Barack Obama et Raul Castro se sont entretenus en privé durant environ une heure samedi à Panama. Cette rencontre marque une nouvelle ère dans les relations entre les Etats-Unis et Cuba, deux pays ennemis depuis 1956. Avant et après cet entretien qui fera date, les deux hommes ont multiplié les marques d’ouverture en marge du Sommet des Amériques. Ils n’ont pas omis de souligner leurs points de désaccord hérités de plus d’un demi-siècle de tensions et d’affrontements.
M. Obama a remercié son homologue cubain pour son «esprit d’ouverture» et estimé qu’«avec le temps, il est possible pour nous de tourner la page. M. Castro lui a répondu: «Cela a été une histoire compliquée, celle de nos pays, mais nous sommes disposés à avancer».
Déclarations «fructueuses»
Après la rencontre, le président américain a fait état devant la presse de déclarations «franches et fructueuses». Et d’ajouter: «Nous avons des visions très différentes sur la manière dont la société devrait être organisée. Et j’ai été très direct avec lui». Un peu plus tôt, au moment des discours, les deux chefs d’Etat ont célébré le retour de Cuba dans le concert continental après des décennies d’isolement. Devant une trentaine de ses pairs, Barack Obama a affirmé que le rapprochement entre Washington et La Havane marquait «un tournant» pour les Amériques.
Dans une longue allocution, son homologue cubain s’est livré à un plaidoyer contre les ingérences des anciennes administrations américaines dans les affaires cubaines et latino-américaines. Il a ensuite salué la probité du président des Etats-Unis, le qualifiant d’»homme honnête».
Poignée de mains
A l’ouverture du sommet réunissant 34 des 35 chefs d’Etat du continent, les deux hommes avaient échangé une poignée de mains et quelques mots devant les caméras. Réitérant ainsi leur geste historique de décembre 2013 en Afrique du Sud. Au menu de leurs discussions figurait, selon la Maison-Blanche, la reprise des relations diplomatiques, qui tardent à se concrétiser malgré trois séries de discussions de haut niveau à La Havane et Washington. Raul Castro a incité son homologue à accélérer les démarches pour le retrait de Cuba de la liste des pays soutenant le terrorisme. Il a indiqué qu’il verrait comme un «pas positif» une «décision rapide» des Etats-Unis sur ce dossier qui constitue pour Cuba le principal obstacle à la réouverture d’ambassades. Obama a indiqué avoir reçu une recommandation en ce sens du Département d’Etat, mais qu’il n’avait pas encore eu le temps de l’étudier avant de la transmettre au Congrès.
Mesures «insuffisantes»
Devant la presse, le ministre cubain des Affaires étrangères, Bruno Rodriguez a annoncé que le prochain round de pourparlers pour la réouverture d’ambassades se tiendrait «le plus tôt possible». Au-delà des relations diplomatiques, le chemin de la normalisation reste semé de nombreux points de contentieux. Le premier est l’embargo total sur les transactions économiques et financières avec Cuba, imposé depuis 1962. Barack Obama a rappelé avoir demandé au Congrès, contrôlé par les républicains et seul habilité à le faire, de travailler à la levée de cet embargo. Mais les deux chambres sont très partagées sur la question. En attendant, Barack Obama l’a assoupli dans la limite de ses prérogatives présidentielles. Des mesures jugées «insuffisantes» par La Havane.
Rencontre Obama-Maduro
Le sommet s’est terminé sans déclaration finale, les Etats-Unis refusant d’y voir mentionné un soutien à Caracas dans sa dispute avec Washington. Les Etats-Unis ont ont qualifié le Venezuela, principal partenaire économique de Cuba, de «menace» pour leur sécurité intérieure. Barack Obama est très critiqué en Amérique latine en raison de ce décret qui a imposé en mars des sanctions contre de hauts responsables vénézuéliens.
Peu avant de quitter le Panama, le président Obama a toutefois eu «une brève conversation» avec son homologue vénézuélien Nicolas Maduro. Il lui a dit que son but «n’était pas de menacer le Venezuela, mais de soutenir la démocratie, la stabilité et la prospérité au Venezuela et dans la région», selon une porte-parole de la Maison-Blanche.