Accueil ACTUALITÉ APRÈS LA PRÉSIDENTIELLE : Vers une nouvelle reconfiguration politique

APRÈS LA PRÉSIDENTIELLE : Vers une nouvelle reconfiguration politique

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L’élection de Abdelmadjid Tebboune, à la tête de l’État algérien, à l’issue de la présidentielle de jeudi passé, a déjà fait ses premières victimes au sein de ses quatre concurrents.

Déçus suite à leur débâcle au cours de cette course électorale, les candidats malheureux, Ali Benflis et Abdelkader Bengrina, ont décidé d’abandonner la direction de leurs partis respectifs, Talaïe El Hourriet et El Binaa El Watani. Si le départ de Benflis, qui a essuyé sa troisième défaite à la magistrature suprême, est officiel, celui de Bengrina, doit, en revanche, attendre l’aval du conseil national de son parti.
«  En ce qui me concerne, j’ai mis un terme à mon parcours politique pour laisser la chance aux jeunes », a annoncé l’ancien SG du FLN, arrivé en 3é position lors de ce scrutin avec 10,55% des suffrages exprimés, qui n’a semble-t-il pas pu digérer cette nouvelle défaite, qui s’ajoute ainsi à son « palmarès » d’échecs après sa double déroute de 2004 et 2014. «Je contemplerai et j’utiliserai ma plume », a ajouté celui qui a qualifié l’entrée surprise en course de Tebboune d’un « cinquième mandat ».
Acteur des plus en vue du mouvement populaire dans ses premières semaines, avant de se jeter dans les bras de la feuille de route du chef d’état-major de l’ANP Ahmed Gaïd Salah, le président du parti des Avant-gardes des libertés, a signé de ses propres mains son certificat de décès et son parti avec. Benflis qui a vainement tenté de défendre son choix de participer au scrutin contesté, s’est résigné, la mort dans l’âme, à se retirer, sans trop faire de bruit, juste la queue entre les pattes. L’ex-chef du gouvernement sous Abdelaziz Bouteflika, et son parti devraient payer les frais de leurs visions étroites et de sa démarcation de la protesta, qui fait qu’aujourd’hui, on devrait assister à une nouvelle reconfiguration politique, ou ceux qui se sont hissés contre la volonté populaire sont condamnés à disparaitre.
Quant au président du parti islamiste, Bengrina, classé 2e, avec 17,38% des voix exprimées, qui apparemment a bénéficié d’un fort soutien de la mouvance islamiste, notamment les anciens du parti dessous, le Front islamiste du salut (FIS), et des militants du Mouvement de la Société pour la Paix (MSP) de Abderrezak Makri, et le Front pour la Justice et le Développement (FJD) de Abdallah Djaballah. Officiellement ces deux partis islamistes cités n’avaient soutenu aucun des candidats qui étaient en lice, mais leurs militants ne peuvent s’inscrire en dehors d’un autre courant autre que celui d’un parti frère idéologiquement.
Abdelkader Bengrina, qui peut se vanter de l’honorable place arrachée, a déclaré devant les journalistes, qu’il reste au service du pays, ce qui est traduit par de nombreux observateurs comme un prélude à sa participation au futur gouvernement que compte former le nouveau locataire du palais d’El Mouradia.

Autres victimes de Tebboune et du mouvement citoyen
Présentés jadis comme les deux grandes forces politiques du pays, avec un inépuisable réservoir de militants, le tandem FLN-RND, n’a pas été de secours pour leur « poulain » le SG par intérim du RND, Azeddine Mihoubi, qui n’a finalement récolté que 7.26% de l’ensemble des suffrages exprimés, soit 4é du podium, qui n’honore guère les deux partis déjà cités. D’emblée il est à se demander où sont passés tous ces militants, opportunistes pour la majorité, qui soit-disant, peuplaient, des années durant, ces deux appareils du pouvoir. Ont-ils déserté les rangs de ces deux partis suite au mouvement populaire ? Ou juste que ces deux partis apparaissent aujourd’hui à leur vraie nature, qui visiblement, était de tout temps comme des coquilles vides, sans aucun réel ancrage populaire, mais juste une sorte de puissance fictive et imaginaire?
L’ancien parti unique relégué, par la force des choses, au statut de simple spectateur, après avoir longtemps tergiversé sur la position à adopter face au scrutin, a finalement décidé de jeter son dévolu sur l’ancien ministre de la Culture, Azeddine Mihoubi. Pourtant des rumeurs insistantes avaient déjà circulé pour un éventuel appui de l’actuel Président Tebboune, étant un enfant du parti depuis de longue date. Pourquoi donc le parti FLN a lâché un des siens pour soutenir un candidat concurrent ? C’est que dans les mœurs politiques «made in algéria», ce n’est pas des convictions politiques que naissent les soutiens, mais des orientations et autres interférences. C’est ainsi que ce parti, orphelin depuis l’incarcération de ses chefs, a été induit en erreur par les rumeurs faisant état d’un soutien en haut lieu au profit de Mihoubi. L’opportunisme ne paie pas toujours.
Dans un communiqué, le SG par intérim du parti FLN, Ali Seddiki, dont la photo du site officiel du parti, a été vite lorgnée de celle du vainqueur Tebboune, en « arrachant » celle de Mihoubi, s’est précipité de le féliciter, pour son intronisation à la majorité écrasante à la tête de l’État, lui souhaitant un prompt succès dans son entreprise de redressement du pays.
«Nous souhaitons travailler avec le nouveau Président, conjuguer les efforts et relever les défis, pour sortir le pays de la crise » a encore déclaré M. Seddiki, dont la tenue du congrès du parti a été fixée à l’après-élection, qui devrait, donc, intervenir dans les prochains jours ou semaines.
Ainsi l’échec de ces deux partis politiques à porter leur mentor aux destinées du pays renseigne, à plus d’un titre, la fin d’une époque, et la naissance d’une nouvelle ère.

Une nouvelle classe politique en vue
L’échiquier politique algérien connaîtra inévitablement, une nouvelle reconfiguration politique, qui sera marquée par la disparition de certains partis, qui seront vidés de leurs substances, pour en garder que les sigles, à l’image du FLN, RND,  MPA de Amara Ben Younès, et le TAJ de Amar Ghoul, pour laisser le terrain à de nouvelles forces émergentes du mouvement populaire, et de ceux qui l’ont soutenu, en rupture avec les pratiques du passé et l’édification d’un vrai État de droit.
Le pouvoir a réussi, certes, à faire passer l’élection présidentielle, et une offre de dialogue a été déjà émise par le nouveau Président en direction du mouvement citoyen, qui garde intacte sa mobilisation. Ce dernier doit se projeter dans l’avenir, mais avec des préalables. Car s’il maintient intacte sa mobilisation, c’est en raison de ce SMIG collectif qui fait consensus, contre un « ennemi commun », qui a donné naissance à l’unité du moment, mais des blocs idéologiques et politiques apparaitront, tôt au tard, pour mener le combat en rangs dispersés. Le mouvement populaire dans son état actuel est un magma de tendances idéologiques diamétralement opposées.
Le mouvement populaire en route depuis plus de neuf (9) mois, doit jouer sa carte de puissant du moment, pour arracher le maximum d’acquis auprès du nouveau Président, avant que le vent de la division ne souffle sur lui. Le pragmatisme politique c’est de négocier quand on est en position de force, en s’appuyant sur des personnalités connues pour leur intégrité et expérience sur le terrain pour mener le dialogue.
Reste à savoir quel est le sort qui sera réservé à la main tendue du président fraîchement élu, Abdelmadjid Tebboune, pour un dialogue inclusif et consensuel, ou le mouvement populaire est invité à s’assoir autour de la même table pour désamorcer la crise actuelle.
Brahim Oubellil

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