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Allemagne : les violences contre les réfugiés inquiètent

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Le ministre de l’Intérieur allemand juge ces violences « révoltantes et inacceptables ». 54 actes criminels ont été notifiés depuis janvier. Les images d’accueil et de fraternité semblent loin. L’Allemagne doit faire face à une recrudescence des violences contre les réfugiés. Alors que jusqu’à un million de migrants devraient être entrés en Allemagne cette année, le gouvernement d’Angela Merkel signifie sans cesse son inquiétude face à cette montée de la haine contre les étrangers. Et ce, d’autant plus que le parti anti-immigration Alternative für Deutschland (AfD) donne de la voix.
Une fois de plus cette semaine, le ministre de l’Intérieur, Thomas de Maizière, a tapé du poing sur la table, jugeant ces violences – qui vont « de la destruction de matériel aux tentatives de meurtre » – « révoltantes et inacceptables ». En septembre, la chancelière Angela Merkel avait assuré que ces actes, notamment les incendies de foyers de demandeurs d’asile, seraient punis « avec toute la rigueur de l’État de droit ». Pourtant, selon une enquête de l’hebdomadaire Die Zeit, sur les 222 attaques de foyers de réfugiés les plus graves commises cette année, seules quatre affaires ont débouché sur des condamnations. « Si l’État veut vraiment “agir avec toute la rigueur de l’état de droit”, il devrait faire considérablement plus », assène l’hebdomadaire. Die Zeit note le manque de moyens dédiés à ces enquêtes, mais pointe aussi les difficultés sur le terrain comme l’absence de témoignages, nombre de foyers étant installés dans des zones peu habitées.

54 actes criminels depuis janvier
« Le fait qu’il n’y ait pas eu de morts jusqu’ici relève de la chance », estime pour sa part Timo Reinfrank de la Fondation Amadeu Antonio, qui lutte contre le racisme. Les attaques racistes se sont multipliées surtout depuis l’été avec l’arrivée spectaculaire de centaines de milliers de candidats à l’asile en quelques semaines. De juin à fin septembre, il y a eu en moyenne chaque jour trois actes xénophobes contre des foyers de demandeurs d’asile, selon des chiffres du gouvernement transmis aux députés. « Ces violences ne sont pas seulement commises par des néo-nazis », explique Timo Reinfrank. « Ce sont de plus en plus souvent des soi-disant citoyens et citoyennes inquiets qui donnent libre cours à leur racisme », selon lui.
À Crimmitschau, dans l’ex-RDA, trois personnes ont été placées en détention provisoire pour avoir projeté des cocktails Molotov contre la façade d’un foyer où dormaient cette nuit-là 45 personnes, dont 20 enfants. À Eggesing, toujours en ex-Allemagne de l’Est, ce sont deux Afghans qui ont été roués de coups cette semaine. Ces actes sont les exemples les plus récents tirés de la longue liste des agressions contre les réfugiés minutieusement répertoriées par deux associations, Pro Asyl et la Fondation Amadeu Antonio. Des insultes « P… de migrants », des croix gammées peinturlurées sur les murs de foyers d’hébergement, de petites manifestations pour bloquer un autocar transportant des réfugiés, les actes racistes moins spectaculaires se répètent aussi au quotidien. En Bavière, porte d’entrée de la plupart des migrants à l’issue de leur longue odyssée, 54 actes criminels ont été répertoriés depuis janvier, selon les autorités.
Un effet attentats de Paris ?
Dans les bas-fonds du populisme, l’AfD qui veut stopper l’immigration voit sa popularité croître. Le parti, qui avait d’abord fait de la lutte contre l’euro son fonds de commerce, est crédité de 10,5 % des intentions de vote. Depuis plus d’un an, le mouvement xénophobe Pegida déverse par ailleurs son fiel contre les musulmans en manifestant tous les lundis soir dans les rues de Dresde. Et les autorités craignent que les choses empirent à la suite des attentats de Paris, malgré leurs appels à ne pas faire l’amalgame entre réfugiés syriens et djihadistes.
L’extrême droite « se sent très confortée », juge le patron du Renseignement intérieur allemand, Hans-Georg Maassen, dans le Tagesspiegel. « Elle rend responsable les politiques et jusqu’à la chancelière et même les médias » en disant que la « politique des frontières ouvertes est la cause de ce qui se passe actuellement », dit-il. Et à l’approche de scrutins régionaux en 2016, notamment deux dans des Länder de l’Est, d’aucuns craignent une percée populiste de mauvais augure à un an des élections législatives.

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