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SALON NATIONAL DE FORMATION ET DE RECRUTEMENT : Un « aperçu » d’une jeunesse désabusée et d’une économie qui ne recrute plus

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L’appellation – Salon national « Carrefour de l’Emploi et de la Formation » – semblait prometteuse. Mais il ne faudra pas plus de quelques minutes dans les allées étroites laissées aux visiteurs pour désenchanter. La cause : le nombre presque insignifiant des entreprises venues « présenter leurs activités » et collecter les CV de jeunes en quête d’un emploi. En fait, pour un Salon qui se veut national, autant parler d’un non-évènement. Les seuls à ne pas rater le rendez-vous, annoncé en grande pompe il y a quelques jours, sont les jeunes qui se bousculent devant les stands des quelques boîtes, pour tenter de « se vendre ».

«C’est infernal ! », lance un jeune qui dit avoir déposé son CV auprès d’une dizaine d’entreprises. Un diplôme en management en poche et une lueur d’espoir dans les yeux entourés de petites cernes, il ajoute : « d’ici peu, j’aurai réussi à faire le tour. Je sais que mes chances sont minimes, mais, comme on dit, qui ne tente rien n’a rien ! ». C’est un peu le cas de Safia, diplômée en droit qui rêve d’intégrer une structure ressources humaines. À l’heure actuelle, elle « dépanne » dans ce qu’on appelle chez nous « une boîte informatique » : une boutique où l’on fait du traitement de texte et des photocopies. « Je suis déjà venue l’année passée, et ce n’est pas mieux, mais il faut bien essayer de se caser », dit-elle.
Même pessimisme chez Mourad, diplômé en mécanique automobile, venu spécialement déposer son CV auprès de Renault, l’une des rares entreprises d’envergure qui a bien voulu répondre à l’invitation des organisateurs. Renault Académie est d’ailleurs l’unique sponsor de l’évènement. Ne cherchez pas, il n’y en a pas d’autres ! Emploi Partener, CCI Mezghena, DZ Tenders, Stall Expo, CIP, ADT Informatique, Ondefoc, Anem, Ansej, et Angem ne sont que des partenaires. Les organisateurs ont pourtant prétendu faire de cette rencontre (parrainée, du reste, par le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale et celui de la Formation et de l’Enseignement professionnels) un autre « outil de la relance de l’économie nationale ». C’est du moins ce qui en est ressorti de la conférence de presse que le commissaire du Salon, M. Ali Belkhiri, a animé seul, au moment où des représentants des deux ministres déjà cités devaient y participer. Tenez-vous bien : le salon, dans sa 14ème édition, est organisé sous le thème « diversifier l’économie pour se soustraire à la dépendance aux hydrocarbures ».

Les grandes entreprises, les grandes absentes
Après un assez long exposé et un « verbiage » économique – du genre « nous avons les moyens », « nous avons les potentialités », « si nous voulons, nous pouvons »… –, M. Belkhiri, en dépit de toute la bonne volonté qui l’anime, n’a pas pu cacher son désarroi et sa déception quant au désintérêt presque total que les entreprises algériennes affichent à l’égard de ce genre d’initiatives. « Ailleurs, aux États-Unis par exemple, des centaines de salons de ce genre sont organisés annuellement, et, croyez-moi, ça draine du monde ! En France, il y a même des salons régionaux auxquels participent pas moins de 250 entreprises », dit-il. Et d’ajouter avec un brin d’ironie et d’amertume : « nous sommes à la quatorzième édition, et jamais n’avons-nous dépassé une cinquantaine d’entreprises ! ».
L’entreprise algérienne n’a-t-elle pas la culture de participer à ce genre de rencontres ? N’ont-elles pas besoin pour se pourvoir en ressources humaines nécessaires pour atteindre leurs objectifs ? Procèdent-elles autrement ? Peut-être un peu de tout ça, estime le conférencier « solitaire ». Pourtant, il y a bien des secteurs qui continuent à recruter en dépit de la crise. M. Belkhiri, en parfait optimiste, citera l’industrie, les TIC (Technologies de l’information et de la communication), l’aéronautique, la maintenance, les services, le tourisme, l’agriculture – en manque cruelle de main-d’œuvre, celle-là – et bien d’autres secteurs. Mais le plus « attendu » est, sans conteste, le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP), puisque l’on parle déjà – programme du nouveau Président – d’un million de logements à l’horizon 2024.
Mais le plus grand coup – si l’on peut parler de coups – que le Salon national de la Formation et du Recrutement a encaissé, c’est, sans doute, l’absence des grandes entreprises réputées pour être, sinon des grands recruteurs, du moins de bons partenaires pour ce genre d’activités. Pas, en effet, de Sonatrach, pas de Sonelgaz, pas d’EGSA… « Pour celles-ci, ironise M. Belkhiri, on sait comment les recrutements se font ! ». Même genre de commentaires du côté des visiteurs. « Sonatrach, c’est pour les enfants de… », dira Hafid, levant et sa main et ses yeux pour signifier « la haute classe ». « On se serait contenté de quelque chose de moins intéressant, mais même pour ça, c’est clair que c’est mort », rétorqua son ami, Kamel, avant d’attaquer un sandwich chawarma enduit de harissa.

« Se former ? C’est à se demander pourquoi ! »
Côté chiffres, ce n’est guère fameux, notamment pour une quatorzième édition. Un petit rappel ne fera pas plus de mal que la réalité du marché de travail actuellement : durant la treizième édition, le même salon (qui est, en fait, le jumelage de deux salons, l’un de recrutement et l’autre de formation) n’a permis que 2 500 recrutements. « Pour cette année, dira M. Belkhiri, l’on s’attend à moins ». Logique quand on connaît la situation économique du pays qui perd des emplois par dizaine de milliers. Cependant, ce qui saute aux yeux, quand on se balade dans les allées du Salon, ce sont les écoles de formation, publiques et privées – plus de privées que de publiques –, dont les représentants vous tendent des prospectus et des dépliants, en insistant sur les réductions dans le cadre de l’évènement, 10%, 15%, parfois même 20%… Le nombre d’écoles présentes ? Beaucoup plus que le nombre d’entreprises ! « Il faut maîtriser toutes les sciences du monde pour prétendre à un poste de secrétaire », s’est plainte une femme médecin qui accompagnait une amie à la recherche d’un emploi. « C’est à se demander pourquoi se former ! », enchaîna cette dernière. « On sait que, quand on ne connaît pas le directeur, le CV atterrit dans une corbeille », finit-elle avec un clin d’œil pas du tout joyeux…
Sinon, durant les trois jours que durera le Salon, il y aura des ateliers ouverts pour ceux qui voudront apprendre à rédiger un CV ou à donner bonne impression durant un entretien d’embauche, ainsi que d’autres formalités et protocoles instaurés par un monde « capitaliste » atrocement sauvage et, pire encore, en parfait déséquilibre.
Hamid F.

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