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MOHAMED SAYOUD, EXPERT ALGÉRO-ALLEMAND, CONSEILLER À L’INVESTISSEMENT, AU COURRIER D’ALGÉRIE : «L’Algérie doit mener un marketing à l’international pour inciter les étrangers à venir investir»

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Dans l’entretien qui suit, Mohamed Sayoud, conseiller et consultant à l’investissement de nationalité algéro-allemande, fait le point sur le niveau des investissements étrangers en Algérie qu’il qualifie de «timide». Pour lui, ce n’est pas tant la règle 51/49 qui pose problème, mais les lenteurs prises dans le traitement des dossiers des candidats à l’investissement. Riche de 30 ans d’expérience dans le domaine pour avoir été chef d’entreprise en Allemagne, Sayoud pense qu’il est temps d’appliquer concrètement les mesures de facilités décidées par le gouvernement au profit des investisseurs dans des filières bien ciblées amenant à une économie diversifiée.

Le Courrier d’Algérie : En votre qualité, comment évalueriez-vous aujourd’hui le niveau des IDE hors-hydrocarbures en Algérie ?
-Mohamed Sayoud : Le niveau des investissements étrangers en Algérie demeure timide en raison de l’absence de visibilité dans l’application des facilités qu’il conviendrait à accorder aux porteurs de projets. Prenons le cas de l’Agence nationale de développement de l’investissement (ANDI) qui prend du temps dans le traitement des dossiers. En d’autres termes, un investisseur étranger n’accepte pas et ne pourrait pas attendre pendant six (6) mois ou plus pour avoir l’accord du Conseil national de l’investissement (CNI) pour un petit projet qui ne dépasse même pas les 30 milliards de centimes d’investissements.

– Donc vous plaidez la réduction des délais de traitement des dossiers d’investissement…
– Oui ! Je propose de ramener l’accord de l’Andi à un délai n’excédant pas les sept (7) jours sans passer par le CNI pour les projets qui ne dépassent pas les 50 milliards de centimes. Aussi, je suggère l’octroi d’assiettes foncières plus facilement avec une réponse qui ne doit pas dépasser les trois (3) semaines. Au plan administratif, pour fluidifier la libre circulation, il faudra octroyer un visa au bout d’une semaine après une demande soumise par un futur investisseur.

– La règle 51/49, qui régit l’investissement étranger en Algérie, est qualifiée de «frein» par certains pays au moment où d’autres la considèrent d’une opportunité. Qu’en pensez-vous ?
-Je ne trouve pas que cette règle soit un frein. Au contraire, du moins pour les petites et moyennes entreprises. Car il est tout à fait normal et il est important pour un investisseur étranger, venu par exemple de Chine ou Dubaï, d’avoir un partenaire local, c’est-à-dire algérien. Au-delà maintenant du cadre juridique, il est nécessaire de mener une forte communication à l’échelle internationale pour ramener le maximum d’investisseurs étrangers en Algérie. Une bonne communication est à même d’inciter et convaincre les hommes d’affaires à venir placer des investissements dans notre pays.

– Vous laissez entendre que ce n’est pas les opportunités qui manquent. Quels sont dès lors les domaines, ou filières, que vous conseillerez aux investisseurs étrangers ? Sachant que, et jusque là, les investissements ne sont pas aussi diversifiés tel qu’il est assigné comme objectif dans le plan du gouvernement…
– En parlant d’opportunités, je peux citer le domaine industrie/mécanique, d’où sont issues les filières de l’usinage et la fabrication des moules d’injection et extrusion pour le plastique, le Zamac, l’aluminium, la fonderie… etc. Aussi, les mêmes opportunités se trouvent dans l’ameublement, l’agroalimentaire, la formation professionnelle, la sous-traitance en général et pour le domaine automobile en particulier, ainsi que les textiles et cuirs sachant que la tannerie industrielle nationale a besoin d’une masse manufacturière.

– Récemment, vous avez participé au forum Algéro-allemand à l’occasion de la visite de la chancelière Angela Merkel en Algérie. Quels sont les domaines qui intéresseraient les Allemands ?  Et si oui, y a-t-il des partenariats conclus ou à conclure en prévision ?
– Au cours de mes discussions avec des opérateurs allemands, j’ai fait en sorte de les convaincre de venir surtout produire en Algérie contre un marché d’environ 1,5 milliard d’habitants. C’est-à-dire produire pour satisfaire le marché local et envisager d’exporter vers le marché de l’Afrique. Toutefois, et jusqu’alors, les Allemands, comme c’était le cas d’opérateurs d’autres pays, sont venus pour nous faire le trading, sinon pour seulement nous vendre leurs produits. D’ailleurs, lors de mon intervention au cours de ce forum qui a réuni les hommes d’affaires des deux pays, j’ai été très clair à ce sujet: il faut venir produire en Algérie car il y a, derrière, un marché énorme de plusieurs millions de dollars.

– Que pensent-ils justement de la règle 51/49 ?
– Les investisseurs allemands pensent que l’économie de l’Algérie est un «grand bazar» en raison de la prévalence du commerce extérieur dans l’économie nationale. Dès lors qu’ils l’ont constaté ainsi, ils sont venus avec l’idée de vendre leur production et non pas pour produire. Je vous donne un exemple : l’entreprise Karcher, leader des solutions de nettoyage, produit des machines à pression qui sont fabriquées en Chine. Donc, ils sont venus chercher des revendeurs en Algérie. D’ailleurs, lorsque j’ai parlé aux propriétaires, je leur ai demandé de venir produire en Algérie, où la main-d’œuvre est 50% moins chère qu’en Chine. Sur ce plan, l’Algérie doit faire plus pour changer sa stratégie dans le domaine du marketing à l’international pour l’incitation et l’encouragement des investisseurs étrangers en leur facilitant toutes les tâches. Pour être plus précis, elle doit cibler en masse à l’échelle internationale (monde entier) les petites et moyennes entreprises étrangères qui créent une masse manufacturière importante de main-d’œuvre.
F. G.

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