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Erdogan ne sait plus sur quel pied danser en Syrie

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Par Ali El Hadj Tahar

Le président turc Recep Tayyip Erdogan a évoqué vendredi par téléphone la question syrienne et la situation en Libye avec le président français Emmanuel Macron et la chancelière allemande Angela Merkel.
M. Erdogan a déclaré que « l’agression » du gouvernement syrien et de ses partisans dans la province d’Idleb devait être arrêtée, a indiqué l’agence de presse turque Anadolu. Au cours des deux dernières semaines, 16 militaires turcs ont été tués dans cette région depuis début février lors des attaques des forces gouvernementales syriennes. D’autres sources indiquent un bilan beaucoup plus lourd. Alors qu’il est enlisé en Syrie, Erdogan n’a pas manqué d’exhorter Paris et Berlin à coopérer davantage sur le dossier libyen. C’est donc sur deux fronts qu’avance, péniblement d’ailleurs, le Président turc, espérant redorer le blason terni des Ottomans. L’avènement du « printemps arabe » lui a donné une âme de conquérant. Allié du Qatar, lui-même outil de l’Occident en Syrie, la Turquie se définit à partir de 2011 une politique étrangère de plus en plus hégémonique en Syrie, en devenant le porte-drapeau des frères musulmans et couplant ses objectifs avec ceux de l’Alliance atlantique dont elle est membre.
Danser sur deux airs à la fois lui était facile quand le rythme de l’OTAN était en harmonie avec celui des frères musulmans. L’objectif était d’abattre le gouvernement syrien dans le cadre du plan « printemps arabe » d’Hillary Clinton. Mais l’OTAN, et particulièrement les États-Unis, ont commencé à viser d’autres buts en Syrie. D’ailleurs, de nombreux spécialistes ont alerté sur les velléités occidentales d’y créer un État kurde, probablement dans l’objectif également inavoué d’instaurer un État plus grand regroupant les Kurdes d’Irak, d’Iran, de Syrie et de Turquie. Sa haine envers le président laïc El Assad ― ennemi juré pour des raisons à la fois économiques, idéologiques et confessionnelles ―, a empêché Erdogan de prendre conscience à temps des menaces pesant sur son propre pays à cause de ce même plan de destruction de la Syrie auquel il prêtait main forte. Puis revirement : en 2016, l’armée turque lance l’opération Bouclier de l’Euphrate suivie de Rameau d’olivier de 2018, dans le Nord de la Syrie contre les Forces démocratiques syriennes, fer de lance des Occidentaux. Ces opérations suscitent la colère de Paris et de Berlin. Critiqué par les Européens, trahi par les Américains qui avaient décidé de quitter la Syrie, Ankara se rapproche de Moscou, qui accepte de vendre à ce membre de l’OTAN une batterie de défense stratégique, le S400. Parallèlement, Erdogan signe avec Moscou et Téhéran un accord de désescalade à Idlib pour la mise en place d’une zone démilitarisée et le retrait des groupes radicaux de cette zone. Les terroristes, toujours soutenus par l’Occident et la Turquie, ne respectant pas le cessez-le-feu, l’armée syrienne décide de régler la solution militairement. Erdogan lance alors sa troisième opération Source de paix : Emmanuel Macron et Angela Merkel l’appellent à cesser son offensive. Le président français compte même prendre des mesures de rétorsion, et voulant « signifier aux Turcs la fin de toutes nos ventes d’armes », proposition aussitôt soutenue par l’Italie.
Les Russes étant déterminés à bloquer la dernière offensive turque, Erdogan se tourne encore une fois vers ses alliés de l’OTAN, espérant les convaincre à en découdre avec El Assad, alors que la Russie s’est toujours réservée le droit d’aider la Syrie. Dans sa énième volte-face, Erdogan ne va probablement pas trouver d’allié véritable surtout s’il faudrait se battre contre les forces russes. Merkel et Macron tout comme Poutine vont lui permettre de sauver la face en acceptant, comme cela semble se préciser, une deuxième réunion au sommet qui aura encore probablement lieu en Turquie. Un sommet tripartite entre la Russie, la Turquie et l’Iran est prévu, quant à lui, au courant du mois prochain à Téhéran.
A. E. T.

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