général du Rassemblement national démocratique (RND), s’est livré au Courrier d’Algérie. L’unique concurrent direct de l’actuel chef par intérim du parti, Ahmed Ouyahia, a expliqué les raisons qui l’ont poussé à prétendre aux commandes du parti, en prévision des élections prévues lors du congrès électif de début mai prochain.

Cet ex-chargé de communication auprès du Premier ministre plaide pour l’enclenchement d’un «véritable» processus d’alternance au sein du RND. Selon notre interlocuteur, cela passe par le renouvellement de toutes les instances dirigeantes du parti par la voie des urnes. Mellah estime que, après 20 ans d’existence sur l’échiquier politique national, le RND doit laisser émerger la relève. Autrement dit, les vieux caciques doivent passer le flambeau aux jeunes. L’ex-secrétaire d’État chargé de la jeunesse a évoqué également les tensions prévalant entre les leaders du RND avec son homologue du FLN.

Le Courrier d’Algérie : – Vous vous êtes porté candidat à l’élection d’un nouveau SG du RND à l’occasion du congrès extraordinaire prochain. Qu’est-ce qui a motivé votre décision ?
Belkacem Mellah : – Premièrement, je tiens à rappeler que j’ai annoncé ma candidature au poste de SG lors de la 5e session ordinaire du parti, tenue en fin janvier dernier. Au parti, des pratiques antidémocratiques qui font fi aux statuts du parti sont enclines à s’ériger en règle de fonctionnement. Ces dérives sont visibles à travers cette tendance qui consiste à désigner les responsables au lieu qu’ils soient élus.
Ce sont ces raisons qui m’ont poussé à s’investir dans cette course électorale. Je voudrais mettre fin à ce système caduc et sa substitution par l’organisation d’élections à même de faire de l’urne un moyen pour le choix des responsables à la tête des instances du parti. Du premier responsable du parti jusqu’aux subalternes qui dirigent les sections de wilayas. Si je me suis porté candidat, c’est justement pour casser le diktat de certains coordinateurs qui ont de tout temps appelé au plébiscite des responsables. Pour dire vrai, ces derniers recourent à cette pratique pour garder leurs postes et espérer figurer en tête de liste, lors des joutes électorales. C’est leur unique ambition.

– Quand bien même, désormais, le principe de l’alternance démocratique soit consacré au sein du RND. Mais, l’on n’a pas vu les candidats se bousculer au portillon. Selon vous, pourquoi?
– C’est vrai, il n’y a que moi et Ouyahia qui sommes engagés dans la course. Je pense que la raison est à chercher auprès des anciens cadres du parti qui ne veulent toujours pas se défaire des pratiques archaïques (évoquées en haut, ndlr). Ils appellent au plébiscite de l’actuel SG par intérim, au lieu de laisser parler les urnes pour se mettre en phase avec l’exercice du jeu démocratique. Il va sans dire que cette situation profite à certains coordinateurs de wilaya qui font recours au moyen de cooptation pour plaire du chef (Ouyahia, ndlr) dans l’objectif de se maintenir en poste, et dans l’espoir d’en convoiter des hautes fonctions de responsabilité. Cela étant dit, me concernant, donc, et au risque de le répéter, je me suis présenté en lice pour changer ces mauvaises intentions qui font office de mode de fonctionnement dans le parti.

– Il n’y a pas eu non plus de postulants parmi les redresseurs du parti… malgré eux. Car, ces derniers ont affiché publiquement leur distance avec Ouyahia. Ils ont même saisi le ministère de l’Intérieur pour invalider le congrès. Quel est votre commentaire ?
– Pour moi, et je me permets de le dire, d’abord ce ne sont pas des redresseurs. Ils sont des militants, des hauts cadres issus des structures du parti et d’ex-parlementaires. Il y a aussi des membres fondateurs parmi ce groupe. Ils ont un point de vue différent à défendre. Certes, ils sont libres d’exprimer leur avis, mais je ne m’inscris pas dans cette démarche, et encore moins marcher avec eux. Je suis un militant discipliné qui se conforme aux décisions de la majorité et de sa direction dirigeante. Pour ce qui est du nombre de candidatures, j’aurai aimé qu’il y ait plusieurs prétendants à la tête du RND. J’aurai aimé aussi voir des femmes postuler à cette élection, à même d’aller vers une démocratisation plus vaste et plus accomplie au sein du parti. Même Ouyahia est de cet avis. Lui-même avait appelé à l’application de l’article 21 des statuts en rapport avec l’ouverture d’une liste libre aux militants désireux d’investir leurs candidatures. Or, certains parmi les coordinateurs, que je qualifie plutôt de fonctionnaires politiques et de carriéristes, veulent être plus royalistes que le roi.

– Les remous et le charivari prévalant au RND dénotent du malaise qui le ronge de l’intérieur. Des congressistes cooptés, des cadres mécontents qui dénoncent des dérives… vous accusez, vous-même, les coordinateurs de partialité. Ne voyez-vous pas qu’il y a, là, crise ?
– Ce n’est pas un fait nouveau au RND. La crise ne date pas d’aujourd’hui. Le malaise remonte au moins à 2002, lorsque les fonctionnaires politiques ont eu main basse sur les instances organiques du parti. Cette forme de clientélisme politique a eu raison du rôle initial qui échoit au militant, celui de militer pour les idéaux du parti, loin de toute considération étroite. Une raison par laquelle, d’ailleurs, cette course pour les intérêts personnels cause chaque année des dégâts au parti, au détriment de l’émergence des militants sincères et engagés. C’est pour cela que j’insiste sur l’importance de changer ces pratiques d’un autre âge. Si l’on veut aller vers une véritable démocratie à l’intérieur du parti, on doit privilégier la voie des urnes, et éviter toute cooptation des responsables à la tête des instances du parti. Eux, ils ne connaissent que les postes de responsabilité, point de militantisme.

– Vous maintenez toujours votre candidature, en dépit du fait que des coordinateurs -vous le dites-appellent au plébiscite d’Ouyahia. À croire que les dés sont pipés… n’est-ce pas ?
– Certes, les coordinateurs travaillent avec les fonctionnaires politiques. Mais, à côté, il y a les vrais militants qui sont engagés, cœur et âme, pour le parti. Cela étant dit, je dois dire que concernant ma candidature, je ne me suis pas fixé jusqu’à l’heure actuelle. Autrement dit, il me semble qu’il est encore tôt pour dire que le sort du prochain SG du RND soit définitivement scellé, eu égard aux développements en cours avant la tenue du congrès extraordinaire. Car, il est bon de savoir que ce sont les mêmes personnes qui appellent, aujourd’hui, au plébiscite d’Ouyahia à la tête du parti, qui demandaient, auparavant, son départ. Ces personnes prêchent le chaud et le froid, pour dire, justement, que rien n’est perdu pour le moment. Pour toutes ces raisons, j’en appelle à Ouyahia à prendre des décisions concernant ce genre d’attitudes et de comportements indécents. Je l’invite plutôt à écouter la voie de la base émanant des militants.

– Pouvait-on comprendre qu’Ouyahia a laissé faire en quelque sorte devant ces dérives ? Sachant, après tout, que cette tendance lui sied plutôt bien…
– Non, Ouyahia est loin de tout ça. Ces personnes veulent qu’il y ait désignation des responsables. Ils sont contre le vote de par leur statut de fonctionnaires de premier ordre. Les exemples en matière de ces dérives menées autour de la désignation, à titre d’exemple, des congressistes y sont légion. Il y a eu plusieurs cas avérés au niveau des wilayas. Bien entendu, ce fait n’est pas généralisé partout à travers le pays, heureusement. Car, les militants sincères n’acceptent pas ce genre de pratiques. Certains de ces coordinateurs ramènent des amis et proches de leur entourage immédiat pour les placer congressistes, si peu que ces derniers puissent voter en faveur d’Ouyahia. C’est contre la morale politique. Le SG par intérim a pourtant été clair à ce sujet. Il faut aller vers les urnes.

– Que voudriez-vous changer au RND?
– Selon le programme que j’ai déjà exposé lors de la session du conseil national du parti en fin janvier, le changement porte sur le lancement d’un processus d’élections qu’il faudra mener au niveau de toutes les instances du RND. J’ai proposé en premier lieu que le mandat de SG soit renouvelable deux fois uniquement. Même topo pour ce qui est des membres du Bureau politique qui aura un mandat d’une année seulement. Quant à la composante du Conseil national, j’ai proposé à ce qu’elle soit élue par l’instance suprême du parti, le congrès, notamment. J’ai comme intention également, toujours selon mon programme, de faire en sorte que les responsables à la tête des sections des wilayas soient élus par les militants de base. C’est ce qui permettra justement l’émergence des jeunes adeptes du parti à même de garantir la relève dans l’avenir. Sur un autre volet, j’ai proposé d’assurer une formation continue aux jeunes militants, comme faut-il également mener un travail de proximité sur le terrain pour mieux redéployer le parti. Pas seulement, je refuse aussi le fait que les décisions du RND soient centralisées, dès lors qu’elles sont, jusque-là, l’apanage du secrétariat général. Avant toute décision, aussi importante soit-elle, celle-ci doit passer par le Bureau politique et le Conseil national si besoin est.

– Ouyahia en décide-t-il de manière unilatérale ?
– Pas seulement Ouyahia. Avant lui, les décisions sont prises exclusivement par un cercle restreint composé par certaines personnes…

– Revenons à votre candidature. Pensez-vous pouvoir rivaliser avec l’homme fort du RND, dans ces conditions? Ceci, à plus forte raison que votre campagne électorale était des plus timides…
– Il est vrai que la majorité des coordinateurs ont été désignés par Ouyahia lui-même. Pour ne pas dire qu’ils sont donc ses proches partisans. Cela étant dit, sachez que ces mêmes responsables n’œuvrent pas pour ses beaux yeux. Ils ne l’aiment pas forcément. Ils veulent seulement garder leurs postes et leurs places au sein du parti. Pour ce qui est de mon positionnement, c’est vrai aussi que je suis le maillon faible dans cette course. Mais, je suis optimiste et tant que je suis en course je le demeurerais. Ceci, d’autant plus que ce sont les urnes qui vont décider des résultats en fin de compte. Et comme tout le monde le sait, lors des élections, il y a toujours des surprises. À ce titre, faut-il souligner que j’ai déjà gagné une victoire, la première, présentement. Celle notamment d’avoir réussi à imposer le passage du vote du SG du RND par les urnes. Pour ce qui est de ma campagne électorale, au contraire, j’ai sillonné 25 wilayas en l’espace de 2 mois seulement. D’ici la fin du mois, je compte encore animer des meetings et des rencontres au niveau d’au moins 5 autres. Et puis, j’ai des soutiens émanant de militants, de cadres du parti, ainsi que d’anciens responsables et autres ex-ministres. Je suis un candidat au même titre qu’Ouyahia. Je l’estime et je le respecte beaucoup. Je le reconnais en tant que membre fondateur du RND. Mais, en tant que rival politique, je dois dire les choses clairement. Après 20 ans d’existence, le parti a besoin d’une alternance et d’une nouvelle tête à ses commandes.

– Une dernière question sur le conflit RND-FLN. Entre Ouyahia et Saâdani, les rapports se raidissent lorsqu’encore ils sont mal-en-point. Pensez-vous que votre parti a bien fait d’avoir refuser la démarche du FLN ?
– Écoutez, le FLN et le RND sont deux faces d’une même médaille. On peut assimiler ce rapport à la relation de tutorat entre le père et le fils. Ce sont les deux partis du système, du pouvoir et qui sont au pouvoir. Ils soutiennent tous les deux le président de la République. Je ne pense pas dès lors qu’il y ait de vrais problèmes entre les deux, si ce n’est des considérations électoralistes. En effet, la rivalité réside dans la course aux prochaines législatives de 2017, du moins, pour le moment. Maintenant, s’agissant des attaques de Saâdani contre son alter ego, pour moi, Ouyahia est un homme d’État qui doit être respecté comme tel.

Entretien réalisé par Farid Guellil

Article précédentDjazagro-2016 ouvre ses portes : un tremplin pour lancer le produit algérien
Article suivantAlors que le déblocage de la licence d’importaiton de véhicules est prévu sous quinzaine : un plafond en valeur imposé au concessionnaire