Accueil Culture+ «Terminal sud» de Rabah Ameur-Zaïmèche : Une chronique violente, intemporelle et apatride

«Terminal sud» de Rabah Ameur-Zaïmèche : Une chronique violente, intemporelle et apatride

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Attendu pour restituer les affres de la décennie noire et l’épisode du terrorisme des années 1990 en Algérie, «Terminal sud», du réalisateur Rabah Ameur Zaïmeche, projeté mercredi soir à la cinémathèque de Béjaïa aura pris de court tous les spectateurs.

Non que le film ait fait l’impasse sur cette tragédie, mais parce que son auteur est resté muet délibérément sur l’identité du pays qui la subit, la nature du conflit qui le traverse (insurrection ou contre-révolution) et l’époque de son déroulement. En somme, c’est un thriller abstrait, décelable sous toutes latitudes, car réunissant tous les ingrédients qui le caractérisent, notamment la peur, l’angoisse et l’épouvante. Le seul repère qui en trahit l’origine reste les sonorités du langage algérien, distillées du reste avec parcimonie par certains protagonistes, lesquels ont fait le choix quasi intégral d’échanger et de s’exprimer en français. Même les décors paysagers et les scènes urbaines tranchent avec les références nationales ayant été puisées exclusivement de la carte du patrimoine du sud de la France et qui auraient pu trouver leur équivalent dans n’importe quel coin du globe.
Visiblement Zaiîmèche a fait un choix scénographique délibéré, estimant que la trame de sa chronique est courante dans diverses régions du monde en proie à la violence armée et qui se partagent toutes les mêmes scènes de terreurs et d’horreurs. Les mêmes drames.
Sa chronique met en lumière un jeune médecin, sans nom (campé à l’occasion par Ramzi Bedia) qui, malgré l’insécurité qui l’entoure, continue a accomplir scrupuleusement et avec passion sa mission.
Ni les disparitions, ni les enlèvements, ni les assassinats qui lui sont rapportés par ses patients et perpétrés par des groupes non identifiés, ni les menaces anonymes dont il est fréquemment l’objet, ne le dissuadent de lâcher prise et de fuir avec sa femme à l’étranger. Mais un beau jour, tout bascule. Son beau-frère, journaliste de son état, est assassiné dans la rue, quasiment devant ses yeux et après avoir rendu son souffle dans ses mains sur une table d’opération. Et avant même qu’il ne s’en remette, il se fait réquisitionner manu-militari par un groupe armé qui l’emmène en forêt, pour soigner un des leurs gravement blessé. Il réussit à le sauver mais il n’est pas tiré d’affaire pour autant. À son retour, un autre groupe l’attendait pour l’enlever à son tour, lui reprochant d’avoir remis sur pied un chef ennemi et le soupçonnant de travailler à sa solde. Et pour lui tirer les vers du nez, il est soumis à des séances de torture insoutenable avant d’être relâché dans un état proche de la mort. Récupéré dans une décharge publique par un ami, il est vite pourchassé et traqué par un autre groupe hostile, tout aussi anonyme. Alors qu’il se trouvait à bord de la voiture de son sauveur, il empoigne une arme, trouvée dans la boite à gants , en descend, et tire mortellement à bout portant sur ses poursuivants. Une scène terrible qui lui génère un choc émotionnel indicible. Lui dont les mains soignent ont tué. Mais il a dû s’y faire et reprendre ses esprits avant de se faire la malle, en rejoignant clandestinement un navire de marchandise, mouillant vers un port étranger. Une histoire terrible, magnifiée par un jeu des acteurs, notamment en plus de Ramzi, Amel Brahim Djelloul, et Slimane Dazi.

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