C’est aujourd’hui que s’ouvrira, à Alger, la conférence nationale sur le commerce extérieur. Organisée par le ministère du secteur, elle s’étalera jusqu’à demain mardi. Lors des débats de cette rencontre, il sera question de lancer une réflexion, et d’envisager une esquisse autour de ce qui donnera naissance à «une nouvelle politique de commerce extérieur». Les initiateurs tiennent à ce que cette politique soit «plus équilibrée et plus adaptée aux spécificités nationales, et aux mutations économiques et financières mondiales», comme l’a-t-il communiqué dans son site web le département que dirige Amara Benyounès. Cette conférence intervient dans un contexte économique délétère, lié à la fluctuation des marchés pétroliers, dont la crise financière y ayant découlé, sévit depuis juin 2014. D’où, justement, la nécessité d’une telle initiative, lorsque l’on sait que parmi les mesures annoncées pour faire face à cette crise, il a été question d’agir sur ce secteur stratégique, dans la mesure où il représente une inconnue qu’il conviendrait de déterminer pour résoudre l’équation.
En effet, lors du dernier Conseil des ministres restreint, tenu en décembre dernier, le chef de l’État, Abdelaziz Bouteflika, a décrété un plan d’austérité qui consiste en un ensemble de mesures visant à adapter la gestion économique et budgétaire au contexte de la chute des prix pétroliers, à la maîtrise des coûts d’investissement, mais surtout à réduire la facture d’importation, et, en même temps, booster la machine productive nationale hors hydrocarbures. Et principalement, donc, le secteur du commerce est appelé à réagir, et d’une manière prompte à cet impératif. C’est dans cette démarche que s’inscrit cette conférence qui devra, logiquement, traiter conjointement du volet «importation» et celui des «exportations», lesquels, faut-il le souligner, sont inversement proportionnels. Car, du point de vue économique, plus la courbe de la facture de l’import grimpe, plus celle du volume de l’export se décroit. Donc, il en ressort que le secteur devra opérer sur deux fronts, qu’il conviendrait d’appeler interne et externe. Primo, il faudrait envisager des solutions qui pourraient inciter à réduire, du moins d’une manière progressive, la facture de l’importation qui s’était établie à 60 milliards de dollars en 2014. Secundo, il s’agit de relever un autre défi qui n’est pas moins important d’ailleurs, et qui consiste à relancer la production nationale pour répondre aux besoins domestiques, d’un côté, et dégager un surplus productif qui sera orienté vers le marché extérieur, de l’autre. Pour ce dernier, il représente, par ricochet, le moyen le plus sûr à même de freiner le recours à l’importation pour couvrir les besoins nationaux. Pour peu que le produit fabriqué localement soit compétitif et adapté à celui du marché extérieur (standards de qualité).
Exportation : l’écueil
Sur ce, Amara Benyounès semble en être conscient de la difficulté de la mission qui l’attend. En effet, il avait affirmé récemment que «le seul moyen de réduire l’importation est de créer la valeur ajoutée, à travers une production intensive et qualitative». Revenant au marché extérieur. Là, encore, faut-il noter que le producteur algérien est soumis à une «bureaucratie mécaniste», lorsqu’il s’agit d’exporter son excédent productif vers l’extérieur. À ce titre, sur un potentiel de 350 entreprises disposant de capacités d’exportation de leurs produits respectifs, 200 se plaignent de procédures administratives contraignantes qu’ils jugent très formalisées, et peu encourageantes de l’acte d’exportation, quand bien même rentable à l’économie nationale. Ces désagréments incombent, selon les exportateurs à l’Algex (Agence nationale de promotion du commerce extérieur). En effet, d’aucuns estiment que cette agence censée lever les contraintes et faciliter les procédures pour la passation des transactions ne dispose pas d’un statut qui lui permettrait d’accompagner les opérateurs du marché extérieur.
Intervenu la semaine dernière sur les ondes de la Chaïne III de la Radio nationale, le président de l’Anexal (Association nationale des exportateurs algériens), Ali Bey-Nasri, estime que l’économie nationale continue de «marcher au profit exclusif des importateurs», avant de plaider pour une optique s’inscrivant dans l’optimisation des exportations, soutient-il. Si l’on tient compte de la quintessence de cette conférence, il en ressort que les objectifs attendus des résolutions, qui marqueront la fin de ses travaux, ne s’opposent pas à ceux attendus par les opérateurs du commerce extérieur. En effet, un projet de loi devra atterrir sur l’agenda du Parlement, durant la session de printemps en cours. Le texte prévoit de soumettre des licences d’importation aux opérateurs. Il s’agit, en somme, d’amendements apportés à la loi en vigueur, qui consacre la liberté du commerce, mais qui met des restrictions, quant au respect, par exemple, de la qualité du produit, de l’ordre et la sécurité publique, de l’environnement… Ceci, faut-il le souligner, viendra à conformer la législation nationale à celle régissant le commerce international.
Consommer local
Évoquant le plan local, le ministre soutient également que les citoyens doivent être invités à consommer le produit «made in Algeria».
D’ailleurs, la campagne pour la promotion du produit local est l’un des instruments sur lesquels repose la nouvelle démarche du ministre, imposée, faut-il le rappeler, par un impératif conjoncturel. Bien évidemment, s’agissant de la production, il va sans dire qu’il sera question, dans les thématiques qui seront abordées dans cette conférence, d’appeler le secteur de l’Industrie à s’associer et d’adapter sa vision à la future politique régissant le commerce extérieur, afin qu’il agisse de son côté en vue d’impulser la machine productive et constituer «une offre exportable diversifiée et de qualité», selon une source émanant du ministère du Commerce, rapportée par l’APS. Cela étant dit, le secteur commercial est essentiellement lié à celui de l’industrie, que dirige Abdessalem Bouchouareb.
Cependant, il est peu probable qu’il ne soit parmi les représentants des pouvoirs publics annoncés à cette rencontre, en plus des partenaires socio-économiques, des universitaires, des experts et des délégués d’institutions internationales, spécialisées, qui devront pour leur part intervenir dans les débats. Ainsi, il est attendu de l’industrie une réelle libéralisation de l’économie nationale, en consacrant la liberté de l’acte d’investissement et celui du commerce, par l’élimination des obstacles, la modernisation de l’outil productif…, indique le ministère du Commerce, relayé par l’APS.
L’OMC, la visée ?
Faut-il souligner que pour consolider la production, il est impératif d’associer le privé au public, dont le partenariat sera d’un rendement bénéfique dans la maximisation des opportunités à l’export, d’où un sujet qui devra être discuté à cette rencontre.
À la lumière de ce qui s’en dégage de la teneur de cette rencontre, le cadre de loi, qui devra régir le commerce extérieur, permettra aux entreprises de jouer un rôle capital et actif dans le cadre de l’intégration de l’Algérie dans les espaces économiques régionaux et mondiaux, ce qui sous-entend l’adhésion à l’Organisation mondiale du commerce (OMC), dont la question sera éminemment figurées large dans les débats de cette conférence. Si le ministre du Commerce compte bien prendre le taureau par les cornes, afin de maîtriser l’activité commerciale à l’international, lequel choix est dicté par l’impératif d’une crise financière nationale, il n’en demeure pas moins que, sur le plan externe, l’adhésion de l’Algérie à l’OMC semble être l’autre écueil qu’il conviendrait de lever.
En outre, cette conférence, qui se déroulera en séance plénière, sera suivie par l’installation de trois ateliers traitant de problématiques différentes, ayant trait à la thématique principale.
Farid Guellil