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Il y a 60 ans fut guillotiné Fernand Iveton : Le seul algérien d’origine européenne à avoir été exécuté

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Cela s’est passé un 11 février 1957, à la prison Serkadji, ex-Barberousse, à Alger, où une triple exécution à la guillotine, à arracher à la vie, un après l’autre, trois valeureux combattants pour l’indépendance de l’Algérie. À l’aube de cette matinée, glaciale, les martyrs Fernand Iveton, Mohamed Ouenouri et Ahmed Lakhnache ont été décapités, par les autorités coloniales françaises, et leur sang a été entremêlé, après un chemin parcouru ensemble, celui du combat libérateur du peuple algérien, jusqu’à sacrifier leur vie, pour que Vive l’Algérie indépendante.

«Dans la vie d’un homme, la mienne compte peu, ce qui compte, c’est l’Algérie, son avenir, et l’Algérie sera libre demain.» Telles ont été les dernieres paroles, du défunt martyr Fernand Iveton, quelques secondes, avant que ses bourreaux, ne lui arrachent la tête, avec la lame de la guillotine, ne se doutant nullement, que c’est par ses sacrifices que s’approchait, chaque jour de plus, le rendez-vous du peuple algérien avec l’indépendance. Celui qui dès son jeune âge a fait le choix d’emprunter les chemins de la liberté, pour donner le meilleur de lui –même, à cette terre qui l’a vu naître et aussi nourri ses rêves et son idéal, de militant communiste et humaniste, de Bab -Edzira, ex-Rue de la Marine, à Bab-El-Oued , à la Rue des Lillas, à El –Mouradia. L’exécution du patriote algérien, Fernand Iveton devait, pour les autorités coloniales françaises, de Paris comme celles d’Alger, servir absolument d’exemple, pour les autres enfants d’Algérie, notamment d’origine européenne, car Iveton, et avant lui, son camarade, Henri Maillot, représentaient l’échec de la politique de peuplement promue par la France coloniale, dès son occupation, en 1830, de l’Algérie. Fernand fut ferme jusqu’au bout, comme il le fut lors du procès, restant sur sa ligne politique, ne cédant pas un pouce à l’idéologie colonialiste, car il avait déjà compris, depuis longtemps qu’on ne tient pas un peuple, en laisse au XXème siècle. Il avait rejoint dès 1956 ses autres frères algériens, car il a compris que rien n’arrêterait la marche en avant du peuple algérien vers sa liberté. Ce grand cœur, généreux, amoureux des Hommes et des Libertés avait choisi de déposer une des bombes fabriquées par le martyr Abderrahamane Taleb, dans l’usine où il travaillait, à un endroit devant occasionner que des dégâts matériels. Jacqueline Guerroudj, qui assurait la liaison au sein du groupe, remit à Fernand Iveton, a raconté, hier, Tahar Hocine, les deux bombes réglées par l’étudiant en chimie, Abderrahmane Taleb, pour exploser à 19 heures 30, à l’heure où l’usine est totalement vidée de son personnel. Le contre maître s’en aperçoit, donne l’alerte, et Fernand Iveton payait de sa vie le choix de son combat pour que vive l’Algérie, lui qui a choisi de frapper le système colonial dans ce qui lui est vitale, son économie. Son départ voulu précipité, faut-il le noter, par le refus de François Mitterrand, alors ministre de la Justice, garde des Sceaux du gouvernement socialiste, en cette époque, de lui accorder la grâce, n’a pas empêché d’autres algériens, d’origine européenne, d’emprunter la voie de Zabana, d’Iveton, du p’tit Omar, d’Ali la pointe, de Hassiba Ben Boulaid, de Maurice Audin, de Ben-M’Hidi, et de tant d’autres, hommes et femmes, pour que le soleil de la liberté brille sur l’Algérie.
Condamné à mort au cours d’un sombre procès d’un tribunal militaire d’une justice aux ordres du système politique colonial, des cris de mort et de haine n’ont cessé de se faire entendre, de l’intérieur comme à l’extérieur du tribunal. Mais, comme l’a si bien exprimé, le militant de la cause nationale, Salembier, Alger, Tahar Hocine, lors de l’hommage qu’il lui a été rendu hier, à la Salle de Conférence Larbi Ben’Hidi, d’Alger Centre, «Fernand Iveton, était un homme, un patriote et un militant algérien ». Albert Smadja, l’un des avocats commis d’office pour Fernand Yveton a affirmé que durant toute sa carrière au barreau, il n’avait « jamais vu un dossier d’inculpé aussi mince et comprenant peu de pièces facilitant l’instruction de l’affaire» car, à son avis, «on voulait précipiter l’exécution du militant et clore le dossier». Dans son livre publié, en octobre 2010, chez Calmann-Lévy, sous le titre « François Mitterand et la guerre d’Algérie», l’historien Benjamin Stora et le journaliste au Point François Malye, le rôle de l’ex-président François Mitterrand, au sujet de l’exécution de Fernand Iveton . Les deux auteurs ont exhumé un document des archives du Conseil supérieur de la magistrature qui établit que «François Mitterrand -comme la totalité des membres du CSM- s’est bien opposé à la grâce du seul Européen exécuté pendant la guerre d’Algérie, un homme qui n’avait pourtant tué personne» est-il précisé. Le recours en grâce avait été refusé à Fernand Iveton, le 10 février 1957, par, faut-il le rappeler, le Président français de l’époque, René Coty, en accord avec le garde des Sceaux, François Mitterrand et le secrétaire général de la SFIO, Guy Mollet, Président du conseil. Pour le gouvernement français dominé par les socialistes de la SFIO, s’appuyait sur la communauté européenne raciste et acquise aux thèses coloniales pour garder « l’Algérie française» et l’exécution du fidaï Fernand Iveton devait outre être rapide, servir absolument d’exemple, mais en vain, car ils étaient à contre sens du cours de l’Histoire qu’écrivaient, au prix de leurs vies, des hommes et des femmes, pour que l’Algérie soit indépendante et libre. « La vie d’un homme, la mienne, ne compte pas. Ce qui compte, c’est l’Algérie, son avenir», ultimes paroles lancées par Fernand Iveton, à ses bourreaux, annonçant ainsi la fin proche de l’Algérie-française, des paroles laissées, comme un message-testament, à ses compagnons d’armes qui vivront le jour heureux de l’indépendance du pays, et aux générations qui auront, la rude tâche de bâtir l’Algérie indépendante.

Fernand Iveton, le seul européen des 198 guillotinés pour avoir choisi les chemins de la liberté
Avant d’aller au supplice, il embrasse ses frères de combat, Ahmed Lakhnèche et Mohamed Ouennouri, clamant, d’une seule voix, «Vive l’Algérie libre !», à l’aube de cette matinée glaciale, du 11 février 1957. Le cri retentissant des trois fedayin, Iveton, Ahmed et Mohamed, fut repris en chœur par les prisonniers de Serkadji, hommes et femmes, celles-ci lançaient des youyous aussi, pour annoncer à chaque fois, qu’un grand allait avec courage au rendez-vous de la mort, pour que Vive l’Algérie.
L’écho sortait des murs de la prison et parvenait jusqu’aux terrasses de maisons de la Casbah, voisine à la prison de Serkadji, ex-Barberousse, et là aussi les Algériens et Algériennes se lançaient dans les chants patriotiques Min Djibalina», accompagnés de coups de M’hrezz et les youyous des femmes, pour saluer le courage, de celui et ceux qui allaient être guillotinés. De cet homme, qui voyait loin, que le jour de l’indépendance est à la portée de main, car la lutte armée, décidée, trois ans auparavant, novembre 1954, allait sans aucun doute à la rencontre du jour de l’indépendance. Son avocat, Maître Joë Nordmann garde un souvenir fervent, dans un de ses témoignages sur Iveton et son caractère, il dit que « sa droiture, sa clarté d’esprit, sa fidélité aux principes de liberté et d’indépendance» écrit-il dans ses Mémoires, m’impressionnèrent beaucoup, poursuit-il « lorsque, pour la première fois, je le rencontrai à la prison Barberousse d’Alger. Il avait trente ans». Avec l’exécution de Fernand Iveton, le 11 février 1957 à 5 heures 10, sur l’échafaud dressé furtivement, dans la cour de la prison de Barberousse, le bourreau attitré, Maurice Meyssonnier, était à sa vingt et unième victime parmi les patriotes algériens. « Celui-là n’est pas comme les autres», avait dit, un jour, Didouche Mourad à son ami Ahmed Akkache, comme l’a rappelé, hier, le militant Tahar Hocine, poursuivant dans son récit, que Mourad avait dit, au quartier de la Redoute, fin des années 1940, «s’il y en avait beaucoup comme lui, cela aurait changé bien des choses.». Né le 12 juin 1926, à la rue de la Marine, Bab-El-Oued, à Alger, la famille de Fernand Iveron, quitte le quartier, pour s’installer au Clos-Salembier, à la rue des Lilas, puis rue des Coquelicots, son père était un ouvrier électricien, et lui, devenu jeune homme, il travailla comme ouvrier-tourneur à l’E.G.A (Electricité Gaz d’Algérie), et était connu pour ses convictions communistes et les militants du PPA-MTLD, qu’il côtoyait, l’estimaient pour sa droiture. Il avait très tôt épousé la notion et les idéaux de l’indépendance, car convaincu que le système colonial oppressif, devait connaître sa fin par la lutte armée, communiste ce fut de même pour d’autres enfants de l’Algérie, d’origine européenne et militants du Parti communiste Algérien (PCA), pour ne citer qu’Henri Maillot, Maurice Laban et Maurice Audin. Du fond de sa cellule à Serkadji, juste après la sauvage décapitation par la guillotine de Fernand Iveton, Ahmed Lakhnèche et Mohamed Ouennouri, un poème d’une prisonnière anonyme, se libère des murs de Serkadji pour la mémoire de ces trois valeureux martyrs, Iveton, Mohamed et Ahmed : « ils ont osé, ce matin ils ont osé vous assassiner(…) vivre était votre droit, vous l’avez refusé, pour que par votre sang, d’autres soient fortifiés .. ». Jacqueline Guerroudj, rescapée de la guillotine, relate dans son livre-témoignage «Des douars et des prisons » que L’objectif des fedayin, lit-on « clairement exprimé, était, selon l’idée émise par Fernand Iveton qui connaissait bien les lieux à l’usine de gaz du Hamma où il travaillait, de placer des bombes sous les tuyaux à un endroit choisi pour que les dégâts empêchent l’usine de fonctionner , privant ainsi Alger d’électricité ». Jacqueline Guerroudj, qui assurait la liaison au sein du groupe, remit à Fernand Iveton les deux bombes réglées par l’étudiant en chimie, le défunt martyr, Abderrahmane Taleb, pour que celles-ci explosent à 19 heures 30, à l’heure où l’usine est totalement vidée de son personnel.
Karima Bennour

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