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Ahmed Kateb, expert-chercheur en relations internationales, au Courrier d’Algérie : «Entre groupes terroristes, il y a une matrice commune »

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L’expert-chercheur en relations internationales, de l’École nationale supérieure de journalisme et des sciences de l’information, doctorant en sciences politiques à la faculté des sciences politiques et de l’information, Ahmed Kateb, analyse et décrypte dans l’entretien, qu’il a bien voulu nous accorder hier, les derniers développements survenus sur la scène régionale et internationale. Avec les attentats de Beyrouth, Paris, Bamako, Tunis et Libye, selon lui, Daech «essaie de se redéployer», après avoir reçu des coups durs par les frappes de l’aviation russe, et l’offensive terrestre de l’Armée arabe syrienne contre les positions des terroristes, et cherche par ces attentats de «prouver qu’il a toujours ses capacités de nuisance en frappant çà et là». L’expert souligne qu’«entre groupes terroristes, il y a une matrice commune». Indiquant qu’aucun pays n’est à l’abri d’un attentat terroriste, l’expert-chercheur souligne que «la lutter contre l’idéologie terroriste takfiriste-djihadiste ne peut être menée seulement sur le terrain» par un combat antiterroriste «implacable» que mènent les différents services algériens de sécurité, mais, précise-t-il, «également en s’attaquant aux matrices idéologiques qui existent, malheureusement, dans notre pays». Il est à rappeler que notre interlocuteur a collaboré à l’ouvrage collectif “Europe et Maghreb: voisinage immédiat, distanciation stratégique”, édité par le Cread.

Le Courrier d’Algérie : – Des attentats, à Beyrouth, Paris, Bamako, puis Tunis, et celui commis à la voiture piégée, dans la matinée de mardi dernier, à l’Est de Tripoli, Libye, qui a fait dix victimes civiles, quel décryptage faites-vous sur cette série d’attentats ?
Ahmed Kateb : – L’EI (Daech, ndlr) essaie de se redéployer après les frappes de l’aviation russe contre ses positions en Syrie et après, justement, l’offensive terrestre de l’Armée arabe syrienne à l’encontre des villes et des villages tenus par ces groupes terroristes. De par ces attentats, le groupe terroriste tente justement de faire diversion, et de prouver qu’il a toujours ses capacités de nuisance en frappant çà et là. Certes, l’attentat de Bamako n’est pas imputable directement à cette organisation terroriste, cela étant, les différents groupes terroristes, y compris Djabhet el-Nosra, qui avait félicité l’EI (Daech, ndlr) pour l’attentat de Paris, on sait que Djabhet el-Nosra n’est pas en odeur de sainteté auprès de Daech, et vice versa, mais entre groupes terroristes, il y a une matrice commune, c’est-à-dire être contre certains pays, contre certains régimes. Maintenant, en ce qui concerne cette presque simultanéité dans l’action, il faut voir et penser que c’est une tentative de filiation, afin de faire croire à l’opinion internationale que ce groupe a des capacités de projection quasi-mondiale, en frappant, à Paris, Tunis, à Beyrouth auparavant, et à Tripoli en Libye, ce groupe terroriste entend dire: “Je suis là, je suis implanté, non seulement en Syrie et en Irak, mais j’ai des cellules un peu partout.

– L’Algérie est-elle à l’abri d’attentats ?
– Je ne pense pas qu’il y ait un pays à l’abri d’attentat terroriste, soit de l’organisation de l’EI, ou d’autres groupes terroristes, pour l’Algérie, il serait justement très préjudiciable, et même très dangereux, d’avoir une Libye complètement plongée dans le chaos et un éventuel nouveau sanctuaire pour les terroristes de l’EI, chassés de Syrie et d’Irak. Certains analystes prédisent le reflux des terroristes de Daech vers la Libye, un État de non-droit, une zone grise par excellence, différents groupes s’entretuent quotidiennement, il n’y a pas un pouvoir central fort, pour l’ordre et pacifier le pays. Cependant, pour l’Algérie, c’est le danger de se trouver à côté d’une Libye complètement chaotique, et qui devient un aimant pour les groupes terroristes, il ne faut pas oublier également que la situation au Mali est encore fragile et toujours fragile, donc, pour l’Algérie, c’est problématique, d’autant plus avec l’attentat à Tunis, je ne pense pas que les autorités algériennes vont prendre les choses à la légère. Bien au contraire, pour Alger, il est plus que jamais nécessaire et obligatoire, si je puis m’avancer ainsi, de lutter contre cette idéologie terroriste takfiriste-djihadiste, non seulement sur le terrain en menant une lutte antiterroriste implacable, mais également en s’attaquant aux matrices idéologiques, existant malheureusement dans notre pays.

– Vous affirmez comme d’autres, d’ailleurs, que La Libye est, ou en voie de devenir, si elle ne l’est pas encore, le nouveau sanctuaire des groupes terroristes, dont celui de Daech ? Pourquoi ?
– Justement, pour les Occidentaux qui ont initié le processus de démembrement de la Libye et de la Syrie, en même temps, c’est un camouflet cinglant de voir leur stratégie complètement échouée en Syrie, et dans une moindre mesure en Irak. Se rabattre maintenant sur la Libye, en disant «attention la Libye va devenir un sanctuaire, attention il faut intervenir», les Occidentaux ont intervenu, en Libye, on a vu et on voit le résultat, un État qui a été complètement rasé de la carte, un gouvernement décapité, un chef d’État assassiné, une population plongée dans le chaos, maintenant les Occidentaux veulent revenir à la charge pour dire: «Attention, la Libye», qu’est-ce qu’ils vont faire ?
Est-ce qu’ils vont supporter et aider un processus politique ? Est-ce qu’ils vont intervenir militairement sur quelques problèmes que ce soient, c’est là le problème de fond. Les Algériens, eux, avancent la carte de négociation politique, d’une démarche inclusive qui permettra aux Libyens et aux seuls Libyens de prendre en charge leur destinée, à travers un gouvernement d’union nationale. C’est cela le leitmotiv d’Alger et des Algériens, donc couper l’herbe sous le pied de ces va-t-en guerre, qu’ils soient Atlantistes ou Arabes.
Entretien réalisé par Karima Bennour

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