En chemises blanche et foulards rouges, les scouts d’Irak, bannis des instances internationales dans les années 1990, sont de retour: 200 d’entre eux se sont récemment rassemblés dans un lieu symbolique, Mossoul, qui fut durant trois ans l’une des «capitales» du groupe Etat islamique (EI).
Originaires de quasiment toutes les provinces d’Irak, plus de 200 chefs et cheftaines ont pris part à ce rassemblement, organisé dans la cité septentrionale largement ravagée par des années d’occupation jihadiste et neuf mois de combats urbains pour en chasser les combattants de l’EI. «C’est le premier rassemblement reconnu au niveau arabe et international», se félicite Mohammad Ibrahim, 40 ans, responsable local de l’Education en charge des activités des scouts à Mossoul. Avec cet événement, «nous envoyons un message à l’Irak et au monde entier: les scouts de Mossoul et d’Irak sont de retour après une longue absence», dit-il encore à l’AFP. Installé au coeur d’une zone boisée prisée par les familles les jours de repos, le camp scout de Mossoul, qui abrite la rencontre, est le troisième plus grand du monde arabe selon les Irakiens. L’Irak a été l’un des premiers pays arabes à rejoindre le mouvement du scoutisme mondial en 1914 alors qu’il faisait encore partie de l’Empire ottoman. Mais le mouvement a ensuite subi le contrecoup de la politique de Saddam Hussein. En 1999, après l’invasion irakienne du Koweït et l’embargo imposé par la communauté internationale, le pays a été exclu de l’Organisation mondiale du mouvement scout. Les scouts irakiens ont toutefois continué leurs activités. L’Irak n’a finalement été accepté de nouveau au sein du scoutisme international qu’en 2017.
Le mouvement compte aujourd’hui 25 000 membres, hommes et femmes, à travers le pays.
«Prêter main-forte»
Autour de M. Ibrahim, des haut-parleurs crachent à plein volume hymnes nationalistes et chansons populaires, alors que des enfants des écoles des environs paradent dans un défilé en habit traditionnel irakien. Pour Qassima Mohsen, cheftaine scoute de 42 ans, ce séjour à Mossoul, à près de 800 kilomètres de sa province méridionale de Zi Qar, a autant une portée symbolique que personnelle. Au début des années 2000, elle venait régulièrement dans le camp scout de Mossoul pour des rassemblements. «A l’époque, nous avions monté des murs et peint des bâtiments», se rappelle-t-elle. Plus de quinze ans plus tard, après l’invasion dirigée par les Etats-Unis en 2003, la chute du régime de Saddam Hussein, des violences confessionnelles, l’occupation par les jihadistes de près d’un tiers du pays puis une reprise en main du territoire par les troupes irakiennes, elle est de retour dans le Nord. Cette fois-ci encore, il s’agit de construire un abri aux activités des jeunes scouts des environs. Car si elle est venue, dit-elle, c’est pour «aider à reconstruire le camp scout en apportant comme nous le pouvons notre soutien financier et moral». En plus, les chefs et cheftaines de tout l’Irak ont pu échanger, rapporte-t-elle. «Nos rencontres ont été très fortes: nous avons discuté de projets à venir et surtout nous avons recommencé à parler avec les scouts de Mossoul avec lesquels nous avions perdu tout contact pendant trois années» durant lesquelles l’EI imposait sa loi dans la ville et sa région. Maintenant que le contact est rétabli, il va falloir poursuivre les efforts, renchérit Ali Latif, chef scout de 34 ans, venu de Kirkouk, province multi-ethnique au nord de Bagdad. «Nous allons organiser des camps à Mossoul pour prêter main-forte à la reconstruction», assure-t-il. «J’espère vraiment que tous ensemble nous pourrons rendre à Mossoul son visage d’avant».