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10 Cloverfield Lane : l’art de garder le secret sur un film en 2016

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J. J. Abrams a surpris tout le monde avec l’annonce de sa « suite » de Cloverfield. Retour sur sa conception mystérieuse.

«Quand la bande-annonce de Cloverfield est sortie (de nulle part), tout le monde a été surpris, expliquait J. J. Abrams à Empire fin février. On a voulu refaire ça avec 10 Cloverfield Lane… On s’est dit que ce serait fun d’intriguer une nouvelle fois le public de cette manière ».
Avant le 15 janvier dernier, le projet n’avait en effet pas de titre officiel et personne n’avait fait le liens avec Cloverfield, même s’il était produit par Bad Robot et la Paramount, comme son « aîné ». A partir de cette date, le studio l’a nommé, l’a teasé à l’aide d’un trailer alléchant et lui a donné une date de sortie très proche (pour les critères hollywoodiens) : mi-mars 2016, soit deux mois seulement après la mise en ligne de la première vidéo. Une surprise rafraîchissante à l’heure où les spoilers pleuvent sur le web. Comment l’équipe a-t-elle réussi à garder le secret ? Eléments de réponse, moins d’une semaine avant sa sortie.

L’exemple de Cloverfield
A l’été 2007, la promotion virale de Cloverfield démarrait en parallèle de son tournage, sans que le titre du film n’apparaisse sur l’affiche ou les courts teasers dévoilés au compte-goutte par J.J., alors surtout connu comme « le créateur de Lost ». Ces montages mystérieux apparaissaient sur la toile via différents sites qui n’avaient a priori aucun rapport avec le cinéma, comme 1-08-08.com ou Tagruato pour piquer la curiosité les internautes. Personne n’attendait ce film, mais en quelques semaines, ces courtes vidéos montrant des scènes de panique à New York filmées caméra à la main ont fait le « buzz » sur la toile. La mise en scène était celle utilisée dans le film de Matt Reeves, mais ça, le public n’allait le découvrir que quelques mois plus tard, en novembre exactement, au moment de la mise en ligne de la véritable bande-annonce de Cloverfield, dans laquelle le titre du projet fut enfin dévoilé.
Cloverfield a été mis en scène par un réalisateur aussi méconnu que ses comédiens à l’époque, même si Lizzy Caplan et T. J. Miller ont percé depuis. Pendant longtemps, le véritable titre du long-métrage fut gardé secret et ses noms de code ne cessaient de changer, de Cheese à Clover en passant par 1-18-08, comme pour le site internet, ce qui correspond à sa date de sortie américaine. Une rumeur étonnante a même couru autour d’une adaptation de L’Appel de Cthulhu de Lovecraft…
Fort de cette promotion originale, Cloverfield a connu un certain succès durant l’hiver 2008, rapportant 170 millions de dollars dans le monde pour moins de 30 millions de budget officiel, et J. J. Abrams est devenu le maître des promotions mystérieuses. De Super 8 à Star Wars 7, il a su garder ses histoires secrètes, intrigant les spectateurs avec des teasers alléchants, qui posaient plus de questions qu’ils ne donnaient de réponses (il y a tout de même un gros bémol avec la promotion de Star Trek 2, qui tentait de protéger l’identité du méchant, alors qu’elle avait rapidement été devinée par les fans de la saga).

Comment renouveler l’exploit sept ans plus tard ?
Si Cloverfield « sortait de nulle part », pour reprendre la formule du producteur, comment garder la surprise autour d’une potentielle suite ? L’idée a évidemment été évoquée juste après le succès du premier volet. J. J. Abrams semblait partant, mais ne lançait jamais rien de concret pour autant, pendant que Matt Reeves s’attaquait à d’autres projets : Laisse-moi entrer, sorti en 2010, La Planète des Singes 2, en 2014… L’agenda du producteur étant très chargé (Super 8, les Star Trek et Mission : Impossible au cinéma, les séries Almost Human, Person of Interest etc.), impossible de deviner que l’un de ses projets allait devenir le « nouveau Cloverfield ».
Sans compter que sept ans après le « buzz » initial, la technique avait été reprise de nombreuses fois à Hollywood. Les spectateurs étant habitués aux promotions de ce type, il semblait plus difficile de les surprendre. Pourtant, Bad Robot a suivi quasiment le même modèle. Le tournage s’est déroulé en fin d’année 2014, pour un coût estimé à 5 millions de dollars. Si certains ont fait le rapprochement avec le petit budget de Cloverfield, personne n’a pensé qu’il pouvait s’agir d’une suite, d’un préquel ou d’un spin-off, puisque son synopsis annonçait un huis clos à des années lumières du film de monstres hyper-dynamique de Matt Reeves : « Après un accident de voiture, une jeune femme est recueillie par deux hommes dans un abri, mais elle ne doit pas sortir, car l’air a été polué par une attaque chimique. »
Comme son aîné, 10 Cloverfield Lane a d’abord eu des faux titres (The Cellar lors du tournage, puis Valencia, en 2015). Lui aussi a été mis en scène par un réalisateur méconnu, Dan Trachtenberg, révélé par le court-métrage Portal : No Escape.
En revanche, sa distribution est plus célèbre que celle du film original, et cela aurait pu attirer l’attention au point de gâcher l’effet de surprise : John Goodman, qu’on ne présente plus, donne la réplique à Mary Elizabeth Winstead (Scott Pilgrim) et John Gallagher Jr (la série The Newsroom). Qui dit acteurs connus, dit acteurs en promo, et la production a logiquement demandé au trio d’en dire le moins possible sur le film. Ils ne devaient surtout pas évoquer Cloverfield ! Encore plus fort : un acteur récemment oscarisé a participé au projet, sans que cela ne filtre nulle part avant les premières projections américaines.

Suite ? Préquel ? Spin-off ?
Résultat, moins d’une semaine avant sa sortie, les futurs spectateurs ne savent toujours pas à quoi s’attendre. Qu’est-ce que 10 Cloverfield Lane, au juste ? A première vue, son intrigue n’a rien à voir avec celle du long-métrage de 2008. Mais avec un titre pareil, il y a forcément un lien, non ? Toute la promo de Bad Robot repose sur cette question, mais même depuis que la bande-annonce est tombée, l’équipe fait bien attention à ne pas parler de « suite ». « Si ça ne s’appelle pas Cloverfield 2, c’est qu’il y a une bonne raison, jure J.J. Il est très différent du film de Matt Reeves, même s’il est producteur exécutif du projet, tout comme Drew Goddard (le scénariste de Cloverfield, ndlr). (…) C’est une histoire originale, qui est connectée spirituellement à Cloverfield. » S’il refuse de parler de « saga », il laisse entendre qu’un troisième épisode est à l’étude et qu’il fera le lien entre celui sorti il y a huit ans et celui qui s’apprête à envahir les salles de cinéma. Dans les premières critiques américaines, qui sont tombées cette semaine, on retrouve également l’idée d’un projet qui « partage l’ADN de Cloverfield » sans être pour autant sa suite directe. En attendant sa sortie, les internautes peuvent toujours essayer de percer les mystères de sa bande-annonce. Comme pour Cloverfield, Bad Robot a créé de faux sites donnant des indices sur le film. Notamment un qui retrace le parcours du personnage de John Goodman. Révèle-t-il des éléments importants du film ou s’agit-il d’une fausse piste ? Réponse au cinéma mercredi.

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