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ALORS QU’OUYAHIA ANNONCE LA MISE EN PLACE DE L’ACADÉMIE DE LA LANGUE AMAZIGHE : Une guerre de suprématie de langues menace de diviser la société

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L’académie algérienne de la langue amazighe sera mise en place avant la fin de l’année en cours ; c’est ce qu’a annoncé le chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia, qui a, par la même occasion précisé que le Haut-commissariat à l’Amazighité (HCA) poursuivra normalement sa mission.

Appelant à encourager l’édition d’ouvrages en tamazight pour la promouvoir et la rendre accessible, le Premier ministre a déploré l’utilisation de la question de tamazight à des fins de manipulation alors que « le ministère de l’Éducation nationale a entrepris et continu de le faire, des efforts méritoires à l’effet d’élargir l’enseignement de la langue amazighe à travers 30 wilayas du pays » devait -il expliquer et d’ajouter que « la loi organique relative à la création de l’Académie algérienne de la langue amazighe, adoptée en juin dernier par le Parlement, vise à doter la langue amazighe des outils nécessaires à sa promotion et à son développement ».
Il a précisé que le rôle de cette académie consiste à recueillir le corpus national de la langue amazighe dans toutes ses variétés linguistiques, d’établir la normalisation de la langue amazighe à tous les niveaux de description et d’analyse linguistique, et d’élaborer un dictionnaire référentiel de cette langue.
Sur le plan organisationnel, Ouyahia a souligné que la composition de l’Académie est fixée à 50 membres au plus, choisis parmi les experts et compétences avérés dans les domaines des sciences du langage et en rapport avec la langue amazighe et les sciences connexes. L’Académie disposera d’un Conseil, d’un Président, d’un Bureau et de Commissions spécialisées.

Tamazight, patrimoine national unificateur, utilisé à des fins de discorde et de discrimination
Tout avait commencé lorsqu’à Jijel, des parents d’élèves avaient observé un sit-in en septembre dernier contre l’enseignement obligatoire de tamazight, contre-action, des collégiens et des lycéens avaient boycotté, pendant plusieurs jours, les cours de langue arabe en Kabylie. L’histoire dérive vers ce que l’on peut qualifier de mouvement de boycott des deux langues nationales, ce qui est de nature à assener un sérieux coup à la cohésion sociale et à l’unité territoriale du pays. C’est qu’au fond, dans l’imaginaire de l’Algérien, la langue est systématiquement liée à l’identité. Mais qu’en est-il en réalité ? Commençant tout d’abord par définir ce qu’est une identité ?
Tout d’abord, il est utile de préciser que le débat sur l’identité nationale porte sur une expression qui est très mal formée. En effet, le terme identité a été utilisé à l’époque de Moïse, lorsque Dieu dit « je suis Dieu », dans la version coranique, et par « je suis celui qui est, celui qui sera » dans la version chrétienne. Donc l’identité se définie comme « Moi » ; qui suis-je ? je suis, « je » exclusivement Je. Considérant la carte de l’identité d’un être soit sa nationalité. On y trouve inscrits ; le nom le prénom, la date et le lieu de naissance, l’adresse et la nationalité. On n’y trouve ni religion, ni la langue parlée. Or ; lorsqu’on prend l’adresse par exemple, l’être considéré n’est pas propre adresse. Par exemple un certain Omar ou un Akli qui habite telle localité, ville ou village. En réalité, Omar ou Akli n’est pas cette localité, ville ou village. Il est celui qui appartient à la communauté qui habite cette ville. Ce même Omar ou Akli n’est pas son propre âge, il appartient à la communauté des gens qui sont nés sous la même date de naissance. De même qu’il n’est pas le premier algérien pour prétendre être le seul algérien, en revanche il appartient à la communauté qui s’appelle Algériens. Donc il n’y a pas d’identité mais il y a appartenance. Donc nation veut dire appartenir à une nation, par conséquent c’est faute de logique puisque l’identité c’est trois petits signes (≡) qui signifie : équivaut à et appartenance (€) qui veut dire appartenir à. En plus d’être une erreur de logique, il s’agit d’un crime. Parce que si on confond appartenance et identité c’est la définition même du racisme. Car si l’on dit ; tu es musulman, chrétien, juif ou autre, on dit tu es alors qu’en fait, il fallait dire appartient au peuple musulman, chrétien …par conséquent, la confusion de l’identité et de l’appartenance est premièrement une erreur logique et deuxièmement un crime politique. Il en ressort que le débat sur l’identité est définitivement clos depuis que l’homme a atteint ce niveau de développement intellectuel qui est le notre ; il est démontrable-ment terminé.

De la langue
Le débat a été porté, ces derniers temps, sur la question de la suprématie de l’une des langues officielles et nationales à savoir l’Arabe et Tamazight. Afin d’y répondre commençons tout d’abord par définir ce qu’est une langue.
Prenant un exemple ; en 1914 à la veille du premier conflit mondial, 51% des Français parlaient alsacien, picard, breton, basque, Languedoc, franco-provençal ou corse. Il a fallu donc former des brigades, des bataillons et des corps d’armées commandés par des officiers locuteurs de ces langues régionales pour que les paysans fantassins puissent les comprendre et y obéissent. Voilà donc à peine un siècle, la langue française n’était pas majoritaire dans le territoire français. Cent ans après, la situation s’est complètement retournée.
Pourquoi ce changement foudroyant ?, comment s’est-il produit ? Première raison, l’abominable boucherie de1914, a tué des millions de paysans fantassins qui étaient les locuteurs de ces langues régionales. Au cours des décennies suivantes, la baisse du nombre des paysans fut telle qu’aujourd’hui en France, le nombre des paysans est égal à 0,8% de la population globale, alors qu’il était au début du 20e siècle de beaucoup plus que la moitié (+ 52%). Du coup, ces langues régionales ont disparu ou ont beaucoup baissé faute de locuteurs. Faute de locuteurs c’est sûr mais aussi, le monde rural ces habitudes, ces outils, ces objets ont tellement disparu que ces langues ne désignaient plus d’objets réels et présents.
Dès lors, devant cette déroute, des militants de très bonne volonté ont voulu conserver ces langues régionales ou les sauver en initiant des enseignements dans le secondaire et le supérieur de ces langues régionales mais cependant cet enseignement n’a pas pu enrailler leur inévitable et long affaissement.
J’en trouve personnellement une raison, peut-être paradoxale, c’est que ces enseignements de ces langues régionales dans le secondaire et le supérieur ont été proposées par des gens de lettres. Or les gens, les classes et les départements des lettres et des sciences humaines font apprendre la langue des hommes, la langue des relations humaines, on n’y apprend pas la langue des objets. Et la question qui s’impose : fallait-il enseigner ces langues dans les départements de sciences pour qu’elles (ces langues), puissent dire, pour continuer à survivre, des mots tels que : tétraèdre, boson de higgs ou ATP triphosphate. Voilà donc posé par la question de la vie et de la mort de la langue, la question du rapport entre la langue et la science.
Qu’est ce qu’une langue vivante ? La réponse que j’ose donner volontiers à cette question ; c’est qu’une langue vivante est une puissance, je prends ici ce mot puissance en sens de potentiel, de la capacité ; ceci dit une langue vivante a le pouvoir de tout dire, elle prétend tout dire, elle peut dire l’agriculture, la géométrie, la médecine, la poésie, la pitié, la religion, l’extase, le paysage, la mer, la montagne, l’amour, les émotions, le visible, l’invisible, le tangible, l’intangible, l’abstrait, le concret, les poissons, les outils, les concepts abstraits.
Il n’y a pas un lieu du monde ; il n’y a pas une attitude, une action d’un être vivant, il n’y a pas une relation humaine où elle (la langue vivante) n’ait pas son mot à dire, où elle n’est pas sans verbe à glisser. Elle se glisse partout comme l’air et l’eau, elle est dans la rigueur mathématicienne comme dans la précision métrique des sciences expérimentales. Elle est partout. C’est une puissance ; une langue est d’autant plus vivante elle peut tout dire.
Inversement, une langue qui n’exprimerait que l’une des régions citées en haut est entrain de mourir en perdant ces locuteurs. Elle ne peut plus dire telle chose, la mer, un tel concept géométrique, ou telle réalité biochimique. D’ailleurs, de ces langues-là, les Corses ont eux aussi assisté au long affaissement historique de la célèbre lingua-franca était la langue séculaire des commerces et des échanges maritimes et commerciaux à travers la méditerranée pendant plusieurs siècles.
Donc revenons encore une fois pour s’interroger : qu’est ce qu’une langue vivante ? ; C’est une langue qui a le pouvoir, la capacité de tout dire ou mieux encore : elle a la capacité et le pouvoir de dire ce qu’elle ne sait pas dire encore. De créer, c’est-à-dire de trouver des inventions, des découvertes des trouvailles, d’improviser et de créer des néologismes, de s’adapter à des nouveautés, d’être ouverte à l’inattendu, à l’imprévisible. Une langue vivante est d’autant plus vivante dès lors qu’elle est créatrice, c’est-à-dire qu’elle a la puissance de dire ce qu’elle ne sait pas encore dire et une langue où l’on ne créerait plus serait déjà une langue morte. Une langue n’est pas, elle peut. Elle peut créer, se glisser de faire émerger des inventions imprévisibles ou des nouveautés imprédictibles.
Les linguistes définissent la langue par quelques choses qui permet l’échange entre les êtres humains, à la vie sociale, politique, médiatique et relationnelle ; c’est à dire comme de simples outils de communication. Or ceci n’est pas vrai, parce qu’elle est supposée être aussi la langue des choses elle est aussi formatrice de notre existence personnelle, charnelle, spirituel le et donc de notre destin humain.

La langue est un iceberg
On pourrait comparer la langue à un iceberg, cet iceberg est plongé dans la mer et ne dépasse de la surface de l’eau qu’une petite partie de sa masse totale. Ce qui émerge de la langue c’est ce qu’on appelle l’usage.
Par exemple (l’usage), dit je vais prendre corde pour lier un bouquet de fleurs, un marin sait qu’une corde y en a jamais à bord d’un bateau. Il y a des aussières, des bitords, mille sortes de câbles. Ainsi le mot corde est rentré dans l’usage mais il ne veut rien dire pour un métier qui utilise justement les cordages. Un charpentier qui fabrique des fermes n’utilise jamais le mot poutre, il sait ce que c’est qu’un arbalétrier, un botaniste ou un fleuriste n’utilise pas le mot fleur, il sait ce que c’est qu’une violette, une campanule, un arome, un lys, …
Il y a les mots d’usage, polysémiques qui expriment des choses abstraites, qui sont la partie visible de l’iceberg et les mots propres monosémiques qui parlent du concret et ce genre de mots se placent toujours en ligne de flottaison. Donc une langue a une partie visible de l’iceberg qui est la langue d’usage, et en dessous ; se trouvent la langue des biologistes, des médecins… enfin la langue des gens spécialisés. Et la langue devient la somme de ces idiolectes. Donc une langue est d’autant plus vivante qu’elle a énormément d’idiolectes dans sa partie submergée. Le langage d’usage étant illettré c’est-à-dire qu’il n’utilise pas les idiolectes donc les mots qui parlent des choses du concret.
Zacharie S Loutari

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