Le caractère avant-gardiste de l’œuvre d’Alloula (1939-1994) a été au centre d’une conférence, intitulée «Abdelkader Alloula vu à travers les personnages de son théâtre ou une biographie scénique d’un dramaturge», inaugurant, lundi à Oran, le colloque international dédié au regretté artiste. «Abdelkader Alloula (1939-1994) est une des figures cardinales des arts visuels en Algérie», a affirmé dans sa conférence l’universitaire d’Oran Benamar Médiène, soulignant que «La polyvalence d’Alloula le situe dans la tradition des grands dramaturges de l’antiquité à l’instar de Sophocle, Aristophane et Eschyle». Tout en rappelant qu’Alloula fut auteur, traducteur-adaptateur, scénographe et acteur, l’intervenant lors du colloque a indiqué que Alloula «se situe aux avant-gardes de Brecht à Koltes en passant par les grands classiques tels Molière et Shakespeare, ainsi que les auteurs maghrébins, le barde Abderrahmane El-Majdoub, d’Allalou à Kaki». Insistant sur le génie créatif d’Alloula, il évoquera «son audace à travailler la langue arabe, à la placer dans les discours du quotidien tout en lui donnant la puissance du jeu théâtral, à moderniser les traditions des goual et de la halqa dans la dynamique du spectacle de la scène fermée». Abordant les personnages du théâtre d’Alloula, Mediène a estimé que c’est notamment à travers ceux créés dans la trilogie «El-Ajouad, Lagoual, Lithem» que Alloula «surprend et donne à l’art de la scène une énergie magnifique». Le colloque qui coïncide avec la commémoration de la 20e année de la disparition tragique du regretté dramaturge, a été initié par l’Unité de recherche sur la culture, la communication, les langues, les littératures et les arts (UCCLLA) relevant du Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (CRASC, basé à Oran). L’importance du legs artistique d’Alloula a été également mise en exergue lors de la cérémonie d’ouverture animée par la directrice du CRASC, Nouria Remaoun-Benghabrit, le directeur de l’UCCLLA, Mohamed Daoud, le président du comité scientifique, Lakhdar Mansouri, le président du comité d’organisation, Mohamed Hireche-Baghdad et la présidente de la fondation Abdelkader Alloula, Raja Alloula, veuve du regretté dramaturge.
Dans leur note argumentaire, les organisateurs ont en substance mis l’accent sur le fait qu’«Alloula a marqué l’histoire du théâtre algérien de son empreinte indélébile», ajoutant que «dans son expérience théâtrale, il a répondu aux exigences de la construction dramaturgique en associant plusieurs formes d’expression». Alloula, ont-ils expliqué, a puisé ses diverses pièces dans le patrimoine local (El-Halqa, El-Meddah, entre autres), le but étant d’aboutir à la création d’un «genre théâtral nouveau». Il s’est également inspiré du patrimoine universel, soit en «adoptant» la distanciation brechtienne, soit en exploitant les possibilités qu’offre la Commedia Dell’arte par exemple, ou en adaptant des textes de Gogol, Goldoni, Aziz Nesin et autres écrivains.
Les pièces de théâtre qu’il a mises en scène dans les années 1980-1990
(El-Ajouad, Lagoual, Lithem, Arlequin…) ont révélé une pratique théâtrale singulière caractérisée par une recherche approfondie sur le discours, la langue, le décor et la mise en scène.
Ce colloque international se veut, selon les organisateurs, une lecture multiple de l’œuvre d’Abdelkader Alloula dans toutes ses dimensions artistiques, faisant appel à plusieurs disciplines bien ancrées dans le champ des sciences humaines et sociales comme la sémiotique, la sémantique, la sociocritique, l’analyse du discours, l’anthropologie et la psychologie.
Une trentaine de spécialistes du 4e Art, issus de différentes universités du pays et de l’étranger participent à cette rencontre qui se tient deux jours durant sous le thème générique «Le théâtre d’Abdelkader Alloula (1939-1994): le texte et la scène». Les communications de cette première journée sont réparties sur deux séances successives consacrées à «l’écriture dramaturgique chez Abdelkader Alloula» et à «la production théâtrale».