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L’ex-président du conseil consultatif du MSP, Abderrahmane Saïdi, au Forum «Courrier d’Algérie» : «La tendance au parti est au changement de la ligne politique»

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Serein, droit dans ses bottes, c’est un Abderrahmane Saïdi détendu qui était arrivé hier, au «Forum du Courrier d’Algérie» pour discourir sur l’avenir de son parti et se plier au jeu des questions-réponses. Durant toute l’heure du Forum, il a su garder une attitude assurée, sans plier aux pièges qui lui furent tendus, aussi bien sur la politique dite d’entrisme de son parti que sur ses divergences avec son actuel président de parti ou encore sur l’allégeance, réelle ou supposée, du MSP à l’Internationale des Frères musulmans.

Saïdi a littéralement tranché avec le ton volontiers belliqueux de Abderrezak Makri, pour rallier celui de son ami Boujerra Soltani ; c’est dire que la tendance participation-intégration est plus visible chez les cadres fondateurs du parti, au détriment de l’aile Makri, plus va-t-en-guerre et opposée à toute espèce de concession, malgré les scores faméliques des dernières élections, et qui ne plaident guère en sa faveur. Pour Saïdi, il faut être pragmatique en politique et cesser de faire de l’opposition pure et dure et savoir dissocier le ton belliqueux du chef de la ligne politique du parti, et qui sont, et doivent être, deux choses totalement différentes.

Flash-back sur les moments forts du Forum
Concernant les deux branches divergentes au sein du MSP, et dont on fait amplement état ces jours-ci, l’une préférant le retour à la participation au gouvernement de consensus et à la coalition présidentielle, l’autre partisane de l’opposition, d’emblée, Saïdi a réfuté cette classification : «Le soutien est une large gamme de partis qui peut englober même ceux qui ne sont pas dans le gouvernement, comme l’ANR ; de même, l’opposition est aussi une vaste gamme de partis : ceux qui font de l’opposition radicale, ceux qui prêchent l’opposition « positive » et ceux qui prônent une opposition critique ; on peut trouver dans cette opposition un type d’opposants qui refusent toute proposition venant du gouvernement. Ce n’est pas notre cas. Notre soutien et notre opposition sont générés par des situations, des élections, des contextes et des paramètres, lesquels changent au gré des époques, et à chaque situation politique un comportement politique ; nous ne sommes pas par principe soutien ou opposition politique !».
Concernant les divergences qui secouent le MSP de l’Intérieur, Saïdi dit clairement : « Les divergences concernent la ligne politique ; et là on doit faire attention à distinguer la ligne personnelle du chef de parti et la ligne politique ; souvent ces deux lignes sont enchevêtrées et indissociables, et c’est là où la chose pose problème, puisqu’en fin de compte, ce chef finit par trouver toute opposition à la ligne de conduite du parti comme une opposition à sa propre personne. C’est de là que nait la dictature, le rejet de l’autre et le refus de toute critique constructive. En principe, la ligne politique doit être un produit d’idées et de principes ; la parti ne doit pas être personnalisé, ni lui, ni sa ligne de conduite politique ».
Concernant le MSP, « il y a des idées qui sont produites à l’intérieur du parti ; aujourd’hui la tendance qui ressort des derniers rapports des bureaux de wilayas est à la participation politique, à la participation à la construction de la nation, à la cohésion sociale et à la défense des principes fondamentaux de l’Algérie ».
Et de tirer sur certains sans en avoir l’air : « Il y eu récemment une discussion sur la révision de la Constitution et certains ont dit que cela ne les concernait pas. C’est quoi cette position ? En quoi la révision de la Constitution ne vous concerne pas ? Ce n’est point là un propos politique sérieux. Vas-y, prends-y part, propose, critique, donne des alternatives, mais participe à un débat qui est sérieux, puisqu’il s’agit du plus important document de la nation. Il faut garder raison et se comporter avec les événements politiques en prenant en ligne de compte les intérêts du pays ».

Les classifications font peur à Saïdi :
«Oui, j’estime que la classification et l’étiquetage est l’argument des faibles. D’un côté comme de l’autre, on a recourt à la classification en opposant ou soutien. On dit de tel qu’il est un traitre au pays. Pourquoi ? Discutez les points positifs et les points négatifs de son propos et vous y trouverez les mérites ou les failles. On ne doit pas fermer la porte du dialogue. Je vous donne un exemple : ces jours-ci, Mme Louisa Hanoune met sur la table des propositions d’aller vers une Assemblée constituante. Or, c’est là une idée proposée par le FFS depuis 1963, et le FFS est arrivé aujourd’hui à proposer une solution consensuelle, et c’est un développement notable dans sa politique. Doit-on dans ce cas fermer la porte à un débat avec Hanoune ? Non. On doit en discuter et lui démontrer que sa proposition est dépassée, que le débat a passé outre, depuis qu’il y a eu des élections, des assemblées élues, et qu’il y a en vue des rendez-vous politiques majeurs, etc. Mais de là à l’accuser sous quelque motif que ce soit, c’est une chose dont il faut bien se garder». Le boycott des élections est devenu aujourd’hui la « bête noire» des partis politiques. Là, Saïdi donne des motifs qui peuvent étonner et faire jaser l’ensemble de la classe politique, l’opposition surtout: «Je trouve qu’il n’y a pas eu un débat sérieux et profond concernant la démission des citoyens de l’acte politique d’aller voter. Pourtant, c’est un comportement qui nous porte préjudice, à tous, à tous les partis, opposition comme soutien. Si on s’était avisé de nous réunir entre nous, on aurait peut-être trouvé que parmi les prétextes se trouvent ceux de carences au sein des partis d’abord, et que ces partis doivent se réviser, se corriger, pour espérer faire revenir le citoyen à l’urne. Cela n’a jamais été fait. »
En dehors de la concurrence partisane pour la prise de pouvoir, « il n’y a pas eu d’efforts faits pour la promotion de la vie politique, pour lui donner du sang neuf et la développer ; il n’y eu même pas un débat sérieux pour promouvoir la culture politique au sein des partis et la performance politique de ces partis. »
Alors, ou ira le MSP, politiquement? «Nous venons d’avoir en main les rapports des bureaux des 48 wilayas et je vous le dit maintenant, j’ai été surpris par la teneur de ces rapports et concernant notre base militante, qui est très avancée dans sa vision des choses et de l’avenir du parti ; il y a une tendance qui se dégage d’elle-même, je ne vous dis pas qu’elle sera décisive, mais c’est un indice, et un indice fort. Lors du Congrès de mai prochain, bien sûr, ce sera aux congressistes de décider des changements qu’ils jugeront nécessaires, mais les indices sont des indicateurs de la tendance qui sera marquante ».
Pour Saïdi, il faut faire attention aux indices de la base : « Quand je vois un chef de parti appeler aujourd’hui à la vacance du poste de président de la République, puis aller demain chanter les bienfaits du consensus politique, excusez-moi, mais là je dois prendre des médicaments pour ne pas tomber à la renverse !»
Changement de cap en vue lors du Congrès du 10 mai ? « Oui, certainement, les signes le disent clairement. Le Congrès le dira ; mais laissez-moi vous dire ce qu’est le Congrès : le congrès est là pour changer, rénover ou renforcer ce qui est déjà là. L’étape du congrès est quelque chose de très important, et elle requiert un changement. Mais tout sera entre les mains des congressistes, qui demeurent souverains en la matière. Tous les documents, les signes et les rapports des wilayas plaident pour le changement. Mais malgré cela, je ne vais pas dire que ce sera décisif : tout se jouera en congrès… »
Rendez-vous donc est pris pour les 10, 11 et 12 mai prochains. Le MSP veut se donner les outils politiques pour amorcer le virage 2019 en toute confiance.
F. O.

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