À l’occasion de la célébration de la Journée internationale des droits de l’Homme, le président du Conseil national des droits de l’Homme (CNDH), Abdelmadjid Zaâlani, a animé, hier au Forum d’El Moudjahid, une conférence portant sur les droits de l’Homme en Algérie.
Dans son intervention, l’invité au débat a d’abord mis en avant le rôle de la révolution algérienne dans la promotion des droits de l’Homme, évoquant toutes les évolutions que l’Algérie a connues pour consolider ses acquis et avancées en matière de promotion et de protection des droits humains. « La Déclaration du 1er novembre souligne que la lutte du peuple algérien était pour la décolonisation des peuples, qui a d’ailleurs été possible, à l’époque, pour de nombreux pays africains. La glorieuse révolution de novembre 1954 a été précédée par une déclaration d’intention du FLN, qui a exprimé sa pleine et entière disposition à entamer des négociations, à condition que l’indépendance nationale puisse concerner l’ensemble du territoire national. À travers sa lutte armée contre l’occupant, l’Algérie aspirait non seulement à son indépendance mais à celle de l’ensemble des autres pays colonisés. Beaucoup de pays africains ont accédé à l’indépendance et ont rejoint les Nations unies, en votant, en 1960, en faveur de la résolution 14-15 sur les droits des peuples à l’autodétermination. Ils ont par voie de conséquence soutenu la cause algérienne et le droit des Algériens à leur indépendance », a-t-il valorisé.
« La question des droits de l’Homme ne se limite pas à la détention préventive et la liberté d’expression »
Concernant l’état des droits de l’Homme en Algérie, le président du Conseil a souligné que la question des droits de l’homme en Algérie touchait plusieurs secteurs, et que seule une lecture objective pouvait dresser un bilan d’évaluation authentique. Et d’ajouter : « La question s’est posée à Genève récemment. Est-ce qu’on respecte les droits de l’homme en Algérie, ou non. D’abord, il ne faut pas limiter la question des droits de l’Homme à la question de la détention préventive ou à la liberté d’expression. Le pacte des droits civils et politiques, et le pacte des droits économiques, socioculturels, et environnementaux. Comment les protéger et comment les promouvoir, c’est tout un programme de l’État et de nous-même en tant que conseil des droits de l’Homme et en tant qu’observatoire. Il faut donc passer par un critère objectif d’évaluation, c’est ce qui s’est passé à Genève. Sur 193 États, qui ont lu le rapport sur les droits de l’Homme en Algérie, durant toute une année, 127 se sont inscrits pour débattre de la question des droits de l’Homme en Algérie, et sur ces 127, 123 ont porté leur jugement. Des pays qui ont des sociétés civiles très développées, ce qui n’a rien à voir avec l’opposition ».
« Beaucoup de pays reconnaissent que nous avons accompli énormément de choses »
Pour appuyer ses dires, l’interlocuteur s’est argumenté par le rapport positif émis par les pays membres du Conseil international des droits de l’Homme lors de la consultation universelle périodique à Genève, à l’encontre de l’Algérie. « Tout d’abord sur le rapport du gouvernement algérien, et sur le rapport du ministre de la Justice lors du débat. Moi-même j’étais étonné du taux élevé du positivisme de ces pays. Ils nous ont donné de très bonnes notes. La question qui se pose, est-ce qu’on peut maîtriser et influencer un tel nombre de pays ? C’est impossible. On peut à la rigueur avoir une certaine proximité avec une dizaine de pays amis, on va dire nos inconditionnels. Quand on parle de 123 pays, c’est plus de la moitié des pays du monde, c’est environ 60 à 70 %. Jusqu’à 105 pays, ont émis des recommandations, ce qu’on appelle dans le jargon diplomatique des Nations unies, d’encouragement. Des rapports citant « Nous remercions l’Algérie pour la présentation du rapport », « nous encourageons ces réformes constitutionnelles », « nous insistons sur tel point, et nous recommandons telle chose en matière de »…ce qui veut dire que nous avons déjà accompli beaucoup de choses, tout en sachant qu’il n’existe aucun pays au monde qui applique les droits de l’Homme à 100%. Les droits de l’Homme, ce sont des horizons qui s’ouvrent. Le jour de l’examen universel, le ministre de la Justice, lors de sa déclaration, a réussi à convaincre que l’Algérie est mise sur une bonne voie de réformes constitutionnelles qui vont aboutir à un grand respect des droits de l’Homme ».
« Les projets de loi sous le contrôle permanent »
Au sujet de la préparation des lois, de leur appréciation et de leur application, Zaâlani a expliqué que cela passait par des mécanismes précis, sous le contrôle permanent du Conseil national des droits de l’Homme. « La nouveauté principale dans notre constitution, qui parle des manifestations, des marches et des associations, elles n’obligent plus à l’obtention d’une autorisation, mais simplement à une déclaration. Seulement, il faut des lois qui organisent les principes généraux. Et moi, je suis de ceux qui demandent une bonne préparation des lois. Regardez comment la loi sur l’investissement a nécessité des concertations. Concernant l’application de la loi, il y a ce qu’on appelle le retard des textes d’exécution des lois. L’une des missions du Conseil des droits de l’Homme, c’est justement de diffuser, d’éduquer, d’interpréter au profit de tout le peuple. Nous n’avons pas les capacités de faire tout ce qu’on veut, mais au moins, on peut informer les citoyens de leurs droits, et à ce moment-là, nous pouvons attaquer telle ou telle disposition devant la Cour suprême. C’est un mécanisme qui fonctionne indépendamment de quiconque. Le juge a un certain pouvoir, mais très limité, qui renvoie généralement à la Cour suprême. Quand le gouvernement émet un projet de loi, nous en discutons d’un point de vue des droits de l’Homme. À ce moment-là, nous pouvons dire : Vous avez détourné le principe constitutionnel. Une disposition de loi qui nous donne ce droit. Ce que nous faisons actuellement avec Monsieur Boughali, qui il faut reconnaître, fait convenablement son travail. Même si tout ce travail n’est pas évident, car je n’ai que quatre directeurs à ma disposition. Nous manquons de personnel par rapport à certains conseils. Nous essayons de travailler au profit de ce grand pays qu’est l’Algérie, nous avons des atouts qui nous permettent d’aller de l’avant. Quand la loi sort dans le Journal officiel, on doit contrôler son application. Après le projet de loi, il y a ensuite discussion du projet de sorte à ce qu’il soit bien étudié et bien ficelé ».
« Le rapport annuel prêt dans 5 ou 6 mois »
En conclusion, le professeur et expert international des droits de l’Homme a exposé le plan d’action du CNDH à court et à moyen terme, ainsi que le plan stratégique de l’institution, tout en évoquant ses principales activités récentes, conformément au mandat qui lui est attribuée sur le volet de la protection et de la promotion des droits de l’homme et libertés en Algérie. « D’abord accélérer la prise des lois et textes d’exécution. Ensuite, nous en tant que Conseil national des droits de l’Homme, on va faire durant l’année, selon notre plan stratégique national des droits de l’homme, sur une période de trois ans, d’ici le 31 décembre 2025. Actuellement, nous envoyons des lettres partout, aux différents ministères et directions, pour récolter des renseignements pour deux choses. On est en train de préparer le rapport annuel. Qu’est-ce qu’il y a eu en 2022, le positif, le négatif, sur l’ensemble de l’État algérien. Ce rapport sera prêt dans cinq ou six mois. Beaucoup reste à faire. Les marches populaires libres de 2019 ont mené vers la réforme constitutionnelle, qui est venue à son tour avec de nouvelles idées et beaucoup de principes, avec des garanties des droits de l’Homme. Autant la réforme est grande et ambitieuse, autant son application n’est pas facile. Beaucoup d’institutions ont été installées, le Conseil supérieur de la jeunesse, l’Observatoire national de la société civile, le Conseil national des droits de l’Homme, l’Organe national de prévention et de lutte contre la corruption. Tous ces organismes avec les lois qui vont venir, il y aura du nouveau en Algérie », a-t-il conclu.
Synthèse Hamid Si Ahmed