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Elle coûte plus d’un milliard de dollars au continent : l’Afrique face aux ravages de la pêche illicite

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La pêche «pirate» assèche les ressources halieutiques des fonds marins au large des côtes africaines. Avec l’augmentation de la demande mondiale de poisson, les eaux de la région africaine attirent les flottes des quatre coins du globe.

L’Afrique est devenue la région du monde la plus touchée par la pêche illégale. Les responsables africains du secteur de la pêche n’ont pas manqué à dénoncer ces pratiques dont l’impact et l’ampleur environnementale sont largement reconnus. Le manque à gagner que cette activité représente pour les États africains et les moyens de le résorber sont, eux, plus difficiles à identifier.
Ainsi, dans une déclaration à l’APS le chargé des ressources marines au Bureau interafricain des ressources animales de l’Union africaine (UA-BIRA), M. Aboubakar Sidibe, a affirmé que « l’Afrique est devenue le réceptacle des bateaux qui pratiquent la pêche illicite. Plus de 80% des navires exerçant la pêche non réglementée dans le monde viennent se réfugier dans les eaux africaines». S’exprimant en marge d’un atelier sur les enjeux du secteur de la pêche en Afrique tenu récemment au Caire (Egypte), le responsable a reconnu que la région de l’Afrique du nord est moins touchée par ce phénomène par rapport aux autres régions du continent. Cependant, le responsable a signalé qu’il n’en demeure pas moins que «l’Afrique reste le continent qui enregistre un grand nombre de pratiques de pêche illicite et non réglementée».
Selon les chiffres officiels, le manque à gagner des Etats touchés reste important. En effet, certaines estimations avancent un chiffre d’affaire annuel de 1,3 milliard de dollars réalisé par la pêche illicite dans les eaux africaines, mais ce montant est loin de refléter la réalité sur le terrain vu l’absence de surveillance et de données sur l’ampleur exacte de ce phénomène, observe-t-on.
« Ce chiffre de 1,3 milliard de dollars représente ce qui est déclaré seulement, alors que la règle dit que si vous arrivez à recenser une situation, sachez que dix ne l’auront pas été », précise, à cet égard Adel Chahine, professeur spécialisé en aquaculture à l’université de Benha (Egypte). « Le danger est réel à tel point que la part de la ressource appartenant aux générations futures est transgressée», prévient ce spécialiste.

Les pays appelés à d’avantage de coordination
Face à l’ampleur de ce phénomène, les cinq sous-régions africaines ont convenu de la nécessité de travailler en partenariat pour contrecarrer ces pratiques illégales. C’est le cas des pays de l’Afrique du nord qui partagent des frontières maritimes mais qui ont des réglementations différentes. « La situation en Afrique du nord est caractérisée par des législations différentes, alors qu’un phénomène transversal comme celui de la pêche illicite a besoin d’une harmonisation des textes afin de réduire le phénomène », estime M. Sidibe. Ce dernier cite l’exemple des sanctions prévues à ces infractions, qui doivent être les mêmes dans tous les pays de cette région afin de restreindre l’espace d’infraction des bateaux de pêche et d’avoir une collaboration efficace entre les pays concernés. « Aucun pays ne pourra y faire face seul. Il faut une coordination entre tous et des moyens technologiques de surveillance et de contrôle. Nous devons mettre en œuvre des stratégies et des plans communs de lutte contre la pêche INN », considère M. Chahine. Certes, les pays africains ont pris conscience de l’impact de la pêche illégale, mais les actions ponctuelles ne sont pas suffisantes, estime pour sa part un expert tunisien dans les questions halieutiques, Houssam Hamza, qui préconise la mise en place de stratégies nationales efficaces pour évaluer les stocks et le manque à gagner induit par cette pêche. Sur le plan logistique, les organisations régionales telles que l’Union européenne et l’Union africaine ainsi que les bailleurs de fonds sont sollicités pour aider les pays à se doter de moyens de lutte contre la pêche INN, à travers l’installation du Système de surveillance des navires par satellites (VMS) qui permet de suivre la flotte notamment celle supérieure à 15 mètres de longueur. Ces pays devraient se doter également d’unités navigantes ayant des capacités d’intervention rapide pour arraisonner les bateaux qui pêchent illicitement. Il s’agit aussi d’instaurer un système de traçabilité des produits halieutiques partant du bateau de pêche jusqu’à l’assiette en passant par le circuit de commercialisation, afin de permettre de suivre l’origine du produit et l’espèce capturée.
La pêche illégale, non déclarée et non réglementée (appelée pêche INN) contribue fortement au déclin des stocks de poisson et à la destruction des habitats marins. À l’échelle mondiale, la pêche INN revêt de nombreuses formes, tant dans les eaux nationales qu’en haute mer. La pêche illicite, non déclarée et non réglementée englobe trois volets. Le premier concerne les navires qui pêchent sans autorisation, tandis que le deuxième est lié aux captures non déclarées, c’est-à-dire que les bateaux ont des licences de pêche mais ne déclarent pas leurs captures ou recourent à des sous-déclarations. Quant au troisième aspect, il fait référence au non-respect de toutes les conventions et initiatives internationales qui prônent la pêche responsable.
Lamia Boufassa

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