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Iran : pas de majorité claire à l’issue des législatives

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Les alliés réformateurs du président ont fortement progressé, mais les conservateurs conservent un socle non négligeable en attendant les résultats finaux. Les urnes ont livré leur verdict et n’ont pas dégagé de majorité claire : les alliés réformateurs et modérés du président iranien Hassan Rohani qui compte sur eux pour accélérer sa politique d’ouverture ont fortement progressé aux législatives face aux conservateurs, mais aucun des deux camps n’obtient de majorité dans l’attente des derniers résultats.

Sur les 290 sièges du Parlement élu pour quatre ans, les réformateurs et modérés en ont pour l’instant obtenu 89 contre 86 pour les conservateurs, selon des résultats partiels publiés dimanche par l’agence de presse Isna. Dix candidats indépendants ont également été élus, mais sont pour l’instant inclassables. Les résultats pour une soixantaine d’autres sièges devraient être annoncés d’ici mardi.

Des figures religieuses battues
Deux figures conservatrices religieuses, l’ayatollah Mohammad Yazdi, l’actuel chef de l’Assemblée des experts, et l’ayatollah Mohammad Taghi Mesbah Yazdi, ont été battues à l’élection de cette Assemblée, composée de 88 religieux élus pour huit ans, chargée de nommer le guide suprême iranien. Elle pourrait être amenée à jouer un rôle déterminant durant son mandat puisque le guide actuel, Ali Khamenei, est âgé de 76 ans. En revanche, l’ayatollah Ahmad Janati, le chef du puissant Conseil des gardiens de la constitution, a été élu, mais n’arrive qu’en dernière position. Les réformateurs avaient mené campagne pour éliminer ces trois personnalités. Tous les trois étaient candidats à Téhéran. L’ancien président modéré Akbar Hachemi Rafsandjani arrive en tête, suivi par le religieux conservateur Mohammad Emami Kashani, et le président Hassan Rohani, troisième.
MM. Rafsandjani et Rohani avaient présenté une liste séparée dans le but d’éliminer ces trois figures conservatrices de l’Assemblée des experts. En revanche, les principales personnalités religieuses conservatrices ont été élues en province. Parmi elles figurent l’ayatollah Ahmad Khatami à Kerman (sud), l’ayatollah Seyyed Mahmoud Hachemi Shahroudi à Khorassan Razavi (nord-est) ou encore l’ayatollah Sadegh Larijani dans le Mazandaran (nord), qui dirige l’autorité judiciaire. Dans un communiqué, ce dernier a dénoncé ceux qui ont « essayé de manière coordonnée avec les médias américains, britanniques (…) de faire éliminer certains serviteurs du peuple de l’Assemblée des experts ».

Nouvelle atmosphère
En revanche, un second tour devra être organisé en avril ou en mai pour départager les candidats briguant 51 autres sièges, et dont aucun n’a récolté suffisamment de voix pour être élu au premier tour. D’ores et déjà, les réformateurs et modérés peuvent se targuer d’avoir trois fois plus d’élus au Parlement, où ils en comptaient trente jusqu’à présent contre environ 200 pour les conservateurs. Ils ont réalisé une percée remarquable à Téhéran où ils raflent la totalité des 30 sièges qui étaient jusqu’alors détenus en grande partie par les conservateurs. Parmi ces derniers, plusieurs étaient de farouches opposants à l’accord conclu en juillet 2015 entre les grandes puissances et l’Iran sur son programme nucléaire. L’accord est entré en vigueur à la mi-janvier, entraînant la levée de la plupart des sanctions économiques qui asphyxiaient l’économie iranienne.
« Le progrès du pays est l’objectif principal » et le « prochain Parlement aura de lourdes charges », a estimé dimanche le guide suprême Ali Khamenei, dans un message lu à la télévision, en mettant en garde contre « un progrès superficiel sans indépendance ni intégrité nationale ». Le président Rohani a pour sa part affirmé dans un tweet que « les électeurs ont créé une nouvelle atmosphère ». Religieux modéré, il misait sur l’avancée majeure qu’a été l’accord nucléaire et les investissements étrangers attendus par son application, pour engranger un maximum de députés favorables à sa politique au Parlement. Il entend mettre en place une série de réformes économiques et sociales avant la fin de son premier mandat de quatre ans en 2017.

Une réaction des électeurs contre les radicaux
Akbar Hachemi Rafsandajani a affirmé dans un tweet que « personne ne peut résister à la volonté de la majorité du peuple et ceux dont il ne veut pas doivent se retirer ». La percée des pro-Rohani est d’autant plus notable que la plupart des grandes figures du camp réformateur avaient été écartées de la course aux législatives par le Conseil des gardiens de la Constitution, qui a un droit de veto sur les candidatures.
Analyste iranien indépendant, Amir Mohebbian a jugé que ces résultats sont « une réaction (des électeurs) contre les radicaux ». À Téhéran, le chef de liste des conservateurs, Gholam-Ali Hadad-Adel, un ancien président du Parlement, n’arrive qu’en 31e position et est battu. En tête de liste des candidats élus figurent Mohammad Reza Aref (réformateur) et Ali Motahari (modéré conservateur). Les réformateurs avaient inclus dans leur liste trois conservateurs modérés, dont Ali Motahari, qui ont tous été élus.
La liste des réformateurs/modérés à Téhéran était menée par Mohammad Reza Aref, ancien candidat réformateur à la présidentielle de 2013, qui s’était retiré en faveur du candidat Rohani.

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