Les étudiants, indifférents, semble-t-il à l’appel au dialogue et aux consultations politiques initiés par le président Tebboune, ont défilé hier pour un 48e acte de mobilisation, en réclamant la satisfaction des revendications populaires et la libération de tous les détenus du Hirak.
La mobilisation a été plus forte par rapport au mardi dernier. La fin de la période d’examen mais aussi pour faire le poids pour éviter une fin dramatique comme celle de la marche précédente, a fait que les étudiants, rejoints aussi par des citoyens lambda de tous bords, adhèrent avec force à la manifestation. Cette fois-ci, même avec un dispositif toujours renforcé, aucun incident ou interpellation n’ont été enregistrés. Insistant sur l’occupation de la rue, les étudiants ont maintenu leur agenda intact, faisant clairement savoir qu’ « aucun dialogue ne peut être établi avec le pouvoir sans la libération de tous les détenus ». Aux environs de 11H, après avoir entonné l’hymne national, les manifestants ont crié durant tout l’itinéraire de de la marche: « Dawla madanya, machi 3askarya ! », (État civil et non pas militaire !), « 9olna L3issaba Truh ! 9olna L3issaba Truh ! Ya H’na, Ya Ntouma ! », (On a dit que la bande parte ! Soit nous, Soit vous !), « Cha3b Masdar Kul Solta ! », (Le peuple est source de tout pouvoir !). Dénonçant les déclarations de responsables de partis sur le Hirak et les tentatives d’introduire des « batadjia » parmi les manifestants, les étudiants ont insisté sur le caractère pacifique de leur mouvement. Et ils ont promis de poursuivre sur la même voie : « W Nkamlou Fiha Ghir B Sylmia ! », (Nous poursuivrons notre action pacifiquement !), « Sanowassilo Lkifah ! », (Nous poursuivrons notre combat !), ont-ils scandé. Un quadragénaire a soulevé cette pancarte : « Le Hirak acte III. La révolution pacifique continue jusqu’au bout ! ». Un nouveau chant a fait hier son apparition : « Ô, Ya 3li, Wladak Mahoumch Habssine, W 3la L’horya Rahoum M3awline ! », (Ô Ali ! Tes enfants ne sont pas prêts à abandonner le combat ! Pour arracher leur liberté, ils sont déterminés ! ». « Les étudiants sont sur le cœur d’un seul moudjahid », lit-on sur une pancarte, une manière pour dénoncer les informations rapportées ces derniers jours sur des divergences d’idées qui frapperaient les rangs des Hirakistes. « Ce n’est pas du tout ce qui se passe à l’intérieur ou à l’extérieur du Hirak. Les confrontations et les actes de violence sont la conséquence des tentatives d’interférence et de récupération, comme le prétendent certains. Mais ce sont les pratiques du pouvoir qui alimentent ces divisions ! », scande une manifestante dans le premier carré de la marche. « Certains veulent que la fin de notre Hirak soit empreinte d’une mauvaise réputation pour entacher sa mémoire, afin de laisser une mauvaise impression chez les Algériens : Non à la violence, notre Hirak se poursuivra ! », écrit une autre étudiante.
Une fleur blanche en signe de paix
Parmi les nombreux citoyens qui ont adhéré à la marche des étudiants, l’on remarque une femme qui a soulevé simplement une fleur blanche, signe de paix et de pacifisme, dont le Mouvement populaire a toujours fait sienne cette qualité. Un autre manifestant a brandi une pancarte en rouge : « Non au racisme ! ». L’une des revendications principales depuis des mois, les manifestants ont brandi des portraits des étudiants et autres détenus d’opinion, réclamant leur libération immédiate. Les portraits de détenus, tels que ceux de Karim Tabbou, ont été très présents hier, alors que, la veille, la Justice a décidé de prolonger de quatre mois supplémentaires son mandat de dépôt à la prison de Koléa (Tipasa). Les manifestants ont dénoncé des « procès politiques » et crié : « Libérez la Justice et les médias ! », « Harirou Al-Mo3ta9aline, Harirou Al 3adala, Harirou Al-I3lam, Harirou Al-3assima! », (Libérez les détenus ! libérez la Justice ! libérez les médias ! libérez la capitale ! »
Une pancarte affichait : « Transition politique pour une deuxième république ! ». En passant devant le bureau de l’UNEA (Union nationale des étudiants algériens) – organisation réputée proche depuis longtemps des partis au pouvoir -, sis à l’avenue Colonel Amirouche, les étudiants ont crié des slogans hostiles à cette organisation « satellitaire » et ses semblables, en scandant : « Les organisations ne nous représentent pas ! » À la fin de la marche, vers 14H, en arrivant à la place Maurice Audin, où, la semaine passée, la marche a été réprimée, les étudiants ont scandé, défiant : « La Ro3b ! La Khawf ! Chari3 Milk Li Cha3b ! », (Ni peur, ni terreur. La rue est au peuple !). Le rassemblement s’est terminé sur les chants de Kassamane avant de se disperser dans le calme.
Hamid Mecheri