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Endettement extérieur : une option qui se dessine

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Et voila que le débat sur le recours de l’Algérie à l’endettement extérieur refait à nouveau surface. Ce qui n’était, il y’a quelques mois, qu’une option à présager face à la crise entre autres solutions possibles, devient de plus en plus ce qui soit d’apparence aujourd’hui, une nécessité, imposée visiblement, au-delà du fait de l’amenuisement de la ressource publique, par le besoin de financer les investissements engagés par les grandes firmes nationales.
La dernière déclaration en date qui laisse croire à une telle option vient du ministre de l’Énergie, Salah Khebri, lequel, intervenant avant-hier sur les ondes de la Radio nationale a évoqué la possibilité pour Sonatrach de recourir aux financements étrangers à même de couvrir ses investissements. Pour le ministre, cette démarche, du reste «courante» chez les grandes compagnies pétrolières, pourrait être une voie de recours possible. Même s’il a souligné qu’en parallèle à ce choix, l’entreprise nationale pourrait s’appuyer également sur le partenariat. Le jour même, le PDG de Sonatrach, Amine Mazouzi, a fait savoir depuis Hassi Messaoud, wilaya d’Ouargla, que l’entreprise qu’il dirige depuis mai 2015 se projette vers une reprise de la production pétrolière après une dizaine d’années de décrochement. Un objet réalisable à la lumière des investissements, «mineurs» soient-ils, mais qui permettront selon lui d’optimiser les ressources en matière de pétrole et de gaz tout en misant sur la réduction des coûts de production. Des déclarations qui renseignent, on ne peut plus clair, que les pouvoirs publics ont l’intention de recourir au marché monétaire international dans le but de financer les projets inscrits à l’horizon 2030 et qui, somme toute, visent l’augmentation du niveau de la production. En dépit donc du recul des ressources financières à l’aune des cours pétroliers à l’échelle internationale, Khebri affirme que «nous n’avons pas le choix» et de justifier cet impératif dans la mesure où il y’a obligation d’augmenter les capacités de production en vue de satisfaire la demande locale en matière d’énergie qui va crescendo. En effet, en quinze ans, la consommation énergétique s’est multipliée presque par deux. Elle passe de 30 millions de tonnes équivalent pétrole (TEP) en 2000 à 58 millions de TEP en 2015, a souligné le ministre. L’envergure des projets annoncés justifie-t-elle pour autant le recours à l’endettement extérieur ? Si le gouvernement a tendance à aller vers cette direction, il n’en est pas de même de l’avis des experts et acteurs nationaux issus du domaine. D’où justement le débat qui enfle à l’heure actuelle. Entre le besoin de recourir aux financements extérieurs comme moyen d’augmenter la production à même de satisfaire la demande nationale et incertitude qui plane sur les marchés pétroliers, le dilemme quant au choix à prendre se pose avec acuité. Ceci, d’autant plus que ce n’est pas uniquement Sonatrach qui prévoit cette voie de recours. Il est bon de rappeler que même le groupe Sonelgaz n’exclut pas cette possibilité. à la mi-février dernier, le premier responsable de cette entreprise, Nourreddine Bouterfa, a exprimé un besoin «pressant» de faire appel aux créanciers internationaux pour le lancement «rapide» des projets devant être réalisés dans les délais requis, soit en 2018. Il a fait savoir que Sonelgaz a besoin de lever sur le marché international 1100 milliards de DA (environ 10 milliards de dollars), rien que ça. S’il est tout à fait normal pour un responsable d’une entreprise publique de formuler aux pouvoirs publics les besoins nécessaires aux investissements, il n’en demeure pas moins que la décision de recourir à l’endettement extérieur comme question stratégique par essence, relève exclusivement du pouvoir politique. Or, jusque là, hormis le gouvernement qui s’est exprimé à ce sujet via le Premier ministre, Abdelmalek Sellal, le dilemme reste entier quant à prendre cette piste ou la laisser définitivement, dès lors que les spécialistes de l’économie et de la finance ne cessent de mettre en garde contre l’impact d’une telle décision sur l’avenir du pays. En effet, Sellal qui a réuni les walis en fin août 2015, a affirmé que «dans le cas où nous serions obligés de recourir au marché financier international, et je ne pense pas qu’on le sera, le pays aura de fortes chances de bénéficier d’un prêt auprès du FMI (Fonds monétaire international)». Ceci, en arguant que l’Algérie est à l’aise, dès lors, a-t-il rappelé que 5 milliards de dollars ont été prêtés -une année auparavant- à cette institution monétaire. S’exprimant, hier, à ce sujet, sur le site d’information «TSA (Tout sur l’Algérie)», l’ancien gouverneur de la Banque d’Algérie, Abderrahmane Hadj-Nacer, a soutenu que choisir une telle piste nécessiterait l’implication des techniciens, des politiques et des sécuritaires et de les «faire réfléchir» sur cette question. Et au même économiste d’expliquer que «les techniques financières sont illimitées» comme pour dire qu’il y’a bien d’autres alternatives. Il en veut comme preuve, le recours à la syndication bancaire, aux divers emprunts obligataires, à l’épargne publique et le Trésor public comme ultime recours, a-t-il fait savoir. Enfin, il est tout aussi bon de souligner que même le ministre du Commerce, Bekhti Belaib, n’a pas exclut cette possibilité. à la mi-octobre 2015, il a révélé que l’Algérie pourrait contracter un prêt bancaire auprès de la Chine. En attendant la réaction des autorités compétentes, devant intervenir pour mettre la lumière sur les zones d’ombre qui entourent cette question, il est fort à parier que la polémique se poursuivra pour faire alimenter davantage le discours politique, au moment où les analyses des personnalités au fait du domaine battent d’emblée le plein.
Farid Guellil

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