Accueil MONDE Haïti : Plus de 800 morts après le passage de l’ouragan...

Haïti : Plus de 800 morts après le passage de l’ouragan Matthew

0

La puissante tempête Matthew a fait des centaines de victimes dans le sud d’Haïti.

C’est l’ouragan le plus violent de l’histoire récente des États-Unis. Les autorités haïtiennes et les ONG font état d’un bilan humain dramatique après le passage de l’ouragan Matthew, qui s’affaiblissait vendredi, mais restait menaçant pour les côtes du sud-est des États-Unis, dont les villes touristiques de Floride.
D’après Reuters, qui cite des élus locaux, le bilan s’est aggravé vendredi soir à au moins 842 morts rien qu’à Haïti. L’ouragan a provoqué une nouvelle catastrophe humanitaire dans le pays. Un million de personnes sont dans le besoin, selon l’ONG Care-France : « Beaucoup d’habitants ont tout perdu. Ils n’ont plus rien hormis les vêtements qu’ils portent. » Le sénateur haïtien Hervé Fourcand, élu de la région sud, précisait à l’Agence France-Presse qu’un certain nombre de communes restaient inaccessibles quatre jours après l’arrivée sur le pays de l’ouragan alors de catégorie 4, sur une échelle de 5. Il soufflait alors autour de 230 km/h. La protection civile du Sud a évoqué pour sa part un bilan de 315 morts. Mais ce chiffre ne prend pas en compte les communes de Camp-Perrin, Les Anglais, Coteaux et Arniquet, a-t-elle précisé. Le ministère de l’Intérieur faisait état, lui, de 271 morts. Le sud-ouest du pays, surtout la péninsule de Tiburon, a payé le plus lourd tribut, en particulier les localités côtières Jérémie, qui comptent environ 30 000 habitants, et Les Cayes, troisième ville du pays. La boue a tout envahi, des routes étaient toujours impraticables et un pont crucial a été emporté mardi.

80 % des bâtiments dévastés à Jérémie
Selon un bilan décrété jeudi soir par le bureau des Nations unies pour l’aide humanitaire (Ocha), jusqu’à 80 % des récoltes ont été perdues par endroits et plus de 350 000 personnes ont besoin d’une assistance humanitaire. Plus de 21 000 personnes ont été évacuées. « De très importants dégâts sont attendus à Grand’Anse et dans le sud, en particulier dans les villes des Cayes, Jérémie et Port-Salut », a indiqué l’Ocha vendredi matin. Plus de 29 000 maisons ont été détruites rien que dans le Sud. À Jérémie, « 80 % des bâtiments ont été rasés », selon Jean-Michel Vigreux, directeur de l’ONG Care Haïti. Plusieurs ONG craignent en outre de « nouvelles flambées » de l’épidémie de choléra, introduite dans le pays après le séisme de 2010 par des Casques bleus de la Mission de l’ONU sur place (Minustah). Les priorités sont par conséquent « l’approvisionnement en eau potable » et « les opérations d’assainissement » de l’eau, a expliqué à l’AFP Émilie Bernard de l’ONG Acted, qui va envoyer lundi plusieurs stations de traitement d’eau pour approvisionner 11 000 personnes par jour en eau potable. Les craintes d’épidémies sont d’autant plus fortes que de nombreux centres de santé ont été détériorés. Aux Cayes, les habitants tentaient de reprendre une vie normale vendredi matin avec le retour du soleil. Matelas et habits détrempés séchaient tandis que des habitants s’activaient aux réparations. Son quartier de Croix-Marche à Terre a particulièrement souffert. Ce n’était plus vendredi matin qu’un entrelacs d’arbres déchiquetés, de tôles, de détritus en tous genres d’où émergeaient des maisons éventrées, qui n’étaient souvent que de simples abris de fortune avant la puissante tempête.
Les plantations de bananiers et de manguiers de la plaine environnante ont été totalement ravagées, a constaté une journaliste de l’Agence France-Presse. Accompagné de plusieurs ministres, le Premier ministre Enex Jean-Charles doit aller vendredi « constater l’état de certaines infrastructures affectées et marquer sa solidarité […] avec les victimes du grand Nord », selon un communiqué officiel.
La France a annoncé vendredi l’envoi immédiat d’une aide d’urgence à Haïti. « Le président de la République exprime sa compassion et son soutien au peuple haïtien, déjà tant éprouvé ces dernières années », peut-on lire dans le communiqué. L’Élysée précise qu’un avion transportant 32 tonnes de matériel , dont 2 stations de purification de l’eau, des kits médicaux et du matériel de première urgence, sera affrété. L’Hexagone envoie également ce vendredi 60 militaires et 2 officiers supérieurs de sapeurs-pompiers à Port-au-Prince « pour appuyer les autorités haïtiennes ».
Les États-Unis ont envoyé vendredi le navire de transport militaire USS Mesa Verde, avec 300 soldats des Marines à bord, qui s’ajoutera aux 250 Américains et 9 hélicoptères déjà déployés. Avant de donner le feu vert, l’administration américaine attendait de savoir quels étaient les besoins, mais aussi comment la situation allait évoluer aux États-Unis mêmes, menacés à leur tour par l’ouragan Matthew. La Commission européenne va quant à elle verser une aide de 1,75 million de dollars.

Deux morts en Floride
L’œil de l’ouragan, qui s’était hissé jusqu’au cran maximal de l’échelle Saffir-Simpson, affleurait à quelques kilomètres au large de la côte est de la Floride depuis la nuit de jeudi à vendredi, remontant vers le nord. Pour l’heure, l’œil n’a pas touché terre. Désormais en catégorie 3, avec des vents à 195 km/h, il a fait au moins deux victimes sur le sol américain. Une femme d’une cinquantaine d’années a succombé à un accident cardiaque, car les secours n’ont pu aller lui prêter assistance à cause de la violence du vent. Une deuxième personne, une femme âgée de 82 ans, est décédée dans un hôpital où elle avait été transportée en voiture particulière. Les services d’urgence avaient été alertés qu’elle était inconsciente et avait du mal à respirer, mais là encore les véhicules de secours n’avaient pu sortir.
La côte sud-est des États-Unis, de la Floride jusqu’en Caroline du Nord, était placée en état d’alerte plusieurs jours avant l’arrivée de l’ouragan. Les autorités ont émis des ordres d’évacuation concernant environ 3 millions de personnes et ont multiplié les mises en garde très alarmistes. Plus de 6 000 militaires de la Garde nationale étaient mobilisés et d’autres le seront si nécessaire, a indiqué vendredi matin le général James C. Witham, l’un des responsables de la Garde, dans un point de presse au Pentagone. « La dernière fois que nous avons eu des opérations de cette taille, c’était pendant l’ouragan Sandy» en 2012 qui avait fait près de 200 morts. Selon le responsable américain, les autorités espèrent toutefois que l’ouragan ne pénétrera pas à l’intérieur des terres. C’est surtout la montée des eaux qui suscitait les craintes des météorologues et des autorités. Jusqu’à 3,3 m attendus par endroits, avec un effet pouvant être ressenti bien à l’intérieur des terres, a prévenu Rick Knabb, directeur du Centre d’information sur les ouragans (NHC), sur Periscope.

Obama alerte sur la montée des eaux
Le président Barack Obama avait prévenu dès mercredi qu’il s’agissait d’une « tempête sérieuse ». Il a déclenché jeudi un plan d’urgence fédéral pour la Floride, la Géorgie et la Caroline du Sud et a encore mis en garde vendredi matin contre la hausse du niveau des eaux. « Il s’agit toujours d’un ouragan vraiment dangereux », a déclaré Barack Obama depuis le Bureau ovale. « Je pense que la principale inquiétude à ce stade n’est pas seulement la force des vents, mais la montée des eaux », a-t-il ajouté.
Daytona Beach (Floride), l’une des premières villes américaines touchées, a décrété jeudi soir un couvre-feu jusqu’à samedi 11 heures GMT. Plus au nord, le comté de Chatham, dont le chef-lieu est Savannah (Géorgie), a fait de même vendredi. Là, la pluie tombait déjà dru en milieu de matinée, mais le vent était encore inexistant, et il était toujours temps d’évacuer. Mais, plus au sud, les autorités appelaient désormais les habitants à rester où qu’ils se trouvent.
Le gouverneur de Floride Rick Scott a indiqué que près de 600 000 foyers étaient privés d’électricité. Selon le bulletin d’information du NHC à 15 heures GMT, l’alerte ouragan a été étendue plus au nord sur la côte de Caroline du Nord. Dans le même temps, la situation s’apaisait au sud, vers Cocoa Beach, où Matthew s’est acharné pendant plusieurs heures. Non loin, au centre spatial Kennedy, la base de lancement de la Nasa et de sociétés privées comme SpaceX, l’agence spatiale américaine a signalé des coupures de courant et des toitures endommagées, mais des dégâts « limités ».

Nombreux dégâts à Cuba
Depuis qu’il est devenu ouragan, le 29 septembre, Matthew a traversé les Caraïbes du sud au nord, affectant la Colombie, la Jamaïque, la République dominicaine, où au moins quatre personnes sont mortes, ainsi que Cuba et les Bahamas. Les autorités cubaines n’ont fait état d’aucune victime mais de nombreux dégâts, deux villes côtières à l’est de l’île demeuraient inaccessibles par la route vendredi. La province de Guantanamo a été violemment balayée mardi soir par Matthew. À Baracoa, ville de 82 000 habitants connue pour avoir été la première fondée sur l’île, et probablement la plus touchée par l’ouragan, conservait vendredi un visage de désolation.

Article précédentSyrie : Combats à Alep, l’ONU étudie deux propositions de trêve
Article suivantBlida : Les marchés informels, jusqu’à quand ?