Tout porte à croire qu’un nouvel échiquier politique est cours de configuration, à la faveur des échéances électorales à venir. le naufrage consommé des formations politiques disqualifiées par le peuple mais gardent leur emprise sur les assemblées élues annonce en clair des changements de fond, en phase avec les desiderata citoyennes. Abdelhamid Larbi-Cherif, à la tête d’une formation politique en gestation, en parle ici sans tabous ni faux-fuyants. Peut-être incarne-t-il la voix de la voie nouvelle…
Le Courrier d’Algérie : À quelle logique répond cette décision d’ajouter une pierre à l’édifice politique algérien ? Êtes-vous de ceux qui pensent que les actuels acteurs et leaders politiques ont échoué dans leur mission, et qu’il faut donc aller vers une reconfiguration totale du futur échiquier politique ?
Abdelhamid Larbi-Chérif : Oui l’annonce de la création d’un parti politique a été faite. Le parti est l’Alliance national pour le changement ANC. La procédure est loin d’être simple, d’une part les exigences du ministère de l’Intérieur, et d’autre part l’organisation de la base. Avoir un rendez-vous pour le dépôt du dossier est aussi une tâche difficile.
Pour nous une formation politique doit avoir une base militante, un programme et une organisation. On a terminé les différentes étapes. Un programme qui est issue d’une vision pragmatique et des objectifs clairement définis a été réalisé. On est présents dans plus de 44 wilayas et plus de 37 % des communes. Mais, ce n’est pas une mission facile. La demande a été formulée, les dossiers sont prêts, mais avec la propagation de cette pandémie de Covid-19 on est à l’arrêt.
Vous avez fait partie des acteurs et analystes politiques qui soutenaient l’élection présidentielle du 12 décembre passé, parce que c’était un scrutin libre et ouvert, et qu’aucun candidat en lice ne partait gagnant d’avance. Estimez-vous que la suite des évènements vous a donné raison ?
Le peuple via le hirak a réclamé le changement et les partis politiques n’étaient pas en mesure de le représenter. Durant le mois de janvier dernier par un samedi j’ai reçu la visite d’une cinquantaine de personnes représentant 32 wilayas qui me demandaient de créer un parti politique pour, à ma grande surprise, me réclamer comme leader, j’ai refusé mais après obstination j’ai cédé. Le peuple cherche un sang nouveau pour la construction d’une Algérie prospère pour réaliser le rêve des pères fondateurs.
C’est le peuple seul qui décidera de la configuration prochaine de la carte politique en Algérie ; le pays a besoin d’une classe politique qui sera en mesure de répondre à ses aspirations. Le peuple a connu des déceptions et des trahisons. Pour les acteurs et formations politiques, j’estime qu’ils seront obligés de revoir leurs stratégies et approches et comme je l’ai dit, c’est le peuple seul qui jugera.
Que pensez-vous du bilan de ce premier mandat du président Tebboune ?
Oui, je suis satisfait des résultats qui sont là pour confirmer la bataille rude à laquelle j’ai pris part pour sauver le pays du chaos et l’effondrement de l’État. Les élections du 12 décembre qui étaient une première en Algérie libre démocratique et le peuple qui a choisi et a voté massivement, le score de 40 % et sans fraude est très important, si en compare avec les USA où le président est élu avec 35 % et la France avec 24%, nous avons relevé un grand défi, aujourd’hui l’Algérie a un président, Abdelmadjid Tebboune, qui jouit d’une grande confiance et doté d’une force et légitimité populaire. Le président Abdelmadjid Tebboune est le résultat d’un choix d’un peuple souverain et fier.
On voit que le chef de l’État tient a son agenda politique. Êtes-vous pour la dissolution de l’APN et la tenue d’élections législatives anticipées ?
Difficile de porter un jugement objectif sur une courte durée, sans oublier que le président a pris les commande dans une situation très difficile, en plus le départ de feu le général Ahmed Gaid Salah a rendu la tâche difficile, ajouté la propagation de la pandémie du Covid-19 et la chute des prix du pétrole. Le président a une volonté et œuvre pour sortir le pays de l’impasse ; il a un grand chantier qui est ouvert je lui souhaite comme tout Algérien noble la réussite parce que sa réussite sera bénéfique pour l’Algérie et les Algériens.
Comment voyez-vous le futur échiquier politique à la faveur de la faillite consommée de la famille dite nationaliste, représentée notamment par le FLN et le RND ?
Le changement est le souhait de tous les Algériens, le peuple a voté pour le programme du président, les élections législatives seront une phase importante du changement après le projet de la constitution l’Algérie se dirige vers un changement profond et celui qui n’a pas compris risque de perdre la boussole.
En cas de tenue d’élections propres et honnêtes, comme on dit, y a-t-il risque que la mouvance islamiste remporte la mise ?
Une nouvelle carte politique sera au rendez-vous et les nationalistes seront présents ; le changement n’épargne aucune tendance l’Algérie après le hirak du 22 est une autre, en plus il faut comprendre que les anciennes pratiques seront bannies par le peuple. Les tendances politiques seront dans l’obligation de revoir leurs stratégies et leurs programmes, nous seront au rendez-vous de l’innovation et de la modernité, un peuple qui est composé en grande partie de jeunesse instruite et qui réclame le changement je pense qu’il faut être à la hauteur.
Quelles sont vos propositions concernant le contenu de la future Constitution ? êtes-vous pour un régime parlementaire ou bien semi-présidentiel ?
Avant, il faut comprendre que les courants islamistes ont évolué et sont mûres, rien à voir avec ceux des années précédentes, la majorité des partis islamistes ont revu leurs convictions. Le discours a nettement changé, une évolution vers le nationalisme et le patriotisme et l’exemple de la formation politique de M. Abdelkader BENGRINA est plus patriotique et je pense que les résultats du 12 décembre ont donné une lecture réelle de la scène politique, reste que certaines formations qui avaient un prolongement internationale sont en train de perdre l’intérieur. Je pense que l’évolution sera vers la concurrence pour la prospérité de l’Algérie que pour les idiologies qui sont dépassées et consommées sans résultat.
Cette pandémie a rebattu les cartes de la géostratégie planétaire, et mis en berne les économies de tous les pays, à commencer par celle de l’Algérie. À votre avis, est-ce que notre pays a correctement géré cette crise subite et aiguë ? Que faire à présent pour remonter la pente ?
Plutôt pour un régime présidentiel avec une vraie séparation des pouvoirs. Un pays comme l’Algérie en phase de transition et changement profond le régime présidentiel est le meilleurs choix pour gagner du temps et traverser cette phase sans perdre de temps.
Dans le même ordre d’idées, comment relancer notre économie en berne ?
la pandémie annonce une nouvelle ère, le monde après le Covid-19 sera différent. La gestion sage de la crise est plus que recommandée. Notre économie est fragile, je pense que l’occasion est présente pour revoir nos choix économiques et aller vers une économie de marché avec une vision sociale. Il faut opter pour que l’Algérie soit un des plus grands marchés émergents de l’Afrique ; on a des potentialités, position géographique, une jeunesse formée… le moment est propice pour un démarrage et un lancement économique pour faire face au phénomène du chômage, et pour la prospérité du pays. La révision de l’Accord d’association avec l’Union européenne qui est défavorable pour l’Algérie est une urgence
La chute des prix du pétrole nous encourage à voir d’autres options, une économie hors les énergies fossiles. Revoir les banques, il faut passer par un profond changement dans la gestion des finances et des banques pour qu’elles soient à la hauteur de la renlance économique.
Que pensez-vous des procès spectaculaires des oligarques ? Que suggérez-vous pour récupérer les sommes colossales détournées, à commencer par celles qui sont cachées à l’étranger ?
L’Algérie a été victime d’une grande opération de hold-up organisé. Je pense que la révision des procédures en premier lieu et la redynamisation de l’activité des Affaires étrangères nos représentations à l’étranger doivent être impliquées et avoir des idées novatrices pour récupérer les sommes volées.
Est-il nécessaire que le président Tebboune soit renforcé par le soutien d’un parti politique pour mener à bien son programme électoral, ou bien le soutien du mouvement associatif et de la société civile lui sera-t-il suffisant ?
Je pense que le temps des partis de soutien est révolu ; aujourd’hui on est en face d’une nouvelle ère, l’action de militantisme aura un sens et le combat politique sera au rendez-vous, le changement est en cours.
Avoir un programme solide qui débouchera sur des résultats sera le garant de la réussite.
Propos recueillis par Mohamed Abdoun