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EXODE DE NOS MÉDECINS VERS L’ÉTRANGER : L’État appelé à protéger ses élites 

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Le secteur de la Santé dans notre pays connait plusieurs lacunes et carences reconnues par l’État et ce dans la gouvernance, le manque de moyens et équipements médicaux. Un état de fait qui a poussé nos médecins et en particulier les spécialistes à quitter le pays à la recherche de meilleures conditions de vie socioprofessionnelle.

En effet, la question de l’exode des 1200 médecins spécialistes vers l’étranger continue à susciter des réactions, faisant réagir des personnalités nationales, diplomates, députés et même des médecins. Dans ce sillage la coordination nationale des fonctionnaires de la santé a lancé un signal de détresse au président de la République, Abdelmadjid Tebboune, tout en le tenant au courant de la situation déplorable vécue par les fonctionnaires de la santé publique et leurs revendications restées en suspens. Ainsi que sur le démantèlement du secteur public de la santé qui se trouve sérieusement menacé par le départ des médecins vers l’étranger et le privé.
Activant sous la coupe du Syndicat national des fonctionnaires de la fonction publique (SAFAP), la coordination a déploré l’hémorragie qui prévaut dans le secteur public de la santé, la démission de plusieurs médecins de différentes spécialités des hôpitaux publics et le départ massif des blouses blanches, les spécialistes notamment, à l’étranger. Considérant que l’annonce relative à la réussite des 1200 médecins aux concours de l’équivalence et de compétences et qui s’apprêtent à quitter le pays pour s’installer en France « est une hémorragie grave qui menace une fois de plus le secteur de la santé publique ».
Les rédacteurs de la lettre ont ainsi affirmé que le personnel de la santé n’a toujours pas perçu les sixième, septième et huitième tranches de la prime du Covid. Ils ont également informé le président de la République « que les démissions collectives de médecins ont bien eu lieu dans le secteur », lit-on dans le communiqué. Et d’alerter « que les personnels des paramédicaux et des corps communs sont au bord de l’explosion ». Les membres de la coordination ont ainsi demandé au président de la République de soustraire le secteur de la Santé de la Fonction publique, en lui attribuant le statut de la fonction hospitalière. En précisant que la prédominance de la fonction publique et son cadre figé, a eu un impact néfaste sur l’épanouissement du secteur de la Santé publique. Ils ont également informé le Président que ses décisions n’ont pas été mises en application, citant « la couverture à 100% de l’assurance maladie pour le personnel de la Santé et la bonification des cotisations pour la retraite ».
De ce point de vue, Rachid Belhadj, directeur des activités médicales et paramédicales au CHU Mustapha pacha a tenu à rappeler, dans une déclaration médiatique, que le départ organisé des médecins à l’étranger ne date pas d’aujourd’hui, mais c’est un phénomène qui existe depuis très longtemps dans ce secteur ô combien sensible, soulignant qu’il ne touche pas seulement les médecins mais aussi les paramédicaux. « L’État est tenu de revoir la politique salariale vis-à-vis des conditions de travail et de les protéger pour que les gens puissent rester ici et s’épanouir », a-t-il insisté.

Les paramédicaux menacés par l’exode
Dans un communiqué rendu public, le collectif des professeurs des sciences médicales ont insisté sur l’impératif de chercher ailleurs les explications du départ massif des praticiens vers « des cieux plus cléments ». En tête des causes, pointent-ils, le statut des médecins tous corps confondus qui « confine à la précarité, voire à l’appauvrissement de ces praticiens, exerçant dans des conditions souvent lamentables, percevant un salaire qui n’est autre qu’une pension alimentaire excluant toute possibilité d’ascension sociale ou de vie confortable, dans un environnement souvent hostile ». Selon ces chercheurs hospitalo-universitaires, le parcours initial des praticiens spécialistes débute avec le service civil, dont les conditions de vie et d’exercice « souvent cauchemardesques ont été tant décriées, et ont fait l’objet de tentatives de réformes qui n’ont jamais dépassé le stade de vœux pieux », car « formulées par des bureaucrates ayant des idées figées et sommaires sur le développement des systèmes de santé ». Les considérations salariales et la dégradation profonde des conditions de travail, ne sont pas les seules raisons de cet exode, mettent en avant ces professeurs, ajoutant que le phénomène de l’exode des élites algériennes ne touche pas uniquement les médecins. « Aucune filière de l’enseignement supérieur n’est épargnée, tant la considération des élites universitaires et des diplômés en général, a subi un préjudiciable nivellement par le bas », écrit le collectif des professeurs hospitalo-universitaires. « Cette désolante situation a pour conséquence visible les entraves multiples au développement du pays confronté à de multiples défis qui ne peuvent être relevés que par l’intelligentsia algérienne rehaussée au niveau qui doit être le sien, pour enfin donner naissance à cette Algérie dans laquelle nous souhaitons vivre et prospérer », espèrent-ils. Et de conclure par cette sentence : «Dans le secteur de la Santé, le prochain exode qui paralysera totalement nos structures de santé publique et privées sera celui des personnels paramédicaux. Les besoins des pays occidentaux se chiffrent en centaines de milliers. Ces personnels résisteront-ils aux chants des sirènes provenant de ces pays ? La réponse est facile à deviner ».

Les engagements du président Tebboune
En août 2021, le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a fait part de son engagement à réviser les statuts particuliers des personnels de la Santé et le texte de loi sur le service civil, saluant les sacrifices et efforts de l’armée blanche dans la lutte anti-covid-19. L’ensemble des éléments de ce corps « parmi les chauffeurs d’ambulances, infirmiers et médecins sont disposés à se sacrifier et les citoyens sont, en contrepartie, tenus de reconnaître ces gestes, contrairement à ceux qui tentent de détruire le pays ». Le président de la République a ainsi fait part de son engagement à « revoir les statuts particuliers des infirmiers et des médecins et de revisiter la loi relative au service civil ». De même qu’il s’est dit déterminé à revoir à la hausse, en concertation avec les syndicats du secteur, les salaires du personnel de la Santé. Également et dans un discours prononcé à la clôture des travaux du séminaire sur la santé, janvier dernier, le chef de l’État est longuement revenu sur la détermination de l’État à «résoudre tous les problèmes du secteur». «Nous sommes déterminés à mettre en œuvre les recommandations de ce séminaire dans la mesure du possible et selon les moyens financiers du pays ».
« Nous allons prendre en charge graduellement et avant la fin de cette année toutes les préoccupations des personnels du secteur de la Santé, à l’image des questions financières, des statuts et de la carrière professionnelle», a-t-il affirmé. Tebboune a expliqué que le défi actuel est de passer à une autre étape dans la gestion du secteur, estimant qu’il est «grand temps de se pencher sur toutes les revendications légitimes des employés du secteur et d’œuvrer à résoudre tous les problèmes avant la fin de l’année». Dans le même sillage, il a indiqué que 2022 verra la concrétisation d’acquis pour le secteur, comme l’aboutissement du chantier de la révision des lois réglementant le domaine de la Santé. Il a, à l’occasion, rendu un hommage au personnel médical pour leur dévouement à la noble mission de la lutte contre la pandémie.
Sarah Oubraham

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