Le gouvernement, fort de ses relais, aura toujours la possibilité de tenter de doper ou de freiner l’activité en fonction de la conjoncture. Mais sur la base de quelle tendance de long terme ? Là, c’est le progrès technique qui est déterminant : l’économie algérienne sera-t-elle suffisamment innovante pour s’assurer une efficacité croissante ?
L’Algérie est encore loin du modèle d’économie de la connaissance basée sur l’innovation. Comme de nombreux pays de la région, son économie reste basée sur les hydrocarbures, qui représentent un tiers du PIB et 95% des exportations. Cette situation, que beaucoup lui enviaient, la rendait pourtant particulièrement vulnérable aux fluctuations du cours de pétrole et ralentissait le développement d’autres secteurs. Face à la crise née du choc pétrolier, la diversification de l’économie était devenue ainsi le principal défi pour l’Algérie afin de générer de nouveaux relais de croissance et de faire face à une demande interne de plus en plus forte.
Depuis le passage d’une économie dirigée à une économie de marché, l’Algérie a misé sur le développement d’un tissu de Petites et Moyennes entreprises (PME), en mettant en place des dispositifs juridiques et financiers particulièrement incitatifs.
Le rythme de création d’entreprises a fortement augmenté : plus de 80% des entreprises actuellement recensées en Algérie ont moins de dix ans. De plus, le rythme annuel de création reste très soutenu, avec un taux de croissance à deux chiffres sur la période 2009-2017. Sur ces entreprises nouvellement créées, 90% sont actives sur le secteur tertiaire (dont la moitié pour des activités de commerce). Malgré une forte volonté de développer l’industrie et de favoriser la production nationale, le secteur industriel ne représente que 10% des créations d’entreprises, et reste relativement délaissé et peu compétitif face aux produits d’importation.
Après ces quelques années de croissance soutenue, les PME représentent aujourd’hui plus de 95% du tissu d’entreprises à l’échelle nationale, et sont à l’origine de la moitié des richesses générées par le secteur privé (hors hydrocarbures). La marge de progression reste pourtant très importante, puisque l’Algérie compte une moyenne de 30 PME pour 1000 habitants (contre 50 à 100 PME pour 1000 habitants dans les pays de l’OCDE). Selon le recensement économique de 2016, il existe plus d’un million de PME en Algérie, dont 98% sont des structures privées.
De l’urgence d’un système politique inventif et audacieux
La réforme qui rend performant le système de production algérien dans un standard moyen d’ouverture au marché mondial est une nécessité vitale pour le pays. C’est bien sûr le plus dur à mettre en œuvre car il suggère une sortie du contre-choc subi depuis la chute des prix du pétrole par le haut. Le temps est venu pour le pays de profiter de la conjoncture pour ne plus dépendre que des exportations des hydrocarbures dans son modèle de croissance. Tous les officiels algériens parlent de l’importance de réorienter l’économie sur de nouvelles bases à l’effet de générer d’autres sources de croissance. Cependant les changements successifs des politiques n’ont pas vraiment drainé une refonte profonde du modèle économique pour sortir du modèle qui consiste à faire de la surtaxation et de l’austérité ses seules bouées de sauvetage.
Zacharie S Loutari