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Inde : Trois suicides à Bollywood en temps de népotisme et de corona

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L’acteur indien Sushant Singh Rajput s’est suicidé le 14 juin 2020 à son domicile de Bandra, un quartier huppé de Bombay. C’est le troisième suicide cette année dans le cercle prestigieux de Bollywwod.

Par Ali El Hadj Tahar

En tout cas, Rajput était sûrement loin d’imaginer combien sa mort allait secouer les tréfonds du cinéma hindi et provoquer une onde de choc politico-judiciaire jusque dans les plus hautes sphères de l’Inde.
Agé de 34 ans, l’acteur était à ses débuts, avec à peine quatre ou cinq films, mais on voyait en lui une star montante. Il jouissait d’un physique avantageux, et son regard ombrageux apparaissait presque quotidiennement dans les pages « people » des journaux à grand tirage. Originaire de l’un des Etats les plus pauvres du sous-continent, le Bihar, Sushant Singh Rajput avait tout d’un nouvel enfant prodige du cinéma le plus productif de la planète. Sa disparition brutale a provoqué une grande consternation au sein de la société et dans le milieu de 7e art, sans manquer d’ouvrir encore une fois un débat virulent sur le népotisme qui règnerait à Bollywood. Or le suicide de deux autres comédiens survenus depuis lors – Ashutosh Bhakre le 29 juillet (à 32 ans) et Sameer Sharma le 4 août (à 44 ans), n’a pas causé autant d’émotion ni de remous. Fait surprenant, l’acteur Bhakre, marié à l’actrice Marathi, s’est pendu tout comme Sameer Sharma. Nul ne comprend pourquoi la mort de ces deux acteurs n’a pas suscité autant d’émoi que celle de Rajput. En tout cas, les allégations de népotisme contre les studios de production familiaux, sont légion. On reproche aux producteurs de toujours réserver des débuts de films faciles aux enfants des vedettes et de refuser l’égalité des chances aux «étrangers» talentueux. En tout cas, la pandémie a mis à nu certains dysfonctionnements de l’industrie cinématographique indienne qui, mine de rien, a plus d’un siècle d’existence.
C’est Karan Johar, l’un des jeunes cinéastes les plus en vue de Bollywood, que l’on accuse de népotisme. C’est l’actrice Kangana Ranaut qui a osé crever l’abcès. Lors de son apparition dans une émission de télévision, elle a qualifié le cinéaste de «porte-drapeau du népotisme et de la mafia cinématographique». Karan a rapidement riposté en disant qu’il avait promu de nombreux talents qui sont des étrangers et que Kangana joue toujours la «carte de la victime». Selon la tradition indienne mâtinée au savoir vivre british, l’histoire n’a pas fini devant un tribunal. Mais les deux étoiles sont fâchées depuis. Le sujet du clientélisme est devenu un thème de discussion national, car en Inde le cinéma est aussi sacré que les vaches. Et le népotisme, cette tendance qu’ont certains responsables à favoriser des membres de leurs familles au détriment des processus du droit et du mérite, est une chose courante, pas uniquement dans le cinéma mais partout en Inde, comme dans toutes les sociétés où la démocratie est encore mal assise.
Puis, il y eut deux autres suicides et, dans un contexte où la mort rôde à chaque coin de rue à cause du Covid-19, la pendaison dans le milieu du cinéma semble banalisée.
Le fait que deux acteurs autres se pendent après Sushant Singh Rajput ne semble pas troubler Bollywood ni le peuple indien, qui en vérité n’a pas que le cinéma dans sa vie. L’épisode sur le népotisme s’est achevé. Mais nul ne connait la suite de ce mystère bollywoodien, qui peut réserver des surprises.
On sait que Rajput a été forcé de prendre des médicaments psychotropique, anxiolytiques et autres sous contraintes et chantages. Mais on ne sait pas s’il en était de même pour Ashutosh Bhakre et Sameer Sharma…
A.E.T.

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