Accueil ACTUALITÉ Violence contre les enfants : Le président de la Forem tire ...

Violence contre les enfants : Le président de la Forem tire la sonnette d’alarme

0

Pédiatre et homme de terrain, le professeur Mustapha Khiati, président de la Fondation nationale pour la promotion de la santé et le développement de la recherche (Forem), tire la sonnette quant aux problèmes auxquels sont confrontés les enfants en Algérie.

Entretien réalisé par Lamia Boufassa

Maltraitance, malnutrition, manque d’affection parentale, pauvreté, ignorance et travail dans des conditions dangereuses, les enfants algériens sont souvent victimes des aléas d’une société qui, de l’avis des spécialistes, a perdu ses valeurs. Dans un entretien, le Pr Khiati livre des chiffres qui donnent froid au dos. Selon lui l’Algérie compte 300 000 enfants travailleurs, et plus de 50 000 enfants victimes de maltraitance et plus de 1000 victimes d’agressions sexuelles annuellement.

Le Courrier d’Algérie: De prime abord, pouvez-vous nous éclairer quant à la situation des droits des enfants en Algérie ?
Mustapha Khiati : Malgré les efforts consentis par l’État en vue d’offrir à nos enfants un meilleur cadre de vie, mais dans l’ensemble on peut considérer qu’ils n’ont pas suffisamment obtenu leurs droits. Je m’explique : il y a eu beaucoup de lois établies en vue de protéger l’enfance mais on s’attendait à des lois globales. Pour l’instant on est resté sur notre faim. La mise en place de la nouvelle loi, n° 15/12, relative à la protection de l’enfant qui a institué l’organe national de la protection et de la promotion de l’enfance, ne définit pas les mesures à prendre lorsqu’il y a des problèmes, par exemple la maltraitance, alors qu’on compte aujourd’hui plus de 50 000 enfants victimes de ce fléau. Autrement, il n’y a pas encore des mécanismes de lutte contre cette problématique qui ne cesse de prendre de l’ampleur. Il y a également le problème du travail des enfants. L’Algérie compte plus de 300 000 enfants qui travaillent, alors que la loi est claire : «l’enfant doit être scolarisé jusqu’à 16 ans», mais hélas ceci n’est pas appliqué sur le terrain.

Le phénomène de kidnapping d’enfants prend-il de nouvelles dimensions en Algérie ?
La question du kidnapping a été surmédiatisée, mais il n’y a pas beaucoup de situations. Je considère que le kidnapping d’enfants ne constitue pas un fléau national. Néanmoins, il y a une confusion entre disparition et kidnapping. Les deux sont différents, et c’est vrai qu’il y a beaucoup de dissipations, qu’on estime autour de 200 à 300 victimes.
La majorité des cas de kidnapping concerne des enfants de plus de dix ans, qui se retrouvent ainsi victimes d’actes de provocation ou carrément de règlements de comptes, mais pour les disparitions les enfants de moins de dix ans sont les plus concernés.

Qu’en est-t-il des abus sexuels ?
Le problème des agressions sexuelles est un problème qui est devenu inquiétant dans la société, puisque les chiffres officiels parlent de plus de 1 000 cas annuellement. Bien qu’on estime que ce chiffre est loin de la réalité étant donné que le sujet est un tabou dans la société, il n’en demeure pas moins que 80% des cas ne parlent pas, surtout que les plupart des victimes sont des cas d’incestes. Mais on remarque souvent que malgré le fait que ces crimes soient signalés, étant donné qu’il est difficile de trouver une prise en charge rapide. Donc souvent, l’enfant est laissé dans les mêmes conditions d’agression. On perpétue l’agression alors qu’on est au courant.

Que pensez-vous du retour de la peine de mort ?
Les enfants subissent des abus sexuels par des gens qu’on ne peut pas considérer comme normaux. La peine de mort doit être rétablie dans les cas d’assassinat d’enfants, mais il faudrait surtout réaliser des études sur les raisons de l’effondrement de l’échelle des valeurs en Algérie.

Comment évaluez-vous la situation des enfants migrants en Algérie ?
On devrait avoir une position plus souple à l’égard des enfants migrants. En tant que société civile, on devrait demander à ce que ces enfants soient scolarisés et soignés en attendant de trouver des solutions. Certains disent que ça revient cher à l’Algérie de prendre en charge ces enfants, mais quand on voit que des millions de dollars sont jetés en pain qui n’est pas consommé, on se demande ce qui revient cher à l’État. L’Algérie doit préserver son image d’un pays qui défend les valeurs universelles.

L. B.

Article précédentLe domino libyen
Article suivantIl s’est réuni hier avec Hasbellaoui et Hadjar : Ouyahia prend en main le dossier des médecins résidents