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LA VOIX DE LA ROMANCIÈRE PALESTINIENNE ADANIA SHIBLI, BAILLONNÉE À LA FOIRE DU LIVRE DE FRANCFORT : De la résistance « armée » à la résistance « culturelle »

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En dépit des tentatives visant à étouffer la réalité des souffrances du peuple palestinien, la voix de cette cause pour laquelle des milliers de martyrs sont tombés, ne cessera de retentir dans le concert des nations, jusqu’à ce que justice soit faite. Ni le sport, encore moins la littérature et la science, ne peuvent être associé aux pratiques inhumaines, à tout type de génocide, des manœuvres qui vont à l’opposé des valeurs que véhicule le génie humain. Il va de soi qu’il faut bien  mettre en sourdine l’appel à la violence et au massacre des civils et des vies humaines, mais de là à ignorer les mérites des Palestiniens, quelles que soient leurs compétences et leurs qualifications, c’est inadmissible. Et pourtant, la haine s’est dévoilée au grand jour, à l’occasion de 75e édition de la Foire du livre de Francfort, qui se déroule du 18 au 22 octobre en cours. Depuis quand l’institution littéraire a outrepassé ses limites, ses droits, dans l’attribution des prix et des reconnaissances ? Malencontreusement, la réalité est amère, elle est tout autre. 

Cette cause palestinienne qu’on ne peut cacher, ou le voile de la honte…

Pour son livre « Un détail mineur », l’écrivaine palestinienne Adania Shibli, devait recevoir le prix « LiBeraturpreis 2023 », lors de l’édition en cours de la Foire du livre de Francfort. Et contre toute attente, voilà que l’organisatrice du prix, l’association littéraire Litprom en l’occurrence, a fait savoir que l’auteure palestinienne ne recevrait pas son prix, comme cela avait été initialement prévu, et qu’il avait été reporté,  « en attendant un format et un cadre appropriés pour l’événement à un moment ultérieur ». Le prix LiBeraturpreis est un prix de littérature allemande décerné chaque année à un auteur d’Afrique, d’Asie, d’Amérique latine ou du monde arabe et présenté à la Foire du livre de Francfort, l’un des plus grands rassemblements mondiaux de l’industrie de l’édition. En 2016, Adania Shibli, née en Palestine en 1974 et qui vit actuellement entre El-Qods et Berlin, publie « Un détail mineur », un roman basé sur des faits réels qui débute en 2003, lorsqu’une jeune palestinienne découvre l’histoire d’une bédouine violée puis tuée par des soldats israéliens durant la Nakba en août 1949. Bien qu’elle ait eu lieu plus de 50 ans plus tôt, elle décide de faire découvrir la vérité sur ce crime. 

Une pétition signée par plus de 600 auteurs

La décision de reporter la remise du prix à l’écrivaine palestinienne, n’a pas manqué de susciter l’indignation la plus totale dans le monde de l’édition. Plus de 600 auteurs, Prix Nobel de littérature, éditeurs et  traducteurs, ont en effet signé une pétition, contestant vivement cette décision. Parmi eux, des Prix Nobel de Littérature, dont Annie Ernaux, Abdulrazak Gurnah et Olga Tokarczuk. Pour les protestataires, il s’agit là d’« une position partiale et injuste ». Les organisateurs « ferment l’espace à une voix palestinienne », estiment les  signataires du texte. Un gâchis, tant la littérature peut jouer un rôle essentiel dans ces moments difficiles de douleur inimaginable, ressenties du côté de Ghaza. Selon ladite pétition, « la Foire du livre de Francfort a la responsabilité de créer des espaces permettant aux écrivains palestiniens de partager leurs pensées, leurs sentiments et leurs réflexions sur la littérature en ces temps terribles et cruels, sans les fermer ». « L’annulation de la cérémonie n’a pas été validée par Adania Shibli, contrairement à ce que les organisateurs auraient laissé entendre dans les messages à ce sujet », précise en outre la pétition. 

L’Union des éditeurs arabes se retire

Dans le même contexte, outre l’annulation de la cérémonie d’hommage à l’écrivaine palestinienne, et en signe de contestation sur le soutien que la direction de la Foire avait exprimé aux agressions perpétrées par l’entité sioniste contre le peuple palestinien à Ghaza, ainsi que sur son attitude inégale et alignée sur la position israélienne quant aux évènements que connaît la région, plusieurs institutions et maisons d’édition arabes, dont l’Union des éditeurs arabes, l’Union des écrivains tunisiens, l’Autorité du Livre de Charjah et Dar Saâd Al-Sabah pour la Culture et la Créativité, ont décidé de boycotter la foire. Une initiative prise afin de mettre en avant le rôle de la culture et des livres pour encourager le dialogue et la compréhension entre les peuples. Pour sa part, l’Union des éditeurs arabes regrette « une position partiale et injuste à l’égard des évènements tragiques dans la région, sans tenir compte des massacres brutaux et du blocus imposé sur la bande de Ghaza, privée d’électricité, d’eau et de nourriture, et les agressions flagrantes contre les enfants, les femmes et les vieux ainsi que les nombreux martyrs et blessés parmi les citoyens ».

Quand le Gouvernement malaisien soutient la Palestine…

Une indignation qui s’est propagée bien au-delà du monde littéraire, atteignant même les gouvernements des États, lesquels soutiennent la juste cause palestinienne. En effet, le ministère malaisien de l’Éducation, a annoncé hier son retrait officiel de la Foire de Francfort, « accusant les organisateurs de prendre position en faveur de l’occupation israéliennes, dans un contexte de divisions mondiales croissantes sur le droit du peuple palestinien à sa terre et à sa vie, avec la persistance des agressions criminelles israéliennes contre des civils palestiniens ». Dans un communiqué, le ministère malaisien explique que « la décision de se retirer de la Foire du livre de Francfort  est « conforme à la position de solidarité et de plein soutien du gouvernement malaisien à la Palestine ». De son côté, le premier ministre de Malaisie, Anwar Ibrahim, a affirmé sur Facebook « le soutien indéfectible de la Malaisie au peuple palestinien », appelant à la fin immédiate des bombardements israéliens sur Ghaza et à l’ouverture d’un couloir humanitaire passant par le passage de Rafah entre l’Égypte et la bande de Gaza », et exhortant Israël à abandonner sa « politique d’expropriation » et à « rechercher une solution pacifique à la question israélo-palestinienne ».

L’écrivain algérien Saïd Khatibi boycotte la foire de Francfort

En réponse à cette décision «arbitraire», un écrivain algérien a annoncé son retrait des événements de ce salon. Ainsi, l’auteur Saïd Khatibi, a indiqué qu’il ne prendra pas part à la Foire du livre de Francfort. Contestant le traitement « inapproprié » que l’écrivaine palestinienne, lauréate du prix, a subi, l’écrivain algérien a déclaré « Je regrette la position des organisateurs de la Foire. Les organisateurs ont pris parti vis-à-vis de la tragédie qui a eu lieu à Ghaza. À la lumière de l’injustice à laquelle est confrontée l’écrivaine palestinienne Adeniya Shibli, j’ai décidé d’annuler ma participation à la Foire du livre de Francfort », a-t-il écrit sur Twitter. Pour rappel, né à Bou-Sâada, Saïd Khatibi est un écrivain algérien qui vit actuellement en Slovénie.

Hamid Si Ahmed 

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