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Turquie : Erdogan fait fausse route

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Après la victoire de son parti islamo-conservateur, l’AKP, aux législatives, le président turc a choisi le chemin de l’autoritarisme et des divisions. Qu’allait-il faire de sa victoire ? Recep Tayyip Erdogan avait le choix, le 2 novembre dernier, alors que l’AKP, son parti islamo-conservateur, retrouvait la majorité absolue au Parlement turc (316 sièges sur 550). Allait-il choisir l’apaisement ? Décider de réconcilier les Turcs avec eux-mêmes, d’apaiser les tensions qu’il avait volontairement suscitées entre laïques et religieux, Turcs kurdes et nonn kurdes, entre sunnites et alévis (une minorité proche des Alaouites) ? Allait-il, au contraire, faire preuve d’un autoritarisme accru et décider de mettre au pas les récalcitrants à son système ? Erdogan a choisi le second scénario. Presse, partis d’opposition, justice, Kurdes et sympathisants de Fethullah Gülen (un intellectuel musulman chef d’une puissante confrérie, réfugié aux États-Unis) sont plus que jamais dans sa ligne de mire. Dès le 3 novembre, un tribunal d’Istanbul inculpait et écrouait pour «tentative de coup d’État» les deux responsables d’un magazine d’opposition, Nokta. Ils avaient osé titrer «Le début de la guerre civile», à la une de leur journal, au lendemain de la victoire de l’AKP.

Ce même 3 novembre, oublieux des dix-huit mois de négociations arrêtées unilatéralement au printemps dernier, Erdogan relançait la guerre contre les combattants kurdes du PKK (Parti des travailleurs du Kurdistan). Dans le sud du pays, l’armée a bombardé les camps du mouvement autonomiste, jusqu’au nord de l’Irak. Puis, le 5 novembre, le chef de l’État a annoncé officiellement qu’il poursuivait la lutte contre les rebelles kurdes et leur proposait de rendre les armes ou d’être liquidés.

Politique autoritaire
Pourquoi Erdogan joue-t-il avec le feu ? On peut avancer plusieurs explications. La première est qu’après vingt ans de pouvoir, comme maire d’Istanbul, puis comme Premier ministre et fondateur du parti le plus populaire du pays, son penchant naturel à l’autoritarisme s’est accru. « Le pouvoir rend fou », dit l’adage. Celui qui a apporté la stabilité à la Turquie et a doublé le niveau de vie de la classe moyenne en quinze ans veut aujourd’hui faire de son pays le modèle d’un État musulman, conservateur, qui suit sa propre voie de développement, et non celle de l’Occident.
La deuxième raison : il constate que la stratégie de la tension pour diviser le pays entre Turcs kurdes et non kurdes a été payante, lors des législatives. Sa politique a relancé les violences dans le pays, mais elle a aussi incité la classe moyenne, y compris des Kurdes, à voter en faveur de l’AKP, de peur d’un retour à la guerre civile des années 90. La troisième raison : Erdogan prend le pari que les Occidentaux fermeront les yeux sur sa politique autoritaire. Certes, Washington, son allié traditionnel, se dit « préoccupé » par la politique suivie à Ankara, mais les Américains et encore plus les Européens ont un besoin crucial de ménager la Turquie, qui abrite 2 millions de réfugiés syriens. Ils ne veulent pas les voir rejoindre en masse l’Europe. L’ONU prévoit déjà que 600 000 réfugiés arriveront en Croatie, en Grèce, en Serbie… via la Turquie dans les prochains mois, alors que 750 000 personnes y sont déjà entrées début novembre.

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