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Da 5 Blood de Spike : Lee entre Netflix et l’assassinat de George Floyd

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Spike Lee aurait dû être le premier Noir à présider le jury de Cannes cette année. Le Covid-19 en a décidé autrement. Le Festival n’a pas eu lieu et le cinéaste new-yorkais a promis qu’il se rendrait disponible en 2021 pour honorer l’invitation. Cependant, le nouveau film de Spike Lee, Da 5 Bloods, une production Netflix, aurait permis à la plateforme de streaming de faire son retour sur la Croisette (hors compétition puisqu’elle en est toujours interdite). Alors qu’il faisait la promotion de son film, un autre événement lui donne un puissant écho: la mort de George Floyd, afro-américain assassiné par un policier blanc à Minneapolis le 25 mai dernier. La sortie du film s’est transformée en tribune politico-cinématographique. Entre un «brother» et deux «peace & love», Spike Lee tente de descendre un Donald Trump, qu’il surnomme «l’agent orange» sans aller beaucoup plus loin que l’insulte. Il faut avouer que les films de Spike Lee sont (parfois) plus intéressants que son discours. Sa filmographie est basée sur la mise en scène des tensions raciales dans son pays (Do The Right Thing, Jungle Fever, Malcolm X…) et de raconter l’histoire des États-Unis à travers le prisme afro-américain. Quant à Da 5 Bloods, il y traite de la guerre du Vietnam pour rappeler que les Noirs, citoyens de seconde zone dans leur pays, ont servi de chair à canon. Les chiffres le prouvent en tout cas (30 % de soldats pour une population noire de 10 % aux États-Unis) même si le film, selon les critiques, n’est pas convainquant surtout pour représenter les séquences de combat. On le sait depuis Miracle à Santa Anna, qui mettait en scène de façon peu convaincante un bataillon noir pendant la Seconde Guerre mondiale en Italie. Les a compris cela et rend ici hommage à Coppola pour signifier que personne ne fera jamais mieux, avec Apocalypse Now. Spike Lee contourne l’obstacle des batailles en montrant quatre vétérans noirs de retour au Vietnam aujourd’hui. Ils espèrent rapatrier la dépouille d’un camarade et surtout récupérer des lingots d’or. Commence une aventure mollassonne et bavarde dans la jungle, où les quatre amis se font des «checks» ou s’embrouillent sur fond de Marvin Gaye. Le plus intéressant est Paul, revenu brisé de la guerre et devenu un électeur de Trump. Au passage, le réalisateur règle des comptes avec la France, rappelant la défaite en Indochine. Enfin, Lee insère des extraits et des photos d’icônes afro-américaines, de Mohammed Ali à Martin Luther King, achevant de faire de Da 5 Bloods un mélange des genres déroutant, entre série B à la Chuck Norris et film tract à la Godard. Remis en selle il y a deux ans avec BlacKkKlansman , qui lui valut le Grand Prix à Cannes, son premier «vrai» Oscar (meilleur scénario) après en avoir reçu un d’honneur, et un succès en salle, on ne sait trop comment situer ce «Spike Lee Joint» (désignation officielle et intraduisible de ses productions) qui a toucults les défauts de la plupart des films Netflix signés par des auteurs réputés, riches en dollars mais pauvres en inspiration (bien sûr, il y a des exceptions). Rechute rédhibitoire ou parenthèse ratée sans conséquence. Seul l’avenir le dira.

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