Vendredi dernier, vingt-huit couples, toutes classes sociales confondues, ont convolé en justes noces à Igli lors d’un mariage collectif organisé par l’association caritative Takaful. Le mariage collectif, un phénomène social aux dimensions économiques et culturelles importantes, originaire de la vallée du M’zab, se pratique désormais dans la petite ville d’Igli, 165 km au sud de Béchar, où il est à sa 12e édition. Ali Boulanouar, le président de l’association caritative Takaful nous a invités à couvrir l’évènement qui s’est déroulé les 25, 26 et 27 mars. À notre arrivée à Igli, vendredi dernier à midi, toute la ville était en fête. Il y avait 28 mariages à célébrer collectivement. Pratiquement chaque famille glaouia avait un fils, une fille, un neveu, une nièce, un cousin, une cousine sinon plusieurs à la fois qui se marient ce jour-là. Boulanouar nous a assuré qu’à ce jour, l’association caritative Takaful qu’il préside a marié 376 couples en 12 éditions qui se sont déroulées en 9 ans. Il y a des années où selon la demande, nous organisons deux mariages collectifs. Nous programmons les cérémonies en fonction du calendrier des vacances scolaires afin de permettre aux familles glaouyate habitant loin de venir assister aux jours heureux des leurs et faire par la même occasion visiter leur ville d’origine à leurs enfants. Il nous a emmenés voir l’école où la veille le dîner collectif était organisé. Il y avait plus de 1 200 convives a-t-il assuré. Sur place, des jeunes s’affairaient au nettoyage des lieux. Il nous a demandé si nous voulions déjeuner avant ou après la prière du vendredi. Nous avons choisi de manger après la prière et nous nous sommes dirigés vers la grande mosquée pour faire les ablutions. La salle de prière était comble. Évidemment, il n’y avait pas seulement les habitants d’Igli. La leçon et le prêche du vendredi respectivement faits par un imam qui assure le programme religieux sur une chaîne de télévision privée ont porté sur les vertus du mariage, considéré à juste titre en Islam comme étant la moitié de la religion. Le premier a parlé du mariage comme étant la consécration des valeurs de stabilité et de solidarité sociale, ainsi que le rôle du couple dans la consolidation de la société musulmane et cité plusieurs hadiths et exemples dans la vie du Prophète et de ses compagnons. À la sortie de la mosquée, les prieurs avaient l’embarras du choix entre les maisons où ils devaient prendre le déjeuner. Il y en avait 28, faudrait-il le rappeler. Boulanouar nous attendait devant la porte d’entrée de la mosquée et nous a emmenés tout droit vers sa maison. Il avait deux frères qui se marient ce jour. Les deux salles étaient pleines d’invités. On se met à cinq par table. Trois adolescents se sont attablés avec nous. Le premier venait de Ben Aknoun à Alger, le second d’Aïn El-Beidha à Oran et le troisième était d’Igli. « Vous êtes venus en excursion, leur avons nous demandé ? ». « Non, nous sommes de la même famille. Nous venons ici chaque année à la même période pour assister aux mariages ». Le repas servi comprenait soupe de semoule d’orge très aromatisée de condiments, un hors-d’œuvre, une salade verte, un tadjine hlou, des petits pois et frites garnis de viande, des oranges et enfin des pommes au dessert et de la limonade comme boisson. Un thé était servi après le repas. Nous sommes sortis avant le thé pour pouvoir profiter du peu de temps qui nous reste avant la prière du Asr pour aller dans la palmeraie prendre les photos des dommages causés par les dernières intempéries et recueillir les doléances des victimes de ce sinistre qui a frappé la région. Après la prière du Asr, l’imam de la grande mosquée a demandé aux parents et représentants des futurs mariés de se présenter aux premiers rangs avec les actes de mariage et le Sadak fixé à 5 000 DA. Après vérification des documents fournis, l’imam prononça le rituel religieux de la Fatiha pour marier chacun des couples dont les noms et prénoms des pères étaient annoncés haut et clair pour être entendus par tous les présents à cette cérémonie. Les futurs mariés ou sultans du jour qui se tenaient à l’écart dans une salle attenante sont entrés en file indienne dans la salle de prière et ont pris place sur des chaises face à l’assistance. Leurs vizirs se sont mis debout derrière eux. Chacun tenait de la main droite un foulard accroché à un bâton et de la main droite un couffin contenant des effets vestimentaires et un khidous, burnous noir en feutre. L’imam annonce le début de la cérémonie du Lbas, habillement, et demande à l’assistance de réciter la Borda. Selon la tradition locale, le nouveau marié doit être habillé par son vizir devant l’assistance. Cette cérémonie d’habillage est la partie la plus attractive que chacun se garde de manquer durant un mariage.
L’APC d’Igly a offert des présents à chaque marié et une félicitation joliment encadrée par les photographies des 28 mariés en ce jour. Les jeunes mariés avaient peine à sortir de la salle de prière tant les gens se pressaient pour les féliciter. Ils se sont regroupés dans la cour pour une photo commune. Devant le portail de la mosquée, 28 voitures étaient en stationnement. Chacune d’elles devait prendre un des mariés à bord. Les gendarmes étaient là pour mettre de l’ordre et conseiller aux conducteurs de respecter les distances entre les véhicules. Le grand cortège avec en tête un véhicule transportant une troupe folklorique a commencé à déambuler dans toutes les rues de la ville. Il est allé jusqu’à Mazzer, un village situé à une vingtaine de km.Nous sommes allés prendre du thé chez un caméraman de l’ENTV. Après la prière du Maghreb, nous nous sommes dirigés vers le siège de l’APC où le P/APC nous attendait pour nous honorer à notre tour. À 2 km de la sortie nord d’Igli, nous avons croisé le cortège qui rentrait en ville.
Messaoud Ahmed