Accueil MONDE Syrie : le cessez-le-feu peut-il perdurer ?

Syrie : le cessez-le-feu peut-il perdurer ?

0

La trêve entre dans sa troisième journée et l’ONU annonce vouloir renforcer ses actions humanitaires pour porter assistance à plus de 150 000 personnes.

Cette fois, le cessez-le-feu va-t-il être respecté ? La Russie et les États-Unis se montrent prudemment optimistes. Le cessez-le-feu en Syrie a été globalement respecté alors qu’il est entré lundi dans sa troisième journée malgré des accusations mutuelles des protagonistes de violation.
Mettant à profit cette trêve sans précédent, l’ONU a annoncé dimanche qu’elle allait renforcer ses opérations humanitaires pour porter assistance dans les cinq prochains jours à plus de 150 000 personnes dans des localités syriennes assiégées par l’un ou l’autre des belligérants. Dans les grandes villes de Syrie, les habitants sont sortis dans les rues dimanche après une nuit paisible pour faire leurs emplettes, goûtant un calme inhabituel. Dans les quartiers rebelles d’Alep, la grande ville du Nord, les élèves habitués à raser les murs pour éviter les bombardements marchaient au milieu de la chaussée, selon des correspondants. Et le calme était total aux abords de Damas, alors que les rues de la capitale étaient très animées.

Les djihadistes pas concernés par cette trêve
Le pouvoir syrien a relevé cette accalmie sans précédent. « Les villes ont connu un calme exceptionnel, mais il faut attendre deux ou trois jours pour s’assurer de la pérennité de l’arrêt des hostilités et de l’engagement des parties concernées», a écrit dimanche le quotidien Al-Watan, proche du pouvoir. Initié par la Russie et les États-Unis et soutenu par l’ONU, l’accord de cessation des hostilités est le premier de ce genre en cinq ans d’une guerre qui a fait 270 000 morts et des millions de déplacés et de réfugiés. Il est accepté par le gouvernement du président syrien Bachar el-Assad, par une centaine de groupes rebelles et par les combattants kurdes. Mais il ne s’applique pas aux groupes djihadistes comme l’organisation État islamique (EI) et le Front al-Nosra, la branche syrienne d’Al-Qaïda, qui contrôlent plus de 50 % du territoire syrien. Les djihadistes peuvent donc être frappés pendant la trêve par les forces de Damas, l’aviation russe qui les soutient et la coalition internationale dirigée par les États-Unis.
Dimanche, des accusations de violation de l’accord de cessation des hostilités dans d’autres régions de Syrie ont été avancées par plusieurs des parties au conflit, sans qu’aucune ne mette en cause le respect global de la trêve. Selon un communiqué du Centre Russe pour la réconciliation des parties belligérantes en Syrie, créé par l’armée russe pour superviser la trêve, «au cours des 24 dernières heures, neuf cas de violation du cessez-le-feu ont été enregistrés».

24 violations du cessez-le-feu
Pour autant, «de manière générale, le cessez-le-feu en Syrie est en train d’être mis en place», a déclaré le général Sergueï Kouralenko, responsable de ce centre. Riad Hijab, le coordinateur général du Haut Comité des négociations (HCN), qui groupe les principaux mouvements rebelles syriens, a fait état de 24 violations avec un bilan de 29 morts dans une lettre au secrétaire général de l’ONU Ban Ki-moon. Il a accusé «les Russes, le régime, l’Iran et d’autres forces étrangères d’avoir commis des actes d’hostilité malgré la trêve». Mais, «globalement, c’est bien mieux qu’avant, et les gens se sentent bien», a déclaré à Riyad le porte-parole du HCN, Salem al-Meslet. L’Arabie saoudite, qui soutient l’opposition syrienne, a elle aussi accusé les aviations russe et syrienne d’avoir violé la trêve.
Selon une ONG, l’Observatoire syrien des droits de l’Homme (OSDH), des avions non identifiés ont bombardé dimanche, à l’aube six localités de la province d’Alep (nord) et une localité de la province de Hama (centre).

Un accord difficile à mettre en œuvre
Un haut responsable américain a exprimé un optimisme relatif sur la suite de l’application du cessez-le-feu. «Ce sera un accord difficile à mettre en oeuvre et nous savons que les obstacles sont nombreux», a-t-il reconnu dans un email. «Mais c’est vraiment dans notre intérêt, et surtout dans l’intérêt du peuple syrien, de donner une chance à ce processus», a-t-il dit. Dans ce contexte nouveau, le coordinateur des affaires humanitaires de l’ONU en Syrie, Yacoub el-Hillo, a annoncé dimanche soir «la livraison d’aide dès lundi et dans les jours suivants à la ville rebelle de Mouadamiyat al-Cham», dans la banlieue de Damas, assiégée par les forces gouvernementales.
Au total, l’ONU prévoit, en plus des opérations en cours, de « livrer dans les cinq prochains jours de l’aide pour environ 154 000 personnes vivant dans des localités assiégées de Syrie», a-t-il ajouté. Les Nations unies attendent le feu vert des parties au conflit «pour aider environ 1,7 million de personnes situées dans des zones difficiles d’accès», a déclaré le responsable de l’ONU. «Les évacuations sanitaires doivent être inconditionnelles», a encore déclaré Yacoub el-Hillo.
«L’ONU appelle toutes les parties à assurer un accès inconditionnel, libre et régulier à la totalité des quelque 4,6 millions de personnes se trouvant dans des localités difficiles d’accès ou assiégées dans toute la Syrie.»

Article précédentIran : pas de majorité claire à l’issue des législatives
Article suivantAIEA : Yukiya Amano au MAE