On le sait tous, le phénomène de la violence s’accroît de plus en plus, et ne cesse de prendre de l’ampleur, n’épargnant aucune frange de notre société. Le rôle de la presse algérienne dans la lutte contre ce phénomène a longtemps été mis en exergue. Néanmoins, cette presse n’a tendance à parler de la violence qu’à l’occasion de grands événements.
Bien évidemment de l’avis des spécialistes, on ne doit pas attendre le 8 mars ou le 1er juin, pour essayer de mettre à nu le fléau. L’usage de la force est devenu monnaie courante dans la gestion des affaires publiques et les interactions sociales. Par ailleurs, il suffit de se rappeler des dernières images d’un enfant maltraité par des adultes et agressé par un chien, diffusées sur les télévisions et les réseaux sociaux, ayant choqué plus d’un. Autre signe de l’ampleur de la violence en Algérie, est les chiffres fournis par la DGSN à ce sujet. En effet, rien qu’au premier trimestre de 2015, 1 300 enfants ont été victimes de violences, 20 autres ont été enlevés. Quant à l’année 2014, les chiffres sont bien plus choquants. En effet, la DGSN évoque 6 015 cas de violence à l’encontre de cette frange «fragile» de la société. Les chiffres en question, révélés, hier, sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, ont été largement commentés par Mme Houria Ahcen-Djeballah, professeur en psychologie à l’université de Bouzaréah. Pour elle, «ces chiffres ne sont qu’une partie visible de l’iceberg. Les violences sont exercées dans l’environnement direct de l’enfant, soit la famille. Elles sont extrêmement répandues, or, l’on a souvent tendance à ne pas diffuser et ébruiter ces violences, pour des raisons de mœurs».
La société algérienne traumatisée par la décennie noire
C’est un fait véridique : ce n’est pas parce qu’on occulte ce qui s’est réellement passé que le mal disparaît ou cesse d’exister… La violence actuelle est due à la Décennie noire. Après la terreur et la peur, la société est aujourd’hui traumatisée.
Cette approche a été soutenue par l’hôte de la Radio algérienne. Selon elle, la question de la violence doit se poser avec acuité. Elle explique le phénomène par la dure période qu’a traversée l’Algérie durant les années 90. «La société algérienne a eu à subir, et à être traumatisée par la violence, chaque événement violent contribue à revivifier le souvenir de celle-ci, a-t-elle déclaré à cet égard. «La violence a pris de l’ampleur dans notre société et l’on ne peut le nier. Cette violence a plusieurs causes, et il est temps de définir si l’on a envie d’y remédier», a reconnu Mme Ahcen-Djeballah, notant dans la foulée que pour bon nombre d’Algériens, tout simplement, la violence est le meilleur moyen de se faire respecter. De même, l’invitée de la Chaîne III a indiqué que «la société algérienne continue à croire qu’il faut battre sa femme pour se faire respecter». Donc, la société diffuse la culture de la violence, a-t-elle alerté. Ainsi, la psychologue a appelé à mettre un terme au «laxisme» notamment pour ce qui concerne la violence infligée aux femmes. De surcroît, le professeur a indiqué que la pollution de l’espace public, l’insécurité, la toxicomanie, la mauvaise image de soi, le chômage, la facilité du passage à l’acte, sont des éléments qui incitent à la violence. Fort heureusement, Mme Hacen-Djaballah a considéré, lors de son passage, que la société algérienne n’est pas violente. Toutefois, elle a indiqué qu’«on ne peut nier que la violence a pris de l’ampleur dans le pays, et qu’elle a plusieurs causes qu’il faut cerner, pour y remédier». Entre autres, elle a reconnu que ce fléau est complexe, mais doit être étudié par les spécialistes. Pour ce qui est des solutions, elle a considéré que celles-ci résident au sein de la famille. Elle a appelé à travailler en amont au sein de la famille, dans le voisinage et surtout à l’école. «Il est impératif que tout le monde assume les conséquences de ses actes, une responsabilité qui incombe à la justice, bien entendu», a-t-elle précisé. Évoquant les «groupes de pression» au sein de l’APN qui, selon elle, bloqueraient des lois prohibant ces types de comportement, elle a observé que la société algérienne n’a pas tiré de leçons de la «Décennie noire», ayant, aujourd’hui, tendance à «récompenser celui qui use de violence dans ses revendications». S’agissant de l’abolition de la peine de mort, elle a reconnu que l’Algérie est un pays islamiste, toutefois, elle a rappelé que «l’erreur est humaine». Tout en affirmant que cette peine peut être «injuste». Également, la psychologue a indiqué que la peine de mort est une «violence extrême».
Lamia Boufassa