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Oran : La sardine de taille non marchande inonde le marché

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La sardine de taille non marchande inonde le marché à Oran où les poissonneries continuent de proposer, depuis deux mois, de la sardine d’environ quatre centimètres, violant ainsi la réglementation commerciale en vigueur.

Les spécialistes sont unanimes à estimer que les organismes de contrôle, les pêcheurs, les commerçants et le consommateur se partagent la responsabilité de ce véritable « carnage » de la ressource halieutique, chacun à son niveau. Pourtant, la réglementation fixe clairement la taille marchande de la sardine à 11 cm au minimum. Il s’agit du décret exécutif n 04-86 du 18 mars 2004 fixant les tailles minimales marchandes des ressources biologiques à l’image de la sardine dont la taille minimale marchande est fixée à 11 cm.
Cette sardine, proposée entre 300 et 400 DA le kilogramme, trouve toujours preneur. Les consommateurs saisissent cette « aubaine » pour acquérir à un prix abordable ce poisson bleu, considéré par le passé, comme « le plat du pauvre ».
La direction de wilaya de la pêche et de l’aquaculture est l’un des organismes concernés par le contrôle de la taille marchande des poissons.
Le responsable local chargé du secteur, Houari Kouissem, assure que la petite sardine n’accède pas aux marchés de détail par les voies contrôlées, les ports et abris de pêche en l’occurrence, mais par des sites d’échouage.
« La wilaya d’Oran compte onze (11) sites d’échouage », relève M. Kouissem, ajoutant que les contrôleurs affirment que la petite sardine est introduite sur le marché par le biais de ces sites mais également des autres wilayas côtières limitrophes. Le contrôle de la marchandise s’avère ainsi compliqué d’autant que la réglementation permet une quantité de 20% en dessous de la taille marchande des ressources biologiques.

Les pêcheurs responsables
Les marins- pêcheurs sont, en grande partie, à l’origine de cette situation. Lorsque la question de « la pêche responsable » est abordée avec eux, ils sont unanimes à dire que les raisons matérielles priment, puisqu’ils doivent subvenir aux besoins de leurs familles même au détriment de l’avenir de la biomasse marine. La crise économique résultant de la pandémie de la Covid-19 n’a fait qu’empirer la situation des marins- pêcheurs qui reconnaissent que même si la commercialisation de la sardine non marchande a toujours existé, ce phénomène a pris de l’ampleur cette année. Ils disent aussi avoir affronté « des semaines entières de mauvaises conditions climatiques », et avancent leur situation financière « précaire et instable ». « Quand je sors en mer, c’est pour ramener de quoi nourrir mes enfants, et si je dois inclure la taille de la prise, en plus du mauvais temps, les mauvaises pêches et la crise sanitaire, je reviendrais très souvent bredouille chez moi », affirme Nacer, un pêcheur d’une cinquantaine d’années père de 4 enfants, qui travaille depuis sa tendre jeunesse sur des sardiniers.

Des ressources halieutiques menacées
Les armateurs et les pêcheurs doivent pourtant penser à la pérennité de la ressource halieutique qui est leur source de revenus. La pêche sauvage et abusive est comme un boomerang qui revient toujours à son lanceur. Mais Nacer, comme beaucoup d’autres pêcheurs, dit n’avoir pas d’autres choix, car, ne sachant rien faire d’autre. Les spécialistes ne cessent de mettre en garde sur l’impact de cette « pêche sauvage » sur le potentiel halieutique local, déjà amoindri. « Si on continue à pêcher de cette manière, le poisson risque de disparaître à jamais à l’avenir de nos côtes », s’exclame Amine Chakouri, le secrétaire général de l’association écologique marine « Barbarous ».
« Ces pêches brisent la chaîne biologique de la reproduction et appauvrissent la ressource halieutique. De telles prises ont un impact désastreux sur la régénération des ressources et la pérennité des espèces », précise-t-il avec dépit. Au-delà des organismes de contrôle et des professionnels du secteur, le consommateur a également une grande responsabilité à endosser, estime le chargé de communication du bureau d’Oran de l’Association de la protection et orientation du consommateur et son environnement (APOCE), Abdelkrim Dib. « Si cette marchandise ne trouvait pas preneur, le vendeur serait contraint de ne plus la proposer sur le marché et le pêcheur à ne plus pêcher ce menu fretin », a-t-il souligné. La sensibilisation demeure un axe important, selon Abdelkrim Dib, également membre d’une commission mixte, regroupant la direction de la pêche, du commerce et l’APOCE. Elle cible les pêcheurs et les consommateurs pour les sensibiliser sur cette situation. Pour le directeur local de la pêche, Lahouari Kouissem, un changement plus global est prévu dans le secteur, avec un nouveau Plan d’aménagement et de gestion des pêcheries algériennes (PAGPA). Ce plan, initié par le ministère de tutelle et installé à Oran en mai dernier, sera en mesure de réorganiser la pêche, en collaboration avec les différents organismes associés, comme le transport.

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