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Vitrine touristique phare de Tizi Ouzou : Tigzirt, toujours si «chère» aux estivants !

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Station balnéaire par excellence, la ville de Tigzirt, sise à 40 kilomètres au nord de Tizi Ouzou et distante de 120 kilomètres d’Alger ouvre, comme chaque saison estivale, ses portes aux visiteurs. Mais, à quel prix et pour quelles prestations touristiques ? Au-delà les calculs pécuniaires, l’anciennement connue sous le nom de «Iomnium», supposée fondée entre 145 et 147 avant J.C, fait toujours rêver les estivants…

Reportage réalisé par Farid Guellil

Au plan géographique, Tigzirt se situe entre la Méditerranée au nord, les communes de Boudjima au sud, Mizrana à l’ouest, et Iflissen et Timizart à l’est. Et si, aujourd’hui, elle résiste aux aléas du temps et de l’histoire humaine, c’est surtout grâce à ses 2 000 ans d’existence, sous les occupations successives des Phéniciens, Vandales, Byzantins, Romains… jusqu’à l’arrivée des Français. Vous comprendrez dès lors que ses plages magnifiques, son îlot emblématique- appelé «Tigzirt n-daxel» en berbère- et ses paysages pittoresques ne sont qu’une vitrine d’un socle touristique millénaire.
Car, celui qui visite Tigzirt ne saurait se satisfaire d’une plongée marine sans une plongée dans l’histoire ancienne de cette ville côtière, son musée, ses ruines romaines et autres vestiges de l’antiquité. En effet, cette station balnéaire dispose de quatre plages autorisées à la baignade, qui sont «Tassalast», «Feraoun est», «Feraoun ouest» et «La Grande plage». Vous vous poserez la question sur la «Petite» ? Effectivement, jusqu’à quelques années en arrière, elle existait avant de disparaitre pour céder sa place au nouveau «Port de pêche et de plaisance». Lequel espace de loisir et de détente, faut-il le souligner, aura le mérite d’avoir relancé l’activité touristique à Tigzirt. Car, ces dernières années, pour une petite ville surtout, elle est sous la pression d’une urbanisation anarchique, qui étouffe ses habitants, et se retrouve en mal d’espaces pour satisfaire le flux des estivants qui la convoitent chaque été. Il faut dire que pour une zone classée touristique, la collectivité doit l’essentiel de sa rente au tourisme. D’ailleurs, en dehors de la saison estivale, et hormis l’activité de restauration, Tigzirt est plus ou moins animée.

La gratuité des plages, oui ! Mais à quel prix ?
Vue d’Alger, s’il y a une question qui préoccupe les autorités centrales ça serait «la gratuité des plages». C’est le feuilleton de l’été qui revient chaque année mais assez souvent confronté à une réalité de terrain toute autre. Loin des discours en effet, les estivants paient toujours aussi cher pour se permettre des vacances. Et encore, pour quelles prestations ? Sur ce plan, Tigzirt ne déroge pas forcément à la règle. Seulement, les activités commerciales sont toutes ou presque autorisées par les autorités locales. C’est-à-dire, si maintenant le prix d’accès à la plage est gracieux, il n’en demeure pas moins que le visiteur juge les prestations, en termes de la restauration, la location des parasols, les articles à la baignade…en dessus de ses moyens financiers. Le témoignage vient d’un père de famille, abordé au niveau de la Grande Plage. Accompagné de son épouse et de trois fillettes en bas âges, Amar assure avoir acheté une bouteille d’eau minérale à 100 DA et une boisson gazeuse d’un litre à 150 DA. «C’est trop cher. Si ce n’était pas mes enfants et ma femme, je n’aurais jamais acheté à ce prix là», témoigne ce quinquagénaire, qui avoue, toutefois, avoir passé «bon moment en compagnie de sa petite famille».
Comme à chaque jour du weekend, en ce vendredi du mois de juillet, cette plage a accueilli beaucoup de monde. L’ambiance était des plus animées. Passons les baignades dans le large et les séances de bronzage. Les estivants, parmi jeunes et enfants, en effet, ont eu droit à des parties de jeux qui engagent un certain nombre de participants. Le jeu met sur scène deux lignes composées de jeunes garçons et filles qui s’échangent des sacs fins remplis d’eau. Bref, cette partie de divertissement permet aux familles de faire distraire leur progéniture plus qu’elle n’en profite aux parents eux même en tout cas. Car, eux semblent préoccupés par la gestion du portefeuille. Interrogé, un autre parent, la quarantaine passée, lui, déplore le fait d’avoir déboursé «800 DA» pour payer le prix du parasol + une chaise. Et si maintenant, le visiteur voudra se permettre plus de confort, il doit payer encore 400 DA pour s’assoir sur une table. «Les prix sont augmentés chaque année. A Tigzirt, c’est la règle. Lorsqu’on se plaint de la cherté des prestations sur la plage, les vendeurs trouvent le moyen de justifier ça par le prix du loyer qu’ils paient aux autorités», a témoigné notre interlocuteur.

Une rue en guise de parking automobile
De l’autre côté de la Grande Plage, un peu vers l’Ouest, en empruntant la «Rue du 11 décembre 1960» longeant la bande littorale de Tigzirt, les lieux abritent plusieurs activités commerçantes. Des locateurs d’articles de baignade (shorts, teeshirts, bouées de sauvetage…), en passant par des fastfoods servant sandwichs et boissons fraîches, jusqu’au vendeur de poisson à la sortie de l’ancien port de la ville, l’artère grouille de monde.
A une dizaine de mètres du véhicule qui nous conduit, un homme, portant un gilet de couleur vert clair et un badge suspendu autour du cou, s’affirme d’un geste être l’opérateur qui tient le parking automobile. «Bienvenue messieurs. Vous pouvez garer votre véhicule à droite, juste derrière ce fourgon», a-t-il indiqué en exhibant une pile de tickets pour un droit de stationnement valant 100 DA. Votre activité est-elle autorisée par les autorités ?, l’a-t-on interrogé. «Bien sûr que nous avons obtenu l’autorisation de l’APC de Tigzirt. Vous jugez le prix d’exagéré ? C’est ça ? Je vous assure que j’ai payé à la collectivité locale 48 millions à raison de toute la période estivale comme droits de location de cette rue…», a-t-il justifié sans pour autant se plaindre auprès de lui à propos du prix du ticket.
En effet, si l’APC a décidé d’ouvrir à la location cette rue, c’est à cause de l’exigüité et le manque d’espaces pour une telle activité. Du coup, c’est le souci des bouchons qui rend la circulation routière peu fluide pour une ville, déjà victime d’espaces limités. C’est l’un des problèmes en effet vécus au quotidien par les habitants de la ville. «Chaque jour que Dieu fait, on a du mal à trouver où garer nos véhicules. C’est pire encore avec l’affluence des visiteurs en cette saison de l’année», dira Mokrane, un père de famille, qui tient un restaurant dans la ville.

L’offre en hébergement, c’est selon …
En matière d’hébergement, outre trois à quatre hôtels plus ou moins bien lotis, les visiteurs ont tendance à chercher auprès des propriétaires d’appartements (F2 et F3) pour location. Pour les tarifs pratiqués au niveau des hôtels, ils varient d’un établissement à un autre. Ainsi, dans l’un des hôtels connus de la ville, le prix de la nuitée pour une chambre single est de 18 000 DA.

Pour une chambre double, le prix revient à 12 400 DA alors qu’un espace à trois personnes coûte 16 600 DA. Pour le propriétaire, s’il est vrai que l’affluence est moindre cette année, il n’en demeure pas moins que les vacanciers viennent d’un peu partout des quatre coins du pays. D’Alger surtout, mais aussi de Boumerdès, Bejaia, Oran, Relizane…Si maintenant, le visiteur ne pourrait pas se permettre un séjour dans un hôtel pendant un certain nombre de jours, il s’oriente vers les propriétaires d’appartement dans cette ville balnéaire. Et même ceux implanté un peu loin de Tigzirt. Ainsi, pour louer un appartement (F2 ou F3), le vacancier doit débourser entre 5 000 DA et 12 000 DA/jour. Le prix varie selon la qualité de l’appartement mais surtout des capacités de négociation de la personne avec le proprio.

Baisse du flux des estivants entre juin et juillet
Même s’il est tôt de se prononcer encore, d’aucuns estiment que la saison estivale 2018 est moindre par rapport à l’année passée. Notamment, en termes du flux des visiteurs. Selon la direction du tourisme de Tizi Ouzou, au cours des deux mois de juin et juillet, le niveau des estivants a baissé de quelque 200.000 par rapport à l’année 2017. Du coup, à s’interroger sur les raisons en attendant la fin de la saison estivale. En tout cas, pour les personnes interrogées à ce sujet, des habitants fins connaisseurs et étant auprès de l’activité touristique à Tigzirt, beaucoup de facteurs ont fait que le niveau d’attractivité de la ville a quelque peu baissé. L’insalubrité, les pénuries récurrentes de l’eau et le manque des parkings automobiles, en sont quelques raisons évoquées par un habitant rencontré sur place. Toutefois, durant les weekends surtout, l’activité touristique enregistre des pics pour ne citer que quelques sites, tel que le Port de plaisance et de pêche implanté sur l’ancienne «Petite Plage» ainsi que les «Ruines romaines». Pour booster davantage l’attractivité de la ville, les autorités locales organisent des animations nocturnes à travers des soirées musicales. Ainsi, pour sa première édition «Les Belles nuits de Tigzirt» promettent de réanimer à nouveau la vie nocturne de la citadelle. Organisées à partir de 21 heures de chaque soir, ces soirées artistiques s’étaleront jusqu’au 20 août prochain. Ainsi, se sont déja défilés, les Ali Amrane, Mohamed Allaoua, Rabah Asma, Ali Ferhati, ou encore Amel Zen.
F. G.

SLIMANE HABCHI, ÉLU À L’APC DE TIGZIRT, CHARGÉ DE LA GESTION DE LA SAISON ESTIVALE :
«Malgré les manques, Tigzirt reste prisée par des milliers d’estivants »

-Le Courrier d’Algérie: À mi-chemin de la saison estivale à Tigzirt, comment évaluez-vous l’affluence des estivants ?
-Slimane Habchi: Oui je suis élu à l’APC de Tigzirt. Je suis également nommé administrateur de l’une des trois plages de cette ville en l’occurrence la Grande Plage. Donc, je suis directement concerné par la gestion de la saison estivale qui bat actuellement son plein. Je dois dire qu’on a déployé des efforts considérables durant les préparatifs de l’ouverture de la saison afin de réunir toutes les conditions pour un meilleur cadre d’accueil à offrir aux estivants. Pour l’affluence, elle était timide au début et moyenne à l’heure actuelle. L’opinion tigzirtoise a bien observé la baisse des visiteurs cette année par rapport aux saisons précédentes. Derrière ce recul, d’un côté, il y a l’érosion du pouvoir d’achat des Algériens. Beaucoup en effet ne peuvent se permettre des vacances balnéaires. De l’autre, c’est à cause des conditions dont on a parlé. C’est vrai que par le passé, Tigzirt souffrait de pénuries aiguës en matière d’alimentation en eau potable. Mais, ces derniers temps, il y a une amélioration remarquable surtout avec la remise en service de la station de dessalement locale. Nous avons aussi le manque d’aires de stationnement qui fait dissuader certains estivants. Aussi, il y a d’autres qui évoquent la cherté des produits de consommation et des services. Tout ça a entaché un peu l’image de marque de Tigzirt, qui est une très belle région où les habitants sont hospitaliers d’où le potentiel touristique qu’elle regorge. En matière de sécurité en ville ou sur les plages les services de sécurité font un travail remarquable. Sur un autre plan, nos équipes de voieries communales travaillent 7/7 pour assurer la collecte des ordures. Toutefois, nous avons un terrible manque d’effectifs pour assurer le nettoyage des plages. C’est grâce à l’aide de nos jeunes que nous assurons ce service régulièrement et nous les félicitons à l’occasion.

-On juge trop chers les droits d’exploitation de la Rue 11 Décembre 60 comme parking automobile…et puis, y a-t-il d’autres espaces ouverts à la location ?
-Comme nous l’avons souligné, le stationnement est un problème épineux à Tigzirt à l’instar de beaucoup de villes du pays. Un nouveau plan de circulation à été mis en place comme réponse à ce problème. Mais, il reste insuffisant tant qu’on n’a pas de parkings au sens propre du terme. En saison estivale comme chaque année, on improvise des rues et guides de parkings gardés pour soulager cette pression. Il s’agit d’une voie de la rue du 11 Décembre, allant jusqu’à la rentrée de la Grande Plage et d’une voie de la rue menant de la sortie ouest du port jusqu’ à la rentrée de la plage Tassalast. Pour les prix des parkings, nous portons à votre information que nous les avons lancés en adjudication publique et le locataire actuel a soumissionné. Il nous a fait une offre de prix comme tous les autres et la réglementation en termes d’adjudication publique à été bien respectée.

-Tigzirt est une ville touristique par excellence et la collectivité locale en tire profit à travers des rentrées d’argent dans ses caisses. Cet attribut ne serait-il pas derrière les prix jugés excessifs par les estivants ?
– Effectivement, Tigzirt est une région à vocation touristique par excellence. Elle reste prisée par des milliers d’estivants malgré les manques. Cette convoitise se répercute positivement sur l’économie locale. Tout le monde y trouve son compte à commencer par les commerçants tous types d’activités confondues. C’est-à-dire, et la recette communale et les jeunes chômeurs, qui se font de l’argent de poche. Des raisons, somme toute, qui font que tout le monde attend avec impatiente l’arrivée de cette saison.
F. G.

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