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Pouvoir-opposition : le dialogue de sourds

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Dans son discours adressé à la Nation, à l’occasion de la double fête de l’Indépendance et de la Jeunesse, coïncidant avec le 5 juillet, le président de la République, Abdelaziz Bouteflika, a, implicitement, invité l’opposition au dialogue. Néanmoins, cette dernière semble recroquevillée, encore une fois, sur son scepticisme, et décline l’appel présidentiel.

Le message du Chef de l’État est avant tout une réponse à cette même opposition politique qui pose des doutes, quant au sort réservé aux dépenses publiques, orientées à la réalisation de projets de développement de grande envergure. Précisément, à celle-ci, qui s’interroge sur le sort des recettes pétrolières engrangées à la faveur de l’embellie financière cumulée durant des années, Bouteflika a rappelé le bilan de ses réalisations dans les secteurs du logement, de la santé, de l’éducation, ainsi que sur le plan infrastructurel. Du recasement de milliers de familles, à l’accès des populations aux énergies vitales, telles que l’électricité et l’eau potable, en passant par le développement des infrastructures publiques, sanitaires et éducatives, le Chef de l’État a défendu son programme devant «ceux qui s’interrogent sur la destination prise par les revenus des hydrocarbures». Des propos allusifs aux critiques de la CNLTD (Coordination nationale pour les libertés et la transition démocratique). Une réponse des plus «pragmatiques» à cette partie d’acteurs de la vie politique nationale, qui, elle, prône des revendications à connotation politique, que le pouvoir n’entend pas en accorder une attention particulière. Tant, celui-ci juge que ces acteurs ne sont animés que par des ambitions électoralistes, en prévision des Présidentielles de 2019. L’opposition, en revanche, avance que son projet politique projette une sortie de crise qui fixe, comme condition au dialogue, l’organisation d’un processus de transition politique, allant jusqu’à remettre en cause les institutions élues. Or, pour Bouteflika, le bilan de son plan d’action mené sur le terrain, tout au long de ses quatre mandats présidentiels, est, à cet égard, incontestable, a-t-il fait remarquer dans son message. Un message qui se veut à la fois convaincant à tout point de vue, et une sorte de main tendue à l’opposition. D’autre part, la même véhémence verbale a caractérisé sa lettre quand le président à défendu ses réformes politiques, comme le porte le projet de trituration constitutionnelle adopté en février dernier, cité en exemple édifiant. Ceci, sur le plan politique. Au volet portant le contexte de crise que traverse le pays, le Chef de l’État à tout aussi mis en valeur ses choix. À ce titre, il a rappelé ses instructions soumises au Gouvernement, au lendemain du recul des prix de l’or noir, en guise d’un plan anticrise qui table sur une croissance économique à relever en dehors des hydrocarbures. Ce plan est décliné sous forme d’un nouveau modèle économique ratifié, en Tripartie, le 5 juin dernier. En effet, depuis l’avènement de la chute des prix pétroliers, l’opposition a désigné responsable le pouvoir face à cette situation. Elle n’a cessé de le crier sur tous les toits. Une position qui demeure de mise, deux ans plus tard, et réitérée, aujourd’hui. C’est du moins ce qu’ont affirmé certains acteurs de ce camp qui disent haut et fort que l’opposition ne peut pas assumer ce qu’elle qualifie «d’échecs», dès lors qu’elle n’est pas à l’intérieur du pouvoir. Cette réaction émane du cadre du MSP (Mouvement pour la société et la paix), Nacer Hamdadouche, lequel n’était pas allé par monts et par vaux pour endosser la responsabilité politique de la crise aux hommes du sérail. Ce qui va de toute évidence à l’antipode de ce qu’a affirmé le président de la République dans sa lettre adressée au peuple algérien. «Ce choc n’est pas la conséquence de failles dans notre démarche interne», telle était la réponse de Bouteflika à ses adversaires, et lequel responsable a rappelé pour convaincre de ses propos ces décisions économiques prises face à cette conjoncture. Il s’agit du remboursement de la dette extérieure de l’Algérie. Une option tant «salutaire» pour le pays, a-t-il laissé entendre, et un choix à la faveur duquel, aujourd’hui encore, l’Algérie n’a pas jugé utile de recourir aux crédits extérieurs pour rattraper l’affaissement des équilibres financiers internes. Même s’il reconnaît la difficulté de la crise actuelle, pour le premier magistrat du pays, donc, ce contexte est avant tout le résultat du choc pétrolier en cours à l’international, de par le fait de l’économie globalisée, n’en déplaise à l’opposition qui l’ait assailli de reproches à tout bout de champ. Cela étant, Bouteflika reste optimiste quant à une sortie de crise pour l’Algérie, où «la sérénité est à notre portée, grâce d’abord à la tradition de dialogue et de concertation entre le Gouvernement et ses partenaires économiques et sociaux», pouvait-on lire dans le même message. Ceci, comme pour dire que la solution est à chercher, de prime abord, à l’intérieur des partenaires au pouvoir, alors que l’adhésion des partis de l’opposition est souhaitée et pourrait tout aussi contribuer à dépasser les aléas de l’économie, a-t-il émis le vœu. Cependant, faut-il encore que «nos acteurs politiques acceptent de concourir au débat et aux propositions de solutions», a préconisé Bouteflika, dans un clin d’œil adressé à ses adversaires, lesquels, en revanche, ne semblent pas être obnubilés par l’offre du pouvoir. En effet, à en croire ses déclarations, l’opposition ne l’entend point de cette oreille, puisque, selon le même responsable cité en haut, les responsables au pouvoir sont les seuls habilités à assumer la responsabilité, «dès lors qu’ils détiennent toutes les prérogatives entre les mains», estime les acteurs du ce camp adverse. Un avis peu ou prou partagé par le RCD (Rassemblement pour la culture et la démocratie), qui, en dépit des tiraillements ayant mis à rude épreuve les courants politiques de la CNLTD, rejoint l’avis de ses alliés, dans son commentaire se rapportant du discours présidentiel. Une lettre «en déphasage avec la réalité en cours dans le pays», selon le parti de Mohcine Belabbas.
Farid Guellil

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