Toujours avec la même cadence, le même rythme, plus de détermination, les Algériens sont sortis hier pour le 22e vendredi de mobilisation citoyenne pacifique, dans les 48 wilayas du pays, pour revendiquer de nouveau le changement radical, l’édification d’un État de droit démocratique, en insistant encore sur le départ des figures du système, comme préalable à tout dialogue pour une sortie de crise.
En effet, les manifestants ont commencé à affluer vers le centre-ville de la capitale, comme de coutume, dans la matinée, avant que la procession humaine ne s’épaisse davantage juste après la prière d’El Djoumouâa. Les marcheurs scandent des slogans qui revendiquent le départ des symboles du système, l’édification d’un État démocratique. «Dawla madania machi askaria, boulissia» (On veut un État civil, non militaire et non policier, ndlr), scande de vive voix et à gorge déployée les manifestants.
Aussi les protestataires ont entonné en chœur « l’indépendance du peuple», comme slogan qui a retenti dans les rues et villes du pays le 5 juillet dernier. «El chaab yourid el istiklal», pouvait-on entendre plein les oreilles. Parmi les slogans édifiants, on peut aussi citer le fameux «irhalou, trouhou gaâ» (Vous partez, dégagez tous, ndlr).
Pour le peuple sorti en masse, la libération des détenus du mouvement populaire est indiscutable, comme l’expriment clairement les pancartes déployées en la circonstance. «Libérez, libérez El Soudjanaâ (prisonniers d’opinion, ndlr)» ; «Libérez, Bouregaa», pouvait-on encore lire. Insistant sur la continuité et la poursuite du « mouvement pacifique » jusqu’à la satisfaction de toutes les revendications.
«Yahna ya n’touma, maranach habssine, kol djemaa kharjin», disent encore les marcheurs comme pour dire que le mouvement poursuivra ses marches du vendredi jusqu’au départ des figures du régime. Par ailleurs les citoyens ont affirmé que «seul le peuple peut décider de son destin», en appelant à l’application des articles 7 et 8 de la Constitution.
Un dispositif sécuritaire impressionnant
Depuis les premières heures de cette journée, un dispositif impressionnant des forces de l’ordre s’est mis en place. Il a été déployé tout au long de l’itinéraire allant de la place Maurice Audin jusqu’à la Grande poste en passant par les boulevards et ruelles adjacentes. Durant cette action, le dispositif de police a tenté d’empêcher les citoyens pacifiques de se rassembler en petits groupes, voire même les dissuader à marcher. Les autorités sécuritaires ont trouvé comme moyen, restreindre l’itinéraire habituel à la marche de ce vendredi, en laissant tout juste un espace au niveau de la place Maurice Audin jusqu’ à la Grande poste. Toutefois, les manifestants ont réussi à franchir les barricades dressées par la police.
Le Mouvement au goût de la CAN-2019 et des Fennecs
La 22e marche pacifique prend cette fois-ci un autre aspect, puisqu’elle s’est coïncidée avec la finale de la Coupe d’Afrique des nations entre l’Algérie et le Sénégal. Ainsi au moment où des observateurs misent sur la baisse de la mobilisation, les Algériens ont démontré le contraire. Ils affirment en effet que rien ne pourra «affaiblir notre volonté, ni nous faire abandonner nos aspirations politiques». Autrement, le match prévu hier n’a pas influé sur la mobilisation, a-t-on constaté. Contrairement à ce qu’attendaient certains, le parcours des Verts en Egypte a plutôt galvanisé les manifestants et n’a pas affecté l’esprit du mouvement populaire et pacifique.
Des bus spéciaux pour transporter les citoyens au stade
En parallèle à cette manifestation, des bus d’ETUSA sont mis à la disposition des citoyens pour rallier le stade du 5 Juillet où le match de la finale de la CAN a été diffusé en grand écran. Toutefois, les citoyens ont refusé de monter à bord en réclamant l’ouverture du métro et d’autres moyens de transport, qui sont fermés chaque vendredi, depuis les premières marches populaires.
Sarah Oubraham