Un policier blanc a été arrêté et inculpé de meurtre, mardi à North Charleston, en Caroline du Sud (sud-est des États-Unis), après avoir tiré plusieurs fois sur un homme noir non armé qui semblait fuir, dans un contexte de tensions raciales particulièrement exacerbées. Le policier, Michael Slager, a tiré huit fois dans le dos de l’homme qui courait après s’être fait arrêter lors d’un banal contrôle routier, peut-on voir sur une vidéo diffusée par le New York Times et envoyée par un témoin. Sur la vidéo, on voit ensuite le policier marcher calmement jusqu’à l’homme, Walter Scott, qui serait âgé de 50 ans, lui enjoignant de mettre les mains dans le dos avant de lui passer les menottes. L’homme est mort quelques instants après. L’incident s’est produit, samedi, après un contrôle routier, l’un des feux du véhicule de l’homme ne fonctionnant plus. Une brève confrontation aurait opposé les deux hommes avant les tirs, a affirmé le journal local Post and Courier. Le policier, qui risque la peine de mort ou 30 ans d’emprisonnement, a été transféré au centre de détention du comté de Charleston, a précisé la police dans un communiqué. Dans le mandat d’arrêt visant le policier, il est indiqué que «Thomas Slager a illégalement et avec préméditation tué la victime». «Il a tiré sur la victime à plusieurs reprises dans le dos après une altercation.»
«S’il n’y avait pas eu de vidéo, connaîtrions-nous la vérité ?»
Le maire de la ville, Keith Summey, a expliqué, lors d’une conférence de presse, que l’arrestation du policier avait été motivée par sa «mauvaise décision», a rapporté le Post and Courier. «Quand vous prenez une mauvaise décision, peu importe que vous soyez là pour protéger la population ou un simple citoyen dans la rue, vous devez vivre avec cette décision», a déclaré l’édile, cité par le quotidien. Avant que la vidéo ne soit diffusée, le policier aurait affirmé que Walter Scott l’avait agressé et s’était emparé de son Taser. Lors d’une conférence de presse qui s’est tenue mardi soir, le frère de la victime s’est interrogé : «S’il n’y avait pas eu de vidéo, connaîtrions-nous la vérité ? Ou aurions-nous vu ce qui est sorti récemment ? Mais maintenant, nous connaissons la vérité.» L’avocat de la famille a ajouté que lors de l’annonce des poursuites, la famille «a commencé à crier et s’enlacer, cela a apporté un court sentiment de délivrance». «Le chemin que nous avons à parcourir pour tenter d’obtenir justice commence ici.» La police de Caroline du Sud n’a pas souhaité commenter l’affaire car l’enquête est toujours en cours.
Contexte pesant
Cet incident intervient dans un contexte déjà tendu et risque de raviver les tensions raciales aux États-Unis, déjà secoués par de nombreux cas d’hommes noirs abattus ou brutalisés par des policiers blancs. La mort début août à Ferguson (Missouri) d’un jeune Noir non armé, tué par un policier blanc, avait provoqué des manifestations dans tout le pays pour dénoncer les violences policières à l’encontre des Noirs. Le policier de Ferguson n’a finalement pas été poursuivi en justice, faute de preuves, mais le département de la Justice a publié un rapport accablant sur les pratiques racistes coutumières de la police et des responsables de la municipalité, dont plusieurs ont démissionné dans la foulée.
Le rapport était très attendu, les événements survenus à Ferguson, ajoutés à d’autres bavures policières, ayant attisé pendant des mois la colère de la communauté noire et des militants des droits civiques. Barack Obama, premier président noir des États-Unis, avait lui-même affirmé dans une interview à la radio que ce qui se passait à Ferguson «n’est pas un incident isolé». La Maison-Blanche avait alors recommandé que des changements en profondeur aient lieu au sein des forces de police américaines, pour améliorer les relations entre les minorités et les forces de l’ordre. Un bureau du ministère de la Justice dédié à l’amélioration des relations entre les policiers et la communauté noire (COPS) a notamment été créé.